Les soins de conservation ne sont jamais obligatoires en France, ils ne doivent donc jamais être imposés mais le devoir d’un conseiller funéraire est de les proposer, puisque cette prestation existe et ce, quel que soit l’état du corps au moment de l’organisation des obsèques, car nul ne peut présager de la rapidité à laquelle il va se dégrader.
Claire Sarazin, thanatopracteur et formatrice en thanatopraxie. |
Il est possible d’avoir une opinion fondée sur les causes du décès ou les traitements médicamenteux appliqués de son vivant au défunt, mais il s’agit juste d’un avis. Aucun moyen ne permet de le prévoir avec certitude. La décision de faire pratiquer ou non des soins de conservation revient toujours à la famille du défunt et en aucun cas à l’opérateur funéraire.
Aborder la question des soins de conservation avec les familles est toujours délicat. Lorsque les agents mortuaires parlent d’un corps et le personnel funéraire d’un défunt, pour la famille, il ne s’agit ni d’un corps ni d’un défunt, mais simplement de l’être cher auquel ils n’ont pas encore fait leurs adieux. Le travail de deuil ne commencera qu’après les obsèques, qui sont une étape importante. Il s’agit naturellement d’expliquer l’intérêt des soins de conservation, voire de les conseiller vivement dans certains cas, comme la veillée dans un domicile par exemple, mais en utilisant un vocabulaire choisi.
Il faut à tout prix éviter les mots trop explicites, comme "décomposition", "odeurs", "écoulements", qui sont trop choquants. Mieux vaut parler "d’anticiper d’éventuels changements" dus aux "transformations biologiques qui surviennent après le décès". Bien sûr, il faut adapter l’argumentaire à l’auditoire.
Les familles doivent être informées du fait que le thanatopracteur va pratiquer un acte invasif sur le corps du défunt, afin de prendre leur décision en toute connaissance de cause. Cependant, énoncer le protocole du soin sans prendre de précautions s’avérerait traumatisant et contre-productif. L’acte peut être expliqué par "l’injection d’un fluide bactéricide" destiné à "éviter les transformations naturelles du corps". La ponction peut être décrite comme "le drainage des fluides biologiques du corps qui sont source de prolifération bactérienne".
L’accent doit être mis sur le fait qu’il s’agit bien d’un soin apporté au corps et qu’en aucun cas la thanatopraxie n’est un acte outrageant ou dégradant mais qu’elle est destinée au contraire à restaurer l’apparence des défunts.
Le refus
Le conseiller funéraire peut se heurter à plusieurs types de refus :
- Une méfiance due à une méconnaissance de la thanatopraxie
Parfois, en l’absence d’information claire sur le sujet, les familles peuvent se faire des idées fausses sur la méthodologie employée, la plus courante étant un amalgame avec les pratiques de l ’Égypte antique, lorsque les corps étaient éviscérés. Il convient alors de les rassurer sur le fait qu’aucune atteinte n’est portée à l’intégrité du corps.
- Un problème de budget :
Sur un devis, tout est une question d’équilibre. La thanatopraxie a un coût, mais celui-ci est très raisonnable. Appliquer une marge sur les soins de conservation est illégal, sauf si l’entreprise de pompes funèbres possède une habilitation de thanatopracteur. Cette dernière ne peut lui être délivrée que si elle possède parmi son personnel un thanatopracteur en activité ou si elle a mis en place un contrat de sous-traitance avec une entreprise de thanatopraxie. Dans le cas contraire, les soins doivent être vendus à prix coûtant, ce qui n’interdit pas le versement d’une commission, puisque l’entrepreneur funéraire tient lieu d’intermédiaire entre le thanatopracteur et la famille.
Les pompes funèbres sont un commerce mais elles ont également une mission de service public. Il est normal de tirer un bénéfice de la vente des articles et des services funéraires en revanche, rentabiliser un corps humain confié par une famille est illégal et immoral. Les soins de conservations sont profitables aux familles, car ils leur permettent de commencer leur travail de deuil sur une image apaisée et apaisante et également aux pompes funèbres, qui voient leur tâche facilitée. La présentation des défunts participe aussi à la bonne image de l’entreprise.
- Des raisons philosophiques ou religieuses :
Lorsqu’un tel motif est invoqué, la discussion doit s’arrêter. Chacun est libre de souhaiter ou non un soin de conservation, pour lui-même ou pour un proche dont il règle les obsèques.
Claire Sarazin
Thanatopracteur
Formatrice en thanatopraxie
Résonance n°132 - Juillet 2017
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