La lecture de l’art. L. 2223-14 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) invite à s’interroger sur l’existence de concessions funéraires de cent ans puisque, indubitablement, une concession centenaire ne figure pas parmi celles qu’est susceptible de concéder une commune.
Ce texte indique en effet que :
"Les communes peuvent, sans toutefois être tenues d’instituer l’ensemble des catégories ci-après énumérées, accorder dans leurs cimetières :
1° Des concessions temporaires pour quinze ans au plus ;
2° Des concessions trentenaires ;
3° Des concessions cinquantenaires ;
4° Des concessions perpétuelles".
Ces concessions ont pu être délivrées
Ce texte indique en effet que :
"Les communes peuvent, sans toutefois être tenues d’instituer l’ensemble des catégories ci-après énumérées, accorder dans leurs cimetières :
1° Des concessions temporaires pour quinze ans au plus ;
2° Des concessions trentenaires ;
3° Des concessions cinquantenaires ;
4° Des concessions perpétuelles".
Ces concessions ont pu être délivrées
Cependant, la question des concessions centenaires n’est pas aussi incongrue que l’on peut a priori l’imaginer. En effet, comme le rappelle Mme Viel (M.-T. Viel, Droit funéraire et gestion des cimetières : coll. "Administration locale", Berger-Levrault, 2e éd., 1999, p. 297), alors que le décret du 23 prairial an XII n’avait prévu que la possibilité de céder des concessions perpétuelles, c’est l’ordonnance du 6 déc. 1843 qui a ajouté les concessions trentenaires et temporaires (quinze ans au plus) aux options ouvertes aux communes. Pour tenter de décourager les demandes de concessions perpétuelles, la loi du 3 janv. 1924 viendra permettre l’institution de concessions centenaires, alors que celle du 24 fév. 1928 autorisera la délivrance de concessions cinquantenaires. Or, il importe de relever avec Mme Viel que, contrairement au dispositif actuellement applicable, les communes étaient tenues de proposer toutes les classes de concessions funéraires. C’est pourquoi l’ordonnance du 5 janv. 1959 a prévu que les communes pouvaient choisir parmi les classes proposées celles offertes dans leurs cimetières. Toutefois, en même temps qu’était créée cette option, l’ordonnance supprimait purement et simplement la possibilité de concéder une concession pour une durée de cent ans.
Elles ne peuvent plus être délivrées depuis 1959
Ainsi, ont été légalement délivrées dans les cimetières des concessions centenaires entre 1924 et 1959. Cet élément est loin d’être anodin puisque toutes les concessions délivrées sont encore en cours de validité, à moins qu’elles n’aient déjà fait l’objet d’une procédure de reprise pour état d’abandon (bien que la lecture des textes - notamment l’art. R. 2223-12 du CGCT - invite à penser que cette procédure ne concerne que les concessions perpétuelles, celle-ci s’applique pourtant à toutes les concessions d’une durée de trente ans et plus ; Rép. min. n° 11166 : JOAN Q, 26 sept. 1994, p. 4787).
Ces concessions centenaires sont encore indirectement mentionnées
Il est d’ailleurs encore fait expressément référence, dans le CGCT, aux concessions centenaires concernant la procédure de reprise pour état d’abandon d’une concession où a été inhumée une personne dont l’acte de décès porte la mention "mort pour la France", puisque l’alinéa 2 de l’art. R. 2223-22 dispose que :
"Lorsqu’une personne dont l’acte de décès porte la mention "Mort pour la France" régulièrement inscrite a été inhumée dans une concession perpétuelle ou centenaire, celle-ci ne peut faire l’objet d’une reprise avant l’expiration d’un délai de cinquante ans à compter de la date de l’inhumation. Cette disposition ne s’applique pas dans le cas où vient à expirer au cours des cinquante ans une concession centenaire".
Il existe donc toujours des concessions centenaires dans le cimetière et l’usager peut légitimement penser qu’une telle concession peut s’acquérir.
La gestion de l’arrivée à échéance de telles concessions
Ces concessions vont néanmoins poser dans quelques années des difficultés. En effet, dans moins de quinze ans, les services chargés des cimetières vont devoir gérer le devenir de ces sépultures. Il semble difficile de considérer qu’elles puissent malgré la lettre de l’art. L. 2223-15 du CGCT être renouvelées pour la même durée. Le présent jugement semble d’ailleurs indirectement mais nécessairement le confirmer. M. Chaillot (G. Chaillot, Le droit des sépultures en France : éd. PRO ROC 2004, p. 193) considère qu’elles "se renouvelleront alors pour des durées temporaires existantes, selon la loi, et pratiquées par la commune au moment de leur expiration, ou pour des concessions perpétuelles si la commune en délivre".
Il est aisément compréhensible que la volonté de supprimer ce type de concession constitue un obstacle logique à la possibilité d’obtenir le renouvellement d’une telle durée. Néanmoins, force est d’admettre que si la commune, par exemple, ne délivre plus de concession perpétuelle, ni de cinquantenaire, le renouvellement de la concession ne pourra se faire que pour le tiers de la durée initiale.
Reste que cette question demeure finalement générale. Si la commune cesse en effet, comme l’a expressément autorisé l’ordonnance du 5 janv. 1959, de délivrer une catégorie de concessions dans son cimetière (par exemple les cinquantenaires), les titulaires de telles concessions ne pourront que renouveler leurs concessions en concessions trentenaires (si une telle option existe sur le territoire communal).
Il faut cependant noter qu’en pratique certaines communes ont continué, après l’ordonnance n° 59-33 du 5 janv. 1959, à concéder, sans aucun fondement légal, des concessions centenaires. Interrogé en 1990 sur cette difficulté, le ministère de l’Intérieur ouvrait à ces communes une proposition de solutions alternatives ; soit créer des perpétuelles et convertir les centenaires illégales en perpétuelles, soit les "transformer" en cinquantenaires en remboursant le trop-perçu (Rép. min. 28638, JOAN Q 1er oct. 1990, p. 4610, cité par G. d’Abbadie et C. Bouriot, Code pratique des opérations funéraires : 3e éd. Le Moniteur 2004, p. 769).
Damien Dutrieux,
consultant au CRIDON Nord-Est, maître de conférences associé à l’Université de Lille 2.
consultant au CRIDON Nord-Est, maître de conférences associé à l’Université de Lille 2.
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