Le maire et son cimetière : une source permanente de responsabilité ?
Le juge administratif a reconnu l’existence d’une responsabilité en cas de non-utilisation de son pouvoir de police par le maire. Or, le maire est, en matière de police administrative, investi d’une compétence liée : il n’a pas seulement la faculté mais le devoir légal d’agir. En effet, l’art. L. 2213-8 du Code général des collectivités territoriales dispose que : "Le maire assure la police des funérailles et des cimetières" ; tandis que l’art. L. 2213-9 nous précise les domaines que recouvre cette formulation générale : "Sont soumis au pouvoir de police du maire le mode de transport des personnes décédées, le maintien de l’ordre et de la décence dans les cimetières, les inhumations et les exhumations, sans qu’il soit permis d’établir des distinctions ou des prescriptions particulières à raison des croyances ou du culte du défunt ou des circonstances qui ont accompagné sa mort".
Le juge administratif a d’ailleurs étendu, pour mieux les contrôler, les pouvoirs de police du maire jusqu’au pouvoir de gestion de cette portion du domaine public qu’est le cimetière (CE, 20 février 1946, Cauchoix, Rec. CE, p. 53), et ce, au détriment des compétences du conseil municipal. Ainsi, au titre du respect de la décence dans les cimetières, le maire doit assurer une surveillance effective de celui-ci, il doit s’assurer du bon état des sépultures, inviter les concessionnaires à effectuer les travaux nécessaires au maintien en état, à la propreté des sépultures... Cette surveillance implique également que le maire doive surveiller l’exécution des travaux qui sont réalisés dans l’enceinte du cimetière, travaux publics mais également travaux privés, comme la construction d’un caveau, d’une dalle mortuaire, d’un monument funéraire..., travaux dont l’exécution peut avoir des conséquences dommageables sur les autres concessions. L’abstention pour le maire d’exercer son pouvoir de surveillance, alors qu’un dommage est causé à une concession du fait des travaux, constitue une faute de service. De surcroît, la responsabilité communale peut être aussi mise en cause au titre de la législation des édifices menaçant ruine. En effet, les articles L. 511 à L. 511-4 du Code de la construction et de l’habitation sont parfaitement applicables aux monuments funéraires qui sont des édifices, quoique non dévolus à l’habitation.
En revanche, ne résulte pas d’une faute de service la chute d’une stèle voisine sur un monument funéraire dès lors qu’il est démontré que le maire exerce une surveillance adaptée du cimetière (TA Nancy, 22 janvier 2002, Gille, req. n° 001394). Enfin, cette obligation du maire de surveillance du cimetière semble trouver ses limites dans une obligation de moyens et non de résultats. Il a été déjà jugé (TA Marseille 8 juin 20014, M. et Mme G. c/ Ville de Marseille, req. n° 0200154) que le vol d’une pierre tombale dans le cimetière Saint-Pierre à Marseille n’engageait pas la responsabilité communale, à partir du moment où, de nouveau, la commune prouve qu’elle a diligenté les mesures normales de sécurité. Il faut souligner en l’espèce que cette nécropole de 63 hectares, la troisième de France, ne pouvait faire l’objet d’une surveillance constante par l’autorité administrative, et que l’obligation faite aux véhicules par le règlement de cimetière, d’accéder et de sortir par une seule entrée, toujours gardée, fut considéré par le juge comme une mesure suffisante…
Maud Batut
Rédactrice en chef
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