Le conformisme est-il devenu la norme ?
À bien analyser le discours de nombreuses enseignes commerciales, et pas nécessairement des enseignes funéraires, on prend conscience d’une banalisation du langage. Prenons un exemple simple : l’information. Relayée médiatiquement par le jeu bien connu des copier-coller, l’actualité devient rapidement obsolète, périssable, avec une date de fraîcheur de seulement quelques heures.
Cette expression d’une forme de la pensée unique a pour nom "le conformisme", un processus d’influence sociale par lequel une personne ou un groupe est conduit à aligner ses propres perceptions, croyances ou comportements sur ceux d’un ensemble d’autres personnes.
La bonne question à se poser est de savoir pourquoi nous nous conformons aux normes sociales au point d’en oublier nos individualités ? L’individu se conforme avant tout pour éviter le conflit qui peut surgir de la manifestation de deux opinions différentes. Sur ce point précis, il faut oublier les notions de majorité ou de minorité. Votre environnement social immédiat, même si sa pensée est minoritaire pour le plus grand nombre, peut conditionner ce réflexe de survie sociale qu’est le conformisme.
En bref, vous "mettez un mouchoir sur vos propres opinions". Vision certes à court terme mais qui ne vous exonère pas de vos pensées intimes sur le sujet et, bien entendu, de votre petite voix dans la tête qui vous reproche votre lâcheté sociale.
La faiblesse de circonstance est une chose, la stratégie en est une autre. Vous pouvez très bien vous conformer à l’opinion du groupe afin d’éviter des sanctions mais également pour conforter votre position sociale dans celui-ci… Ce conformisme qualifié "d’utilitaire" n’atteint pas les croyances profondes de l’individu, cette orthodoxie de façade n’est qu’une tenue de camouflage qui vous permet d’atteindre ou de vous rapprocher des buts que vous vous êtes fixés. Cependant, les gens ont besoin de se sentir uniques : chacun veut se distinguer dans la masse en tant que citoyen meilleur par rapport à la moyenne, pour augmenter le sentiment de bien-être personnel. Ce sentiment porte un nom : la réactance.
D’une certaine façon, notre profession a besoin de cette forme de réactance, et appelons un chat un chat : d’anticonformisme créateur. C’est dans la critique objective des modèles de société qui nous sont imposés que se trouve la troisième voie, celle de la création libératrice et, somme toute, du progrès. Aujourd’hui, nous assistons à des cérémonies funéraires qui sont majoritairement stéréotypées, avec les mêmes clichés imposés comme des rituels alors que ce ne sont que des ersatz émotionnels.
Peut-être le temps est-il venu de penser différemment, de remettre en cause un certain nombre de certitudes, de s’attaquer aux racines du problème où la facilité, pour ne pas dire la paresse intellectuelle, tient le haut du pavé ; et de donner la parole aux sociologues et aux philosophes pour oser l’âge du "faire". Ne péchons pas par modestie immodérée, nous possédons en nous les ressources pour entreprendre cette révolution spirituelle et, à franchement parler, nous sommes aux premières loges en tant qu’initiateurs et acteurs.
Plus un être humain se sent compétent pour effectuer une tâche, moins il se conforme au groupe. Ce postulat a été mis en évidence notamment par deux sociologues, Worchel et Cooper. N’oublions donc jamais que si les groupes façonnent et socialisent les individus en leur imprimant un mode de faire et de penser, ceux-ci sont néanmoins composés d’individualités.
C’est aujourd’hui à la puissance créative des individus qu’il faut faire appel afin de retracer des perspectives qui renvoient le panurgisme ambiant aux oubliettes de l’histoire. Affichons nos intelligences, nos ambitions, notre anticonformisme, notre capacité de faire et créons enfin un environnement qui inspire au lieu d’anesthésier… Réveillons-nous !
Maud Batut
Rédactrice en chef
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