Le centre de l’union, l’âge du faire
À l’arrivée de chaque nouveau salon funéraire, notamment celui de Paris-Le Bourget, ressurgissent les mêmes concepts sous forme de tentatives de fédération des esprits autour d’un projet commun, celui-ci ayant pour but de préserver la profession funéraire d’elle-même, d’une part, d’un avenir qui s’annoncerait plutôt pessimiste, d’autre part.
"Qui sème la discorde est pourvoyeur du diable", rappelle un proverbe allemand. Nous n’allons donc pas nous faire les pourvoyeurs du démon par des propos défaitistes.
Cependant, il faut reconnaître que la crise que nous venons de traverser, que beaucoup estiment conjoncturelle, est en réalité un phénomène structurel et de long terme. Oui, les sociotypes évoluent rapidement et ce que nombre de nos concitoyens ont compris, c’est que la problématique obsèques leur coûte cher et qu’aujourd’hui les porte-monnaie acceptent difficilement ce qui semblait naturel il y a encore quelques mois.
Donc, si basculement économique il doit y avoir, comment pouvons-nous espérer atténuer l’impact de celui-ci ? Plusieurs écoles s’affronteront comme à l’habitude. La première dira : "Vous vous faites des idées, c’est du grand n’importe quoi." Dont acte. La seconde dira : "C’est possible, mais attendons pour voir et pour décider ce qui convient." Pourquoi pas ? La troisième dira : "Envisageons l’hypothèse et réfléchissons à plusieurs pour anticiper." Ceci ne vous rappelle rien ? Les Trois Petits Cochons, l’un avec sa maison de paille, l’autre sa maison de bois et le troisième sa maison de pierre. La symbolique de cette comptine pour enfants est révélatrice de la nature humaine. "Attendre pour voir" relève d’un optimisme béat et souvent se termine en drame.
Nous avons la chance de compter désormais dans les rangs de notre profession bon nombre de chefs d’entreprises très inspirés et dont les résultats ne tiennent en rien au hasard, mais à une observation attentive du marché, de leur filière, de leur capacité de croissance. Ces qualités managériales ont toutes un point commun, l’écoute. Le temps est peut-être venu de se mettre autour d’une table, de rassembler les figures notables de notre profession, et d’échanger librement sur les différents aspects d’un marché fluctuant où la prédominance des intérêts financiers vont peu ou prou redessiner des contours qui n’épargneront personne. Imaginer un seul instant passer au travers des gouttes est une chimère. Recréer le centre de "l’union" semble a contrario une voie acceptable de dialogue et d’échange sur une thématique commune.
Il ne s’agit pas ici de se noyer dans des bavardages stériles ou des autocongratulations médaillées, mais bien de se parler et de faire que ces paroles ne restent pas des vœux pieux, mais des amorces de réponses à des questions que nous nous posons tous. Ces réponses pourront être portées le cas échéant auprès d’instances dites "représentatives" où siège l’État. Ce qui importe, c’est d’entrer désormais dans "l’âge du faire," de prendre conscience que nous sommes seuls les artisans de notre destin et que nous ne devons pas attendre d’intervention divine ou étatique pour faire progresser et pérenniser nos entreprises. "Vivre, prouve que tu existes" est un refrain célèbre. Pour Spinoza, l’existence, en actes, caractérise ainsi l’individu. Le terme d’union est donc réservé au rapport entre une chose singulière existant en actes et son idée. L’idée que nous nous faisons de nous-mêmes…
C’est bien parce qu’il s’agit de nous, de notre place dans ce grand projet de vie que nous avons initié notamment au travers de nos entreprises, que nous nous devons de faire un pas vers l’autre, partager et confronter pacifiquement et positivement nos idées pour recréer ce que des êtres inspirés nomment le "centre de l’union". Advienne que pourra…
Maud Batut
Rédactrice en chef adjointe
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