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Un caveau a été construit pour quatre personnes en 2003, en novembre 2009 une inhumation a été faite dans le caveau, quelques mois après, courant 2010, des anomalies importantes sont constatées sur le monument.
Question :
Quelle est la garantie pour pouvoir obtenir réparation ?
 
Réponse :
Voici quelques éléments, mais le contentieux en la matière est très technique et un avocat spécialiste en droit de la construction s’impose à l’évidence.
 
Principe de responsabilité
 
L’art. 1792 du Code civil dispose que "tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination". Quant à l’art. 1792-2 du même Code, il indique que la présomption de responsabilité établie par l’art.1792 s’étend également aux dommages qui affectent la solidité des éléments d’équipement d’un bâtiment. La question s’est alors posée de savoir si les monuments et caveaux funéraires pouvaient être assimilés aux "ouvrages" évoqués par le Code civil, et ainsi in fine de connaître s’il existait une possibilité d’engager la responsabilité décennale (cf. Annexe 1 pour le lexique de la construction), des marbriers par exemple, en cas de malfaçon d’un monument funéraire ou d’un caveau, voire d’étendre cette responsabilité à la pose de ces objets.

La reconnaissance de la qualité d’ouvrage aux monuments funéraires et ses conséquences

1 - Les hésitations jurisprudentielles

 
La jurisprudence a longtemps hésité, et plusieurs volte-face ponctuent l’évolution jurisprudentielle sur la reconnaissance comme ouvrages des monuments funéraires. Elle a tout d’abord accepté (Tribunal d’instance de Carcassonne, 4 oct. 1983 : RD imm. 1985, p. 158, note P. Malinvaud), puis refusé (CA Bordeaux, 25 mars 1991 : RD imm. 1992, p. 229, note G. Leguay), puis derechef accepté (CA Toulouse 11 janv. 1999 : JurisData n° 1992-120516).
 
2 - L’arbitrage de la Cour de cassation
 
La Cour de cassation a ensuite définitivement arbitré le conflit, en reconnaissant la qualité d’ouvrage au sens de l’art. 1792 du Code civil, dans un arrêt du 17 déc. 2003. En effet, selon la troisième chambre civile de la Cour de cassation (Cass. 3e civ. 17 déc. 2003, pourvoi n° 02-17.388 : Répertoire du Notariat Defrénois 15 janv. 2005, art. 38 079, p. 60, note H. Périnet-Marquet ; cf. Annexe 2) :
"Attendu qu’ayant constaté que le caveau funéraire était une construction qui subissait des infiltrations rendant celui-ci impropre à sa destination, que la société Marbrerie du Quai n’établissait pas la survenance d’un cas de force majeure et que les époux X... avaient dû exhumer et transférer le corps de leur fille en Italie en l’absence de réparation définitive proposée par ladite société, la cour d’appel qui n’était pas tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, a, à bon droit, retenu que le caveau constituait un ouvrage au sens de l’art. 1792 du Code civil et a condamné la société Marbrerie du Quai, tenue pour responsable des désordres par application de ce texte, au paiement de diverses sommes en réparation des dommages liés directement aux désordres."

3 - La présomption de responsabilité
 
L’art. 1792 étant désormais de plein droit applicable aux constructions funéraires, qu’en était-il de l’application de l’art. 1792-2 du Code civil qui étend la présomption de responsabilité aux dommages qui affectent la solidité des éléments d’équipement d’un bâtiment ? Le monument funéraire est donc désormais un ouvrage mais est-il qualifiable pour autant de bâtiment ?
 
Encore une fois la position du juge a varié dans le temps.
 
4 - La notion de bâtiment
 
La cour d’appel d’Amiens (CA Amiens 19 fév. 1991, JCP 1992, IV, 968) avait tout d’abord estimé que "l’obligation d’assurance prescrite par l’art. L. 241-1 du Code des assurances ne visant que les ouvrages de bâtiment, c’est-à-dire les constructions qui assurent une fonction d’abri pour l’homme, un mur de soutènement ne relève pas des ouvrages de bâtiment et que sa construction n’est donc pas soumise à l’obligation d’assurance". Quelques jours après cette solution, la Cour de cassation invalide ce raisonnement en substituant à la notion de "techniques de travaux de bâtiment"celle de "travaux de bâtiment" (Cass. 1re civ. 26 fév.1991 : RD imm. 1991, p. 362), élargissant ainsi la portée de cette obligation d’assurance. Néanmoins, le droit funéraire n’était toujours pas concerné puisque la cour d’appel de Bordeaux (25 mars 1991 : JurisData n° 1991-047734) excluait les monuments funéraires du champ d’application de cet article, au motif que ce ne sont pas des bâtiments où l’on est amené à résider. Paradoxalement cela revenait à écarter la responsabilité décennale au profit de la responsabilité contractuelle du constructeur qui est, elle, trentenaire. Là encore la jurisprudence du 17 déc. 2003 rompt avec cette position puisque si l’art. 1792 peut concerner les monuments funéraires, le 1792-2 aussi.
 
5 - L’ordonnance du 8 juin 2005
 
Une ordonnance du 8 juin 2005 (n° 2005-658, JO du 9 juin 2005, p.10 094) portant modification de diverses dispositions relatives à l’obligation d’assurance dans le domaine de la construction et aux géomètres experts, a eu des conséquences au regard des éléments résultant de l’arrêt de la Cour de cassation du 17 déc. 2003.
 
Les articles L. 241-1 et suivants du Code des assurances imposaient une obligation d’assurance pour les travaux de bâtiment. L’objet principal des articles 1er et 3e de l’ordonnance, qui modifient respectivement le Code civil et le Code des assurances, est de revenir à l’esprit initial de la loi sur l’assurance obligatoire en précisant mieux son champ d’application et en apportant plus de sécurité juridique aux assurés et assureurs. Devant l’impossibilité de donner une définition suffisamment précise et simple à la notion de bâtiment, il est apparu préférable de retenir le principe de l’obligation d’assurance pour l’ensemble des ouvrages, sauf pour ceux figurant sur une liste exhaustive et qui, de ce fait, se trouvent expressément exclus de cette obligation. Il s’agit principalement des ouvrages de génie civil (ponts, routes, quais, voiries et réseaux divers...), sauf lorsque ceux-ci sont l’accessoire d’un ouvrage lui-même soumis à l’obligation d’assurance.
 
L’article 1er de l’ordonnance vient ainsi modifier par deux fois l’art. 1792-2 du Code civil en substituant tout d’abord le mot "ouvrage" au mot "bâtiment" , puis les mots "mentionnés à l’alinéa précédent" par les mots "de viabilité, de fondation, d’ossature, de clos ou de couvert".
 
6 - Nouvelle rédaction de l’article 1792-2 du Code civil
 
L’art. 1792-2 du Code civil est désormais ainsi rédigé :
"La présomption de responsabilité établie par l’art. 1792 s’étend également aux dommages qui affectent la solidité des éléments d’équipement d’un ouvrage, mais seulement lorsque ceux-ci font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d’ossature, de clos ou de couvert.
Un élément d’équipement est considéré comme formant indissociablement corps avec l’un des ouvrages de viabilité, de fondation, d’ossature, de clos ou de couvert lorsque sa dépose, son démontage ou son remplacement ne peut s’effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de cet ouvrage."
 
Par ailleurs, l’art. L. 111-30 du Code de la construction et de l’habitation est remplacé, par l’art. 4-XII de l’ordonnance du 8 juin 2005, par les dispositions suivantes :
"Art. L. 111-30. - Les règles relatives à l’assurance dommage obligatoire sont fixées par l’art. L. 242-1 du Code des assurances reproduit ci-après :
Art. L. 242-1. - Toute personne physique ou morale qui, agissant en qualité de propriétaire de l’ouvrage, de vendeur ou de mandataire du propriétaire de l’ouvrage, fait réaliser des travaux de construction, doit souscrire avant l’ouverture du chantier, pour son compte ou pour celui des propriétaires successifs, une assurance garantissant, en dehors de toute recherche des responsabilités, le paiement de la totalité des travaux de réparation des dommages de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens de l’art. 1792-1 du Code civil, les fabricants et importateurs ou le contrôleur technique sur le fondement de l’art.1792 du même Code. [...]."

7 - Conséquences sur le droit funéraire
 
L’ordonnance confirme donc les principes juridiques issus de l’arrêt du 17 déc. 2003 en appliquant la notion de garantie décennale aux monuments funéraires et caveaux.
 
Par ailleurs, les modifications apportées aux articles L. 111-30 du Code de la construction et de l’habitation et L.242-1 du Code des assurances paraissent rendre applicables de façon beaucoup plus directe leurs dispositions aux caveaux et monuments présents sur les concessions funéraires. En effet, remplacer l’expression "travaux de bâtiment" jusqu’alors présente dans les deux textes par celle de "travaux de construction" ouvre nécessairement le champ d’application de ces textes aux travaux dans les cimetières ainsi qu’aux propriétaires de monuments funéraires. Des travaux sur un caveau ou sur un monument peuvent en effet aisément être qualifiés de travaux de construction.
 
8 - Caveau et monument funéraire
 
Est-il possible de considérer que le caveau et le monument funéraire sont deux ouvrages indépendants ? Il semblerait que puisque ces deux éléments sont totalement indépendants l’un de l’autre, l’obligation issue de l’ordonnance doit s’appliquer aux deux.
 
Damien Dutrieux,
consultant au CRIDON Nord-Est, maître de conférences associé à l’Université de Lille 2.

Instances fédérales nationales et internationales :

FNF - Fédération Nationale du Funéraire FFPF - Fédération Française des Pompes Funèbres UPPFP - Union du Pôle Funéraire Public CSNAF - Chambre Syndicale Nationale de l'Art Funéraire UGCF - Union des Gestionnaires de Crématoriums Français FFC - Fédération Française de Crémation EFFS - European Federation or Funeral Services FIAT-IFTA - Fédération Internationale des Associations de Thanatoloques - International Federation of Thanatologists Associations