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Notre rédaction est souvent sollicitée par ses lecteurs dans le cadre de questions portant sur le refus d’exhumation prononcée par un maire, des obstacles survenant en cours de procédure ou, pire, pendant l’opération elle-même. Quelques rappels…


La réalisation d’une opération d’exhumation nécessite en premier lieu une demande du (ou des) plus proche(s) parents, mais également l’autorisation du concessionnaire qui peut ne pas être un des plus proches parents demandeurs à l’exhumation. C’est ainsi que, bien que susceptible d’être autorisée par le maire, l’opération pourrait s’avérer impossible à réaliser si le concessionnaire ou ses ayants droit devaient refuser de donner leur autorisation pour ouvrir la concession(1). 

Enfin, une opération d’exhumation ne pourra pas être entreprise si, en dépit de l’obtention de toutes les autorisations nécessaires, un corps dépourvu d’autorisation d’exhumation nécessite d’être exhumé pour pouvoir accéder au corps visé.

Qu’est-ce qu’une exhumation ?

• L’exhumation stricto sensu
Le mot exhumation (ex = hors de ; humus = terre) désigne l’action de retirer un corps (ou une urne) d’un caveau ou d’une fosse où il avait été préalablement inhumé.
• Les opérations soumises au régime de l’exhumation
Par extension, notre droit funéraire assimile à l’exhumation plusieurs opérations en leur appliquant le même régime. Il s’agit de la réunion de corps(2) (contrairement à la réduction de corps dans une même sépulture(3)), de la sortie d’une urne d’une case de columbarium, ou encore du descellement d’une urne d’un monument funéraire.
• Les règles générales
Elles sont posées aux articles R. 2213-40 et suivants du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) : "L’autorisation d’exhumer un corps est délivrée par le maire de la commune où doit avoir lieu l’exhumation."

Les conditions relatives au demandeur

Aux termes de l’art. R. 2213-40 al. 1 : "Toute demande d’exhumation est faite par le plus proche parent de la personne défunte. Celui-ci justifie de son état civil, de son domicile et de la qualité en vertu de laquelle il formule sa demande." Cependant, la notion de "plus proche parent" n’est pas définie par le texte.

"À titre indicatif", l’on peut se référer à l’Instruction Générale Relative à l’État Civil (IGREC) du 11 mai 1999 (§ 426-7), qui dispose que, "sous réserve de l’appréciation de tribunaux, en cas de conflit, l’ordre suivant peut être retenu pour la détermination du plus proche parent :
(1) le conjoint non séparé (veuf, veuve),
(2) les enfants du défunt,
(3) les parents (père et mère),
(4) les frères et sœurs."

La situation se complique lorsque plusieurs personnes se situent au même degré (plusieurs enfants, plusieurs frères et sœurs, par exemple). La jurisprudence apporte néanmoins quelques précisions bien qu’elles demeurent encore insuffisantes. En premier lieu, l’Administration (maire) doit s’assurer de la réalité du lien familial dont se prévaut le demandeur à l’exhumation (par la production, par exemple, de livrets de famille, d’actes de décès ou de naissance). En second lieu, il appartiendra au demandeur d’attester sur l’honneur que le défunt n’a aucun autre parent venant au même degré, et le cas échéant attester sur l’honneur qu’aucun des autres parents n’est susceptible de s’opposer à l’exhumation.

Enfin, l’Administration n’a pas à vérifier l’exactitude de cette attestation. En revanche, si elle a connaissance d’un différend familial portant sur le projet d’exhumation, celle-ci doit surseoir à délivrer l’autorisation en attendant que l’autorité judiciaire se prononce(4). Dans la pratique, afin d’éviter tout risque contentieux, certaines communes imposent des exigences probatoires importantes pour s’assurer de l’absence d’autre plus proche parent au même degré, ou exigent a minima leur accord.

Les conditions relatives au corps

Aux termes de l’art. R. 2213-41 al. 1 : pour des raisons sanitaires évidentes, "l’exhumation du corps d’une personne atteinte, au moment du décès, de l’une des infections transmissibles […] ne peut être autorisée qu’après l’expiration d’un délai d’un an à compter de la date du décès". En outre, aux termes des alinéas 7 et 8 de l’art. R. 2213-42 : "Lorsque le cercueil est trouvé en bon état de conservation au moment de l’exhumation, il ne peut être ouvert que s’il s’est écoulé cinq ans depuis le décès" et "lorsque le cercueil est trouvé détérioré, le corps est placé dans un autre cercueil ou dans une boîte à ossements".

Le déroulement et la surveillance des opérations d’exhumation

Les articles R. 2213-40 et suivants du CGCT apportent quelques précisions quant au déroulement de l’opération d’exhumation. Compte tenu de sa spécificité, l’exhumation d’un corps nécessite de prendre diverses dispositions destinées à renforcer la protection de l’ordre public :
- Obligation de présence d’un membre de la famille ou d’un mandataire (art. R. 2213-40 al. 3) qui peut, le cas échéant, être un représentant de l’opérateur funéraire, à peine d’annulation de l’opération (art. R. 2213-40 al. 4) ;
- Obligation de réaliser l’opération en dehors des heures d’ouverture du cimetière ou dans une partie du cimetière fermée au public pour l’occasion (art. R. 2213-42 al. 1). Dans la pratique, il est parfois utilisé des dispositifs occultants ;
- Obligation de réinhumer le corps immédiatement s’il a vocation à être réinhumé dans le même cimetière (art. R. 2213-4 al. 2) ou de le transporter immédiatement en vue de sa réinhumation lorsque celle-ci a lieu dans un autre cimetière (art. R. 2213-4 al. 3) ;
- Obligation pour les personnes procédant à l’exhumation de porter un costume spécial qui sera désinfecté à la fin de l’opération, ainsi que leurs chaussures. De plus, ces personnes seront tenues à une obligation de désinfection des mains et de la face (art. R. 2213-4 al. 4).

S’agissant de la surveillance des exhumations, depuis 2015, la présence d’un fonctionnaire de police n’est plus requise. L’opération d’exhumation ne donne donc plus lieu au versement de vacations de police. Seule la présence d’un membre de la famille ou de son mandataire est requise, mais la présence d’un agent municipal (gardien ou conservateur du cimetière) est le plus souvent imposée par les communes.

Sanctions pénales

Aux termes de l’articles R. 2223-66 du CGCT, est puni des peines prévues pour les contraventions de 5e classe (1 500 € d’amende) le fait pour un opérateur funéraire de contrevenir aux règles relatives à la demande d’exhumation, aux délais ainsi qu’aux mesures d’hygiène.

Par ailleurs, ces dispositions ne font pas obstacle à celles de l’art. 225-17 du Code pénal, qui punit d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende l’atteinte à l’intégrité d’un cadavre et la violation de sépulture qui pourraient, le cas échéant, être constituées en cas de manquement grave de la part de l’entreprise funéraire. De même, ces peines se cumulent avec les sanctions administratives prévues à l’art. L. 2223-25 du CGCT, telles que la suspension ou le retrait de l’habilitation.

Enfin, la jurisprudence qualifie de "vol par personne chargée d’une mission de service public" (art. 311-4 du Code pénal) le fait pour les fossoyeurs de s’approprier les objets trouvés par eux à l’occasion d’opérations d’exhumation(5).
 
Xavier Anonin
Docteur en droit
Nota :
Depuis l’importante réforme de la procédure civile intervenue en 2019, le tribunal de grande instance a laissé la place au tribunal judiciaire, qui est désormais compétent pour connaître des litiges en matière d’exhumation.
(1) JOAN, Question n° 98098, 26 juillet 2016 ; Réponse du 13 décembre 2016, JOAN, p. 10385
(2) Cass. civ. 1, 16 juin 2011, n° 10-13.580 ; CAA Douai, 31 mai 2012, n° 11DA00776
(3) Principe posé par le Conseil d’État dans : CE, 11 décembre 1987, Commune de Contes, Rec. p. 413. Si le ministre de l’Intérieur a pu adopter la position contraire dans une Réponse ministérielle n° 5187, publiée au JO Sénat le 14 avril 1994, p. 873, le juge administratif n’a pas changé sa position : TA Dijon, 17 novembre 2009, n° 08/01394
(4) Rép. du ministre de l’Intérieur, JO du 21 février 2006, p. 1903
(5) Cass. crim., 25 octobre 2000, n° 00-82-152


Résonance n° 173 - Septembre 2021

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