Lors des reprises administratives de concessions, que ce soit à l’échéance ou à la suite d’une procédure d’abandon, les Villes confient les travaux d’exhumation soit à des sociétés dûment habilitées, soit à leurs employés municipaux.
Il s’agit donc de savoir si lesdits employés sont soumis à l’habilitation funéraire ou si l’acte réputé administratif pourrait en être dispensé.
Le "Guide juridique" relatif à la législation funéraire à l’attention des collectivités territoriales édité en 2017 par la Direction Générale des Collectivités Locales (DGCL) rappelle (page 12) que les régies municipales ou intercommunales de pompes funèbres peuvent assurer les prestations du service extérieur des pompes funèbres ou la gestion d’un crématorium dans la mesure où elles sont titulaires de l’habilitation correspondante. L’habilitation est toujours requise, même si la régie n’assure pas la totalité des prestations du service extérieur des pompes funèbres, et dispose uniquement, par exemple, d’un agent communal affecté aux travaux de fossoyage dans le cimetière.
Une ambiguïté s’est donc insérée quant à la désignation de "régie municipale". Certaines municipalités ont estimé qu’était considéré comme régie un service qui tarifait son action, et qu’à partir de l’instant où les travaux s’exerçaient en interne, ils ne relevaient pas directement d’une régie, au titre de recettes et dépenses, comme on pouvait l’entendre usuellement.
La DGCL, interrogée sur cette question, apporte les précisions suivantes :
Lors des opérations de reprises administrative des concessions funéraires (arrivées à échéance, ou au terme d’une procédure d’état d’abandon), les travaux se traduisent par des opérations de nature juridique différente :
- Tout d’abord, le retrait (tout comme la construction, voir art. L. 2223-13 du Code Général des Collectivités Territoriales - CGCT) des monuments funéraires situés à la superficie de la concession funéraire arrivée à échéance et non récupérés par le titulaire avant expiration de la concession, ou au terme d’une procédure d’état d’abandon, peuvent être assimilés à des travaux de marbrerie funéraire. Cette prestation ne requiert aucune habilitation, conformément à l’art. L. 2223-19 du CGCT.
Ces éléments font alors partie du domaine privé de la commune, qui en dispose librement : elle peut les détruire, les utiliser ou les vendre. Ainsi, l’art. R. 2223-20 du CGCT relatif à la reprise de terrains concédés à l’issue d’une procédure de reprise pour état d’abandon de préciser : "Le maire peut faire enlever les matériaux des monuments et emblèmes funéraires restés sur la concession."
- Inversement, l’art. L. 2223-19 du CGCT inclut bien en son 8° "la fourniture de personnel et des objets et prestations nécessaires aux obsèques, inhumations exhumations et crémations [..]" parmi les activités nécessitant une habilitation.
Ainsi, l’ouverture du caveau, cavurne ou case de columbarium et l’exhumation des cercueils ou des urnes s’y trouvant font partie des prestations nécessaires aux activités mentionnées. Or, le Code n’opère pas de distinction entre les exhumations à la demande des familles et les exhumations administratives. L’habilitation de l’opérateur qui intervient (que ce soit un service communal ou une entreprise) est donc bien requise.
La question est donc de savoir qui doit solliciter l’habilitation dans le cas d’une régie municipale effectuant ces opérations ?
Afin d’ôter toute ambiguïté sur la définition d’une "régie municipale" sur qui doit alors solliciter une habilitation, la DGCL rappelle qu’en application de l’art. L. 2223-23 du CGCT, la "régie municipale" est soumise à l’habilitation préfectorale. Elle précise que les régies mentionnées par la loi sont les régies municipales, dotées ou non de l’autonomie financière ou de la personnalité morale, ainsi que les services, quelle que soit leur dénomination, par lesquels la commune assure directement le service extérieur des pompes funèbres.
La DGCL ajoute que cette notion n’a ici rien à voir avec la régie d’avances et de recettes, la reprise administrative des concessions funéraires n’étant pas liée à l’exploitation d’un service et ne générant par ailleurs aucune transaction financière.
L’habilitation préfectorale n’étant jamais délivrée "intuiti personae" (sauf cas particulier des thanatopracteurs exerçant en auto-entreprenariat), c’est bien à l’opérateur funéraire (régie dotée de la personnalité morale) de disposer d’une habilitation. La seule obligation portant sur l’agent communal (personne physique) correspond aux exigences de formation professionnelle prévue à l’art. R. 2223-42 du CGCT.
En conséquences, la Ville (par son maire) devient opérateur funéraire dès lors que ses agents procèdent à des opérations funéraires (exhumations) soumises à habilitation, et doit donc disposer d’une habilitation préfectorale. L’agent communal doit avoir subi une formation professionnelle d’une durée de 16 heures, qui peut a priori être dispensée par n’importe quel organisme, y compris par le CNFPT (Centre National de la Fonction Publique Territoriale). Cette formation n’ouvre pas droit à diplôme.
À noter que, dans le cas d’une régie non dotée de la personnalité morale et de l’autonomie financière, seuls les personnels de la régie doivent justifier de cette capacité professionnelle (voir 2° de l’art. L. 2223- 23 du CGCT).
La DGCL ajoute que cette précision pourra faire l’objet d’un rappel aux préfectures, qui transmettront aux collectivités.
L’Association Nationale des Personnels de Cimetières (A.NA.PE.C.), confrontée dans son réseau à des organisations de reprises très disparates, remercie son vice-président Mathieu Legrand, délégué de l’Association des Maires de France (AMF) au Conseil National des Opérations Funéraires (CNOF) pour son intervention auprès de la DGCL ayant permis de clarifier ces points afin qu’il n’y ait plus de malentendu sur cette question de l’habilitation funéraire pour des travaux d’exhumations effectués par les agents municipaux.
Cet article a fait l’objet d’une diffusion en interne auprès des adhérents de notre Association.
Isabelle Prigent
Présidente de l’A.NA.PE.C.
Résonance n° 153 - Septembre 2019
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