Les communes sont souvent sollicitées pour délivrer des informations sur les personnes titulaires ou inhumées dans les concessions présentes dans le cimetière communal. Or, quel que soit le but de la demande (recherches généalogiques, volonté d'utiliser la sépulture), la commune est limitée dans les informations susceptibles d'être délivrées selon l'auteur de la demande.
Question posée
Un usager a fait une demande à une commune pour obtenir copies du contrat initial d'achat d'une concession trentenaire, puis des renouvellements de cette concession dans le cadre de ses recherches généalogiques. Devant le refus, il a saisi la CADA. La commune s'interroge sur les règles de communication des contrats de concession à des descendants du fondateur de la concession.
Réponse apportée
La communication est de droit si le demandeur est ayant droit de toutes les personnes (fondateur et celles qui ont renouvelé) de la concession.
Un document communicable à l'indivisaire
En effet, il est possible de rappeler qu'il résulte du régime juridique applicable aux concessions funéraires fixé par l'art. L. 2223-13 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) – selon lequel la concession se transmet à l'ensemble des enfants du fondateur de la sépulture ou successeurs sous la forme d'une indivision perpétuelle – que les documents se rapportant à la gestion de concessions funéraires, qui ont le caractère de documents administratifs dès lors qu'il s'agit de contrats portant occupation de dépendances du cimetière communal, sont communicables à chaque indivisaire (CADA, 16 juillet 2009 : avis n° 2009-2364).
Il a été précisé que les proches ainsi que les ayants droit ont accès aux informations concernant le défunt, à condition, d'une part, qu'ils justifient de leur qualité, au besoin en produisant des actes d'état civil, et, d'autre part, que l'intéressé ne se soit pas opposé à cette communication de son vivant. La Commission en déduit, en l'espèce, qu'un tiers n'est en droit, sur le fondement du II de l'art. 6 de la loi du 17 juillet 1978, d'obtenir communication de la liste des personnes inhumées détenue par la commune, à supposer qu'elle existe sous la forme indiquée, qu'en tant qu'elle porte sur des personnes à l'égard desquelles il peut se prévaloir de la qualité d'ayant droit, c'est-à-dire de successeur légal ou testamentaire, ou de proche parent – ce qu'il appartient à la commune de vérifier. Les noms des autres personnes mentionnées sur cette liste devront faire l'objet d'une occultation préalable (CADA 25 janvier 2007 : conseil n° 2007-0239 ; voir également CADA 2 décembre 2010 : conseil n° 2010-4632, reproduit en annexe, qui évoque l'hypothèse où l'acte de concession a été pris sous la forme d'un arrêté).
Un document relatif à la vie privée
Toutefois, le demandeur ne peut être un tiers puisque la Commission d'accès aux documents administratifs a, notamment, examiné, dans sa séance du 13 septembre 2001, une demande (pour laquelle elle a émis un avis défavorable) à la suite du refus opposé à votre demande de communication du registre des concessions funéraires. La Commission a considéré que les informations contenues dans ce registre relèvent de la vie privée des concessionnaires, et que, dès lors, leur communication aux tiers doit être refusée sur le fondement du paragraphe II de l'art. 6 de la loi du 17 juillet 1978, modifiée par celle du 12 avril 2000 (CADA, 13 septembre 2001 : avis n° 2001-3436).
Distinction entre titulaire de la concession et personnes inhumées
Néanmoins, si l'ayant droit d'une concession peut obtenir la communication de la liste des personnes inhumées dans cette concession, les informations concernant toutes les personnes inhumées ne lui sont communicables que pour autant qu'il peut être regardé comme l'ayant droit de ces dernières, et sous réserve qu'elles ne s'y soient pas opposées de leur vivant. Les informations concernant les personnes dont il n'est pas l'ayant droit ne peuvent lui être communiquées que si elles figurent dans des documents librement communicables en vertu de l'art. L. 213-2 du Code du patrimoine, en particulier à l'expiration du délai de cinquante ans mentionné au 3° du I de cet art., ou s'il obtient une dérogation sur le fondement de l'art. L. 213-3 du même Code (CADA, 5 novembre 2009 : avis n° 2009-3395).
Document librement consultable après cinquante ans
Dès lors qu'un "titre" de concession a plus de cinquante ans, ce document devient librement consultable en application de l'art. L. 213-2 du Code du patrimoine. Ceci signifie que toute personne peut venir le consulter et en prendre intégralement connaissance quel que soit son contenu et quelle que soit la situation de cette personne par rapport au(x) titulaire(s) de la concession, sans que ces derniers doivent en être avertis (CADA, 8 mars 2007, conseil n° 2007-0674).
S'agissant des autres documents que pourraient contenir des "dossiers" de concession, il convient de déterminer, en fonction de la nature et du contenu de chacun d'eux, à partir de quelle date il est ou sera librement consultable en application des articles L. 213-1 et L. 213-2 du Code du patrimoine. Une fois cette date atteinte, le document devient librement consultable dans les conditions mentionnées pour les titres de concession (CADA, 8 mars 2007, précitée).
Toutefois, les procès-verbaux de reprise des concessions perpétuelles en état d'abandon ont été jugés comme des documents non communicables (CADA, 9 juin 2005 : avis n° 2005-2178).
Damien Dutrieux,
consultant au CRIDON Nord-Est, maître de conférences associé à l'Université de Lille 2.
Nota :
Pour aller plus loin : http://www.cada.fr/
Précision terminologique : la différence entre avis et conseil dépend de la personne qui a saisi la Commission ; la Commission rend des avis quand elle est saisie d'un refus de communication, et délivre des conseils aux administrations qui l'interrogent.
Annexe CADA, 2 décembre 2010 : conseil n° 2010-4632 La Commission d'accès aux documents administratifs a examiné dans sa séance du 2 décembre 2010 votre demande de conseil relative à la communication à M. B. et Mlle B. des documents suivants concernant une concession à perpétuité dans le cimetière communal qui aurait été attribuée en 1912 à M. B., leur grand-père, puis revendue par la commune en 1977 : La Commission vous rappelle, ainsi qu'elle l'a fait lors d'un précédent conseil référencé sous le n° 2010-4314-VH émis lors de sa séance du 4 novembre dernier, que les documents se rapportant aux concessions funéraires, régies par les dispositions des articles L. 2223-1 et suivants et R. 2223-1 du CGCT, ont le caractère de documents administratifs. En effet, selon une jurisprudence constante du Conseil d'État, ces concessions, qui emportent occupation des dépendances du domaine public communal, constituent des contrats administratifs (CE, Ass., 21 octobre 1955, Demoiselle Méline). La Commission considère toutefois que, eu égard aux informations qu'elle comporte, une concession funéraire constitue un document dont la communication porterait atteinte au secret de la vie privée au sens des dispositions du II de l'art. 6 de la loi du 17 juillet 1978. Par suite, il n'est communicable qu'aux personnes intéressées, au nombre desquelles figurent le titulaire de la concession et, s'ils justifient d'un motif légitime pour obtenir une telle communication, les ayants droit et les membres de la famille proche des personnes inhumées, à condition qu'ils justifient de leur qualité et que le défunt ne s'y soit pas opposé de son vivant. Il en va cependant différemment lorsque la concession a été accordée par un arrêté municipal, en application de l'art. L. 2121-26 du CGCT, qui dispose que toute personne peut demander communication dans leur intégralité des délibérations et procès-verbaux du conseil municipal, des arrêtés municipaux, ainsi que des budgets et comptes de la commune. La Commission considère ensuite que les documents visés aux points 5) à 7) sont entièrement communicables aux demandeurs en application de l'art. L. 2121-26 du CGCT, dans l'hypothèse où la concession en cause aurait été accordée par arrêté municipal, et, dans le cas contraire, sous réserve qu'ils justifient de leur qualité d'ayants droit et de la consistance des droits qu'ils entendent faire valoir, en application des dispositions du II de l'art. 6 de la loi de 1978. S'agissant du document visé au point 8), il leur est communicable sous réserve qu'ils justifient de leur qualité d'ayants droit de la personne exhumée, en application des mêmes dispositions. Enfin, la Commission estime que le document visé au point 9) leur est également entièrement communicable s'il a été pris sous la forme d'un arrêté, et notamment dans l'hypothèse où cet arrêté serait celui en date du 29 mars 1977 qui a fait l'objet de votre précédente demande de conseil. Si tel n'était pas le cas, les dispositions du II de l'art. 6 précité feraient en revanche obstacle à ce qu'un tel document leur soit transmis. |
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