La première définition du corps donnée par le " Petit Larousse" est la suivante : "Organisme d’un être animé ; partie matérielle de l’être humain, par opposition à l’âme". Cet organisme fait l’objet de toutes nos attentions, il est omniprésent dans notre vie. Du début à la fin, il est là. Ce n’est pas une découverte de remarquer que notre corps existe, et qu’il est essentiel à notre vie. Mais quelle est la place du corps dans le décès ?
Marie Nouaille-Degorce, stagiaire thanatopracteur, en fin de formation.
Cet organisme n’est pas le fruit du hasard, et n’est pas créé à partir de rien. Ce corps commence à se former grâce à la fusion de deux éléments, à un partage du matériel génétique, à des séries de divisions cellulaires. C’est une construction où neuf mois sont nécessaires à notre corps pour s’adapter à la vie en dehors du sein maternel. La naissance est souvent source de joie. Nous sommes attendris par ces petits corps fragiles, délicats, dépendants. Et nous observons ce petit être humain, à la recherche de similitudes avec ses ascendants. Notre corps représente ce que nous sommes, et il est aussi un héritage de notre filiation.
Puis ce petit corps va grandir, évoluer au rythme des ans et de l’apprentissage intellectuel. Viennent ensuite les années où il faiblit, pour finir par s’éteindre. Ce qui illuminait ce corps n’est plus, la vie ne l’habite plus. Oui, mais même dans la mort le corps est malgré tout présent, et le défunt est toujours aimé. L’immense vide qui caractérise le deuil est causé par l’amour, car cet amour dépasse la mort, il est plus fort que la mort.
Lors d’un décès, il est une profonde contradiction : un corps… mais pas de vie. Puisque notre corps est fait pour la vie, il est difficile de réaliser qu’un jour cet organisme ne puisse plus maintenir ce souffle vital qui l’habite. C’est pourtant notre lot à tous de naître pour vivre, puis pour mourir. Lorsqu’une personne décède, son corps est semblable à celui d’un nourrisson : fragile, délicat, dépendant. Il est donc nécessaire qu’un personnel compétent soit chargé par la famille du défunt pour s’occuper de ce corps, si cette dernière souhaite en prendre particulièrement soin.
Ce corps est le reflet de ce qu’a été la personne. Le corps de ce défunt présent devant nos yeux a vécu une histoire humaine, avec ses joies, ses souffrances, physiques et/ou psychologiques. Ce corps est en quelque sorte le "souvenir" le plus précieux de l’être aimé. C’est pourquoi toutes les personnes qui ont à accomplir un acte sur le corps d’un défunt lui doivent un grand respect. Ce respect se traduit par des paroles (lorsque nous parlons d’un défunt) et des gestes attentifs, délicats.
Le thanatopracteur est la personne qui va "prendre soin" de ce précieux corps. Les soins que ce professionnel porte sur ce corps sont respectueux, car ils respectent le désir de la famille qui le mandate. Si certains gestes peuvent paraître violents au non initié (je pense à la ponction, par exemple), ils restent réfléchis et nécessaires dans la réalisation des soins. Tous ces gestes restent bienveillants envers le corps, pour la famille. Le thanatopracteur en effet réalise tous ces actes pour les vivants. Il est donc entièrement tourné vers la vie, par l’intermédiaire de ce corps sans vie.
La thanatopraxie s’inscrit parfaitement dans une démarche de respect et de sollicitude envers les vivants, que sont les familles lui accordant leur confiance. Et cette démarche s’étend au corps de la personne qui, après avoir vécu son histoire, a cessé de vivre. Le thanatopracteur est amené à réaliser des soins de conservation. L’expression est au pluriel car les soins sont multiples, il s’agit de plusieurs actes qui se complètent et prennent du temps. Tout cela doit être réfléchi, accompli en conscience, pour le bien des familles, des vivants, tout en respectant le corps et les désirs des proches.
Le corps mort atteste de la réalité de la mort, mais témoigne aussi d’une vie passée. Et les vivants qui l’entourent, par l’amour qu’ils lui portent toujours après le décès, gardent présent, en acte et en pensée, le souvenir de leur défunt. Ainsi, la thanatopraxie est profondément humaine et bienveillante. Là où les familles ne peuvent réaliser ces actes techniques, ce sont les mains du thanatopracteur qui vont traduire ce que les vivants éprouvent pour leur défunt.
Les mains du thanatopracteur, pour la paix des vivants.
Marie Nouaille-Degorce
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