Contrairement à une idée très répandue, les concessions funéraires sont facultatives. Seul le terrain commun s’impose dans le cimetière communal.
Le Code général des collectivités territoriales - CGCT - (art. L. 2223-1) pose le principe d’une obligation pour les communes de posséder un ou plusieurs terrains consacrés à l’inhumation des morts. Ce même Code prévoit d’ailleurs que les dépenses liées à l’entretien du ou des cimetières constituent des dépenses obligatoires pour les communes (art. L. 2321-2).
Deux modes d’inhumation
Dans les cimetières communaux, deux modes d’inhumation sont traditionnellement distingués. Un mode d’inhumation (dit en concession particulière pour laquelle un titre de concession doit nécessairement être établi ; CAA Nantes, 23 mars 2004, n° 01NT01986, Cne Loctudy : "Collectivités-Intercommunalité" 2004, comm. 174, note D. Dutrieux) s’est imposé sociologiquement comme le mode "normal" d’inhumation. L’alinéa premier de l’art. L. 2223-13 du CGCT dispose que "lorsque l’étendue des cimetières le permet, il peut être concédé des terrains aux personnes qui désirent y fonder leur sépulture et celle de leurs enfants ou successeurs" (V. D. Dutrieux, "La délivrance des concessions funéraires et des sépultures dans le cimetière communal", JCP A, 13 octobre 2003, 1933).
Ces sépultures, afin d’éviter que ces terrains ne soient "indisponibles" trop longtemps - et que s’imposent donc à la commune des obligations de monopoliser d’importantes surfaces pour l’inhumation des morts - sont susceptibles d’être reprises
Inhumation en service ordinaire
Toutefois, le "premier" mode est une inhumation en service ordinaire - qui est le seul mode obligatoire pour la commune (CAA Nancy, 27 mars 2003, n° 98NC000275, Lemoine : "Collectivités–Intercommunalité" 2003, comm. 170 obs. D. Dutrieux) - c’est-à-dire dans des terrains (est utilisée l’expression de "terrain commun") mis gratuitement à la disposition des personnes visées par le Code. Ces personnes sont celles décédées sur le territoire de la commune (quel que soit le domicile du défunt), celles qui y sont domiciliées (quel que soit le lieu de leur décès), les personnes qui ont droit à une sépulture de famille dans laquelle une inhumation supplémentaire n’est pas possible, et, les Français de l’étranger inscrits sur la liste électorale de la commune (CGCT, art. L. 2223-3). Cette sépulture connaît une durée limitée, appelée délai de rotation, avec un délai minimal de cinq années (CGCT, art. R. 2223-5). Cette inhumation en service ordinaire constitue, en théorie, le droit commun des inhumations. Il est néanmoins, dans la très grande majorité des cas, limité aux "indigents" et aux personnes non réclamées par leurs familles.
Ces sépultures, afin d’éviter que ces terrains ne soient "indisponibles" trop longtemps - et que s’imposent donc à la commune des obligations de monopoliser d’importantes surfaces pour l’inhumation des morts - sont susceptibles d’être reprises. Cette procédure est ignorée des textes.
Emplacements individuels
Le terrain commun est constitué d’emplacements individuels destinés à accueillir gratuitement les corps pour une durée minimale de cinq années (CGCT, art. R. 2223-5), c’est-à-dire le temps théoriquement nécessaire à la nature pour accomplir son œuvre (V. notamment D. Dutrieux, "Opérations funéraires" : JurisClasseur "Collectivités territoriales", fasc. 717, § 159). Les communes sont en effet tenues de mettre à disposition de tels emplacements au profit des personnes disposant du droit d’être inhumé dans le cimetière communal (CGCT, art. L. 2223-1 et L. 2223-3).
Parce qu’il est le plus souvent utilisé pour l’inhumation des personnes dépourvues de ressources suffisantes, le terrain commun est parfois dénommé en pratique "carré des indigents"(le juge administratif lui-même emploie cette expression ; TA Lille, 11 mars 1999, Kheddache c/ Cne Maubeuge : AJDA 1999, p. 1026, note D. Dutrieux). Il demeure que le terrain commun n’est nullement réservé à ces personnes, mais est susceptible d’accueillir toute personne ayant droit à inhumation dans le cimetière communal (CGCT, art. L. 2223-3 précité). En pratique, il semble d’ailleurs que de plus en plus de familles, bien que disposant de moyens financiers suffisants pour l’acquisition d’une concession, sollicitent une sépulture en terrain commun, la commune ne pouvant la refuser si le défunt fait partie de l’une des catégories visées à cet art. L. 2223-3 du CGCT.
Pas de concession sans titre
Le juge administratif considère qu’une sépulture qui n’a pas donné lieu à la délivrance d’un titre (en raison de l’absence de paiement de la redevance) doit être considérée comme une sépulture en terrain commun (CAA Marseille, 10 mars 2011, n° 09MA00288, Mme Annie Piperno).
Un seul corps peut être inhumé par fosse (sauf, naturellement, en cas d’application des dispositions de l’art.
R. 2213-16 du CGCT, quand plusieurs corps sont admis dans le même cercueil ; c’est-à-dire : les corps de plusieurs enfants mort-nés de la même mère ou d’un ou plusieurs enfants mort-nés et de leur mère également décédée). Les dimensions de la sépulture sont précisément définies dans le Code (CGCT, art. R. 2223-3 et R. 2223-4).
Le minimum du délai de rotation est fixé à cinq années, mais peut être augmenté en fonction de l’avis donné par l’hydrogéologue…
Procédure de reprise
La reprise de ces sépultures (décidée par délibération du conseil municipal qui charge le maire de son exécution) s’opère par un arrêté du maire affiché aux portes de la mairie et du cimetière, et notifié aux membres connus de la famille. Cet arrêté précise : la date de la reprise effective et le délai laissé aux familles pour récupérer les objets déposés sur la sépulture (CE, 29 avr. 1957, Despres : Rec. CE 1957, tables, p. 874). Dans ce délai, la famille peut également décider le transfert du corps dans une autre sépulture ou sa crémation. Interviendra ensuite la reprise matérielle de la sépulture et les restes seront transférés à l’ossuaire ou incinérés.
Il importe de relever que cette procédure de reprise est ignorée du CGCT. Néanmoins, le ministre de l’Intérieur (V. Rép. min. n° 36690, JOAN Q 9 déc. 1990, p. 5094, citée dans H. Popu, "La dépouille mortelle, chose sacrée" : coll. "Logiques juridiques", L’Harmattan 2009, p. 303, note 1001), rappelle les règles ci-dessus décrites sans toutefois mentionner l’origine de l’obligation de prendre un arrêté, obligation née d’une très ancienne jurisprudence pénale (Cass. crim. 3 oct. 1862, Chapuy : Bull. crim. 1862, II, p. 908).
Familles dépourvues de droit sur la sépulture
Les familles ne disposent d’aucun droit sur les terrains mis à leur disposition (V. Rép. min. n° 36688, JOAN Q 21 sept. 1992, p. 4372, citée par H. Popu, ouvrage précité, p. 302, note 999), qui seront repris par la commune pour d’autres inhumations, à l’issue d’un délai de rotation. Le minimum du délai de rotation est fixé à cinq années, mais peut être augmenté en fonction de l’avis donné par l’hydrogéologue lors de la création du cimetière, ou si, lors de l’ouverture de la fosse, le corps est trouvé intact.
Tout particulier peut cependant, sans autorisation, "faire placer sur la fosse d’un parent ou d’un ami une pierre sépulcrale ou autre signe indicatif de sépulture"(CGCT, art. L. 2223-12).
Damien Dutrieux,
consultant au CRIDON Nord-Est, maître de conférences associé à l’Université de Lille 2.
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