Inscription figurant sur une tombe : le maire a-t-il un pouvoir d’arbitrage, ou comment un conflit peut-il être juridiquement tranché.
La question
Je suis titulaire avec mon ex-épouse d’une concession funéraire qui m’a été transmise aux termes d’une donation. Depuis mon divorce, j’entretiens de mauvaises relations avec mon fils. À la mort de mon ex-épouse, ce dernier a fait inscrire sur le caveau le nom de sa défunte mère.
Puis-je demander au maire de procéder à la suppression de cette inscription ?
La réponse
À titre liminaire, une concession funéraire est un emplacement dans un cimetière qui permet de s’y faire inhumer seul ou avec des membres de sa famille ou toute autre personne désignée par le titulaire de la concession. Au décès du ou des titulaires, les concessions sont transmises sous forme d’indivision perpétuelle entre les héritiers. À ce titre, le titulaire de la concession, aussi appelé le concessionnaire, jouit de prérogatives qui lui sont propres.
Le concessionnaire ou fondateur reste le régulateur absolu du droit d’inhumation dans la concession. Il détermine librement qui peut être inhumé dans la concession de famille et aucun successeur, parent ou allié n’a de droit acquis si le fondateur s’y oppose. En l’espèce, l’ex-épouse qui est également titulaire de la concession dispose du droit d’inscrire son nom sur le monument funéraire. Cette inscription peut intervenir avant ou après son inhumation.
L’héritier d’une concession funéraire peut procéder à son inscription qui sera nécessairement et préalablement soumise à l’approbation du maire (art. R. 2223-8 du Code Général des Collectivités Territoriales – CGCT). Le maire n’exerce qu’un contrôle de légalité en sa qualité d’autorité de police spéciale des funérailles (articles L. 2213-7 à L. 2213-15 du CGCT) et ne peut s’opposer à ce droit qui est attaché à la personne du concessionnaire.
En matière d’inscription sur les monuments funéraires par les héritiers concessionnaires, les textes législatifs n’apportent aucune réponse sur ce point. Il faut s’en référer à la jurisprudence.
La Cour de cassation, dans un arrêt du 12 janvier 2011, a considéré que les héritiers qui ne portent pas le même nom de famille que le fondateur de la concession ne peuvent pas faire inscrire leur nom sur le caveau familial tant que l’inhumation d’une personne portant leur nom n’est pas intervenue.
Voir en ce sens : Cass. 1re civ, 12 janvier 2011 n° 09-17.373. Pour un commentaire de cet arrêt : Damien Dutrieux, "Qui peut inscrire un nom sur un monument funéraire" ? Résonance funéraire, 21 mars 2011. En présence d’un litige entre les héritiers concessionnaires portant sur une inscription tombale, il n’appartient pas au maire de les "départager" (RM JO Sénat du 05/09/2019 – page 4522).
Les héritiers devront saisir le tribunal judiciaire qui "connaît des contestations sur les conditions des funérailles" (art. R. 211-3-1 du Code de l’organisation judiciaire). Sur le sujet : Xavier Anonin, "Réforme de la procédure civile et funéraire : ce qui a changé", Résonance funéraire, 25 septembre 2021.
Anthony Peitavy
Élève-avocat à l’École des avocats de Formation des Avocats Centre Sud (EFACS)
Transmis par Me Jean-Philippe Borel
Docteur en droit
Avocat au barreau d’Avignon
Résonance n° 187 - Janvier 2023
Résonance n° 187 - Janvier 2023
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