La question vaccinale, particulièrement sensible en cette période de crise sanitaire, ne peut qu’inciter à s’intéresser à la question s’agissant des professionnels du funéraire. En effet, dans le cadre de leur activité, ces derniers se trouvent quotidiennement exposés à un risque évident de contamination par divers agents pathogènes. Rappelons-le, la vaccination ne protège pas seulement celui qui la reçoit, mais également ses proches et l’ensemble des personnes avec lesquels il serait amené à être en contact. Si la question de l’obligation de vaccination des professionnels du funéraire est heureusement prévue, force est de constater que son encadrement juridique souffre d’un manque de clarté, mais aussi sans doute de réelles insuffisances en cette période de pandémie.
En matière funéraire, la nécessité vaccinale découle au premier chef du risque lié au contact avec les défunts et à la fréquentation des lieux de dépôt de ces derniers (chambres funéraires et mortuaires), mais également de la fréquentation de lieux où séjournent des personnes fragiles susceptibles d’être plus facilement contaminées (hôpitaux, cliniques, EHPAD).
C’est ainsi qu’en vertu de textes généraux, mais également de textes visant explicitement les professionnels du funéraire, il existe une réelle obligation vaccinale à l’égard de ces derniers.
La vaccination contre l’hépatite B, la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite
L’art. L. 3111-4 du Code de la santé publique dispose "qu’une personne qui, dans un établissement ou organisme public ou privé de prévention de soins ou hébergeant des personnes âgées, exerce une activité professionnelle l’exposant ou exposant les personnes dont elle est chargée à des risques de contamination doit être immunisée contre l’hépatite B, la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite et la grippe".
Bien que ne visant pas explicitement les professionnels du funéraire, ce texte vise néanmoins les établissements dans lesquels ceux-ci interviennent couramment, tels que les hôpitaux, les cliniques ou les EHPAD. Ainsi, il en découle de façon évidente qu’il pèse sur l’ensemble du personnel funéraire opérationnel, mais aussi commercial susceptible de s’y rendre, même pour des questions administratives, une obligation d’immunisation contre l’hépatite B, la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite (l’obligation d’immunisation contre la grippe ayant été suspendue par le décret n° 2006-1260 du 14 octobre 2006).
Ce texte général se trouve complété par l’arrêté du 15 mars 1991 "fixant la liste des établissements ou organismes publics ou privés de prévention ou de soins dans lesquels le personnel exposé doit être vacciné". Dans sa version en vigueur, issue de l’arrêté du 29 mars 2005, ce texte dispose en effet :
• Art. 1er : "Toute personne exposée à des risques de contamination doit être immunisée contre l’hépatite B, la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite lorsqu’elle exerce une activité professionnelle dans les catégories suivantes d’établissements ou d’organismes publics ou privés de prévention ou de soins : […] établissements relevant de la loi hospitalière […] ; établissements d’hébergement pour personnes âgées ; services sanitaires de maintien à domicile […]."
• Art. 2 : "Sont assimilés aux établissements et organismes mentionnés à l’article précédent, dans la mesure où ils participent à l’activité de ces derniers […] : les entreprises de pompes funèbres ; les entreprises de transport de corps avant mise en bière."
Vaccination ou immunisation ?
Si la vaccination a pour objectif l’immunisation du sujet contre la maladie visée par le vaccin, l’immunisation contre certaines maladies peut également avoir été acquise par la contraction de la maladie elle-même, que cette dernière ait été ou non symptomatique. S’agissant en particulier de l’hépatite B, de multiples schémas vaccinaux se sont succédé au cours des dernières décennies, et certains de ses vaccins ont pu, en leur temps, soulever de vives polémiques quant à leurs dangers potentiels. C’est ainsi qu’afin d’éviter d’éventuelles vaccinations inutiles, voire dangereuses, l’arrêté du 2 août 2013 fixe "les conditions d’immunisation des personnes mentionnées à l’art. L. 3111-4 du Code de la santé publique" :
Preuve de l’immunisation contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite.
L’art. 3 alinéa 1 de l’arrêté du 2 août 2013 dispose que cette dernière "est apportée par la présentation d’une attestation médicale de vaccination précisant la dénomination des spécialités vaccinales utilisées, les numéros de lots ainsi que les doses et les dates des injections".
- Preuve de l’immunisation contre l’hépatite B
S’agissant de l’hépatite B, l’annexe 1 de l’arrêté susvisé dispose que les personnes soumises à une obligation d’immunisation "sont considérées comme immunisées contre l’hépatite B si elles produisent une attestation médicale comportant un résultat, même ancien, indiquant la présence, dans le sérum, d’anticorps anti-HBs à une concentration supérieure à 100 UI/l".
Dans le cas contraire, il conviendra de poursuivre les investigations par des dosages d’anticorps plus poussés et par un examen du schéma vaccinal subi par la personne au cours de sa vie. Dans certains cas, une nouvelle vaccination pourra être requise(1).
- Les obligations de l’employeur
La convention collective nationale des pompes funèbres indique, de façon brève, dans son art. 211 relatif à "l’embauchage", que : "Conformément aux dispositions légales, les salariés exposés à des risques de contamination doivent se soumettre aux vaccinations obligatoires et respecter les mesures de protection, et notamment celles concernant la vaccination."
Ainsi, s’il incombe au salarié de se soumettre aux vaccinations obligatoires, il incombe également à l’employeur de s’en assurer, au risque d’engager sa responsabilité, ainsi qu’il en découle notamment des articles L. 4121-1 à L. 4121-5 du Code du travail.
Un contrôle des obligations vaccinales renforcé pour les thanatopracteurs
S’agissant de la formation pratique, de l’embauche et de l’emploi d’un thanatopracteur, le respect de l’obligation vaccinale relative à l’hépatite B est également contrôlé par l’autorité préfectorale et le médecin du travail, ainsi qu’en dispose l’art. L. 3111-4-1 du Code de la santé publique : "Les thanatopracteurs en formation pratique et en exercice doivent, en l’absence d’infection en cours ou antérieure, être vaccinés contre l’hépatite B. La preuve de la vaccination ou de la contre-indication est jointe à l’inscription en formation ou à la demande d’habilitation à exercer […]. Le médecin du travail s’assure que les thanatopracteurs salariés vérifient les conditions mentionnées à la première phrase."
La vaccination des professionnels du funéraire contre le SARS-CoV-2
En la matière, force est hélas de constater que les professionnels du funéraire sont une fois encore les grands oubliés des nombreux dispositifs mis en place dans le cadre de la crise sanitaire. En effet, l’accès au vaccin se déploie progressivement en donnant la priorité aux personnes les plus vulnérables. C’est ainsi que la priorité a été donnée, à juste titre, aux résidents des EHPAD et aux personnes les plus âgées et/ou les plus vulnérables. Mais priorité a également été donnée aux professionnels exposés âgés de plus de 50 ans (personnels des EHPAD, professionnels de santé, ambulanciers, aides à domicile et pompiers).
Dans ces conditions, on ne peut que déplorer que les professionnels du funéraire, et en particulier ceux âgés de plus de 50 ans, ne figurent pas sur cette liste. Il n’est en effet plus à démontrer que le personnel funéraire est particulièrement exposé dans le cadre de son activité qui, ne l’oublions pas, a un caractère de service public. Par ailleurs, rappelons que les salariés du secteur funéraire âgés de plus de 50 ans représentent, à eux seuls, environ de 37 % des effectifs !
Nota :
(1) Pour le détail de la procédure de recherche d'immunisation, il conviendra de se reporter aux annexes I et II de l'arrêté du 2 août 2013 fixant les conditions d’immunisation des personnes mentionnées à l’art. L. 3111-4 du Code de la santé publique, NOR : AFSP1320695A, JORF n° 0187 du 13 août 2013.
Nota :
(1) Pour le détail de la procédure de recherche d'immunisation, il conviendra de se reporter aux annexes I et II de l'arrêté du 2 août 2013 fixant les conditions d’immunisation des personnes mentionnées à l’art. L. 3111-4 du Code de la santé publique, NOR : AFSP1320695A, JORF n° 0187 du 13 août 2013.
Xavier Anonin
Docteur en droit
Résonance n° 169 - Avril 2021
Résonance n° 169 - Avril 2021
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