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Évolutions législatives, jurisprudentielles et doctrinales d’octobre 2023.
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Enfant né sans vie à l’hôpital – devoir d’information et respect obligatoire du délai de dix jours pour procéder aux funérailles

Mme B. a accouché le 7 août 2013 au Centre Hospitalier (CH) départemental d’un enfant sans vie. Le 13 août 2013, le centre hospitalier a organisé la crémation du corps de l’enfant au centre de crémation de la commune. Mme B... a adressé au centre hospitalier une réclamation tendant à l’indemnisation du préjudice moral qu’elle estimait avoir subi du fait de la faute commise par le centre hospitalier dans la prise en charge du corps de son enfant.

Elle reprochait à l’établissement, d’une part, de ne pas l’avoir informée du délai dont elle disposait pour réclamer le corps de son enfant afin de procéder elle-même à ses obsèques et, d’autre part, d’avoir procédé à sa crémation avant l’expiration de ce délai. Elle a demandé au tribunal administratif de condamner le CH à lui verser la somme de 50 000 € en réparation des préjudices qu’elle estime avoir subis.

Le tribunal administratif puis la cour administrative d’appel de Nantes ayant rejeté sa demande, Mme B… s’est alors adressée au Conseil d’État. Les premiers juges avaient retenu que Mme B... et son conjoint avaient donné dès le 8 août leur accord pour que le centre hospitalier prenne en charge le corps de l’enfant et, d’autre part, qu’aucun texte ne prévoyait l’obligation de leur délivrer une information sur la procédure.

Le Conseil d’État précise la portée des obligations qui incombent au CH à la lecture des articles R. 1112-75 et R. 1112-76 du Code de la santé publique.

Selon le 1er texte "La famille ou, à défaut, les proches disposent d’un délai de dix jours pour réclamer le corps de la personne décédée dans l’établissement. La mère ou le père dispose, à compter de l’accouchement, du même délai pour réclamer le corps de l’enfant pouvant être déclaré sans vie à l’état civil".

Aux termes du 2nd texte : "I.- Dans le cas où le corps du défunt ou de l’enfant pouvant être déclaré sans vie à l’état civil est réclamé, il est remis sans délai aux personnes visées à l’article R. 1112-75./ II.- En cas de non-réclamation du corps dans le délai de dix jours mentionné à l’article R. 1112-75, l’établissement dispose de deux jours francs : [...] 2° Pour prendre les mesures en vue de procéder, à sa charge, à la crémation du corps de l’enfant pouvant être déclaré sans vie à l’état civil ou, lorsqu’une convention avec la commune le prévoit, en vue de son inhumation par celle-ci."

Pour le Conseil d’État, Il résulte de leur lecture que les parents d’un enfant pouvant être déclaré sans vie à l’état civil disposent d’un délai de dix jours pour faire le choix de réclamer le corps de cet enfant. Pour l’application de ces dispositions, l’établissement de santé est tenu, d’une part, de conserver le corps de l’enfant pendant la totalité de cette durée, y compris lorsque le père et la mère ont exprimé avant son terme leur accord pour confier au CH le soin de procéder aux opérations funéraires.

D’autre part et surtout, le CH doit délivrer aux parents une information complète et appropriée leur permettant d’exercer dans le délai qui leur est imparti le choix qui leur appartient. À ce titre, il doit porter à leur connaissance l’existence de ce délai et les conditions dans lesquelles le corps sera pris en charge s’ils ne le réclament pas.

Pour le Conseil d’État, dans le cas de Mme B… et contrairement à l’opinion des premiers juges, il résulte du dossier que le CH n’a pas délivré l’information suffisante et qu’il a procédé à la crémation du corps de son enfant sans attendre l’expiration du délai de dix jours. Par suite, le centre hospitalier a commis des fautes dans l’organisation du service de nature à engager sa responsabilité.

On doit souligner que la circonstance que les parents ont signé un formulaire, lors de leur sortie de la maternité le lendemain de l’accouchement, qui ferait apparaître, selon le CH, leur intention de lui confier le soin de procéder aux opérations funéraires est à cet égard, pour le juge, sans incidence.

En conclusion, le CH doit en toutes circonstances non seulement donner l’information appropriée mais respecter strictement le délai de 10 jours permettant donc aux parents, le cas échéant, de changer d’avis. En raison des fautes commises, Mme B... et son époux n’ont pas été mis en mesure d’exercer, de façon éclairée, le droit qui était le leur d’organiser eux-mêmes les funérailles de leur enfant. Le Conseil d’État alloue aux parents une indemnité au titre de leur du préjudice moral de 4 000 €.

À retenir 

Lorsqu’un enfant naît sans vie à l’hôpital, l’établissement doit assurer une information complète aux parents sur les modalités de prise en charge du corps et des funérailles et en toute hypothèse attendre l’expiration du délai de 10 jours avant leur mise en œuvre éventuelle.

 
Source : CE, 29 sept. 2023, n° 468220 : Lebon
 
Me Philippe Nugue

Résonance n° 197 - Novembre 2023

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