La question peut sembler saugrenue car, indubitablement, l’exercice du pouvoir de police pour ces opérations, comme pour d’autres d’ailleurs, ne peut relever que de l’autorité de police, c’est-à-dire du maire. Néanmoins, l’opérateur funéraire chargé de l’exhumation n’est pas dégagé de toutes responsabilités dans la planification et l’organisation de cette opération. En effet, il s’est contractuellement engagé à réaliser une opération, ici l’exhumation, et naturellement dans des conditions de respect de la réglementation. C’est bien sur ce terrain de l’inexécution du contrat qu’il est poursuivi.
Cour d’appel Douai 9 juillet 2020, n° 19/01012
Une exhumation causée par un mauvais état du cercueil pourtant récent
Les faits étaient les suivants : Mme Viviane D. a sollicité les services des pompes funèbres F. pour la fourniture du cercueil et l’organisation des funérailles de sa fille Betty décédée le 21 décembre 2015 à l’âge de 26 ans. L’inhumation s’est déroulée le 29 décembre 2015 dans le cimetière de Colleret. Environ quinze mois après l’enterrement, Mme Viviane D. s’est plainte auprès de l’entreprise de pompes funèbres de l’état dégradé du cercueil, découvert lors de l’installation d’un monument funéraire.
L’entreprise de pompes funèbres a alors accepté de prendre en charge les frais d’ouverture et de fermeture du caveau, de la fourniture d’un nouveau cercueil et de l’exhumation. Les pompes funèbres F. ont procédé à l’exhumation du corps et à son transfert dans un autre cercueil le 17 mars 2017. Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 1er septembre 2017, le conseil de Mme Viviane D. a sollicité une proposition indemnitaire en indemnisation du préjudice moral subi par sa cliente du fait du mauvais état du cercueil et de la manière indélicate dont se sont déroulées les opérations d’exhumation…
Une exhumation causée par un mauvais état du cercueil pourtant récent
Les faits étaient les suivants : Mme Viviane D. a sollicité les services des pompes funèbres F. pour la fourniture du cercueil et l’organisation des funérailles de sa fille Betty décédée le 21 décembre 2015 à l’âge de 26 ans. L’inhumation s’est déroulée le 29 décembre 2015 dans le cimetière de Colleret. Environ quinze mois après l’enterrement, Mme Viviane D. s’est plainte auprès de l’entreprise de pompes funèbres de l’état dégradé du cercueil, découvert lors de l’installation d’un monument funéraire.
L’entreprise de pompes funèbres a alors accepté de prendre en charge les frais d’ouverture et de fermeture du caveau, de la fourniture d’un nouveau cercueil et de l’exhumation. Les pompes funèbres F. ont procédé à l’exhumation du corps et à son transfert dans un autre cercueil le 17 mars 2017. Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 1er septembre 2017, le conseil de Mme Viviane D. a sollicité une proposition indemnitaire en indemnisation du préjudice moral subi par sa cliente du fait du mauvais état du cercueil et de la manière indélicate dont se sont déroulées les opérations d’exhumation…
Exhumation et fermeture du cimetière
L’art. R. 2213-42 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) dispose désormais (art. 3 décret n° 2016-1253 du 26 septembre 2016 relatif aux opérations funéraires et à la reconnaissance des qualifications professionnelles nécessaires à leur exercice) que : "Les exhumations sont réalisées soit en dehors des heures d’ouverture du cimetière au public, soit, durant ces heures d’ouverture, dans une partie du cimetière fermée au public."
Or, il appert des témoignages que le cimetière n’était pas fermé lors de cette opération, et même d’ailleurs que le cimetière de cette commune n’était jamais fermé. Le juge estime alors que certes cette compétence appartient au maire et non à l’opérateur privé, mais que celui-ci doit s’assurer, avant de procéder à toute exhumation, que le cimetière était bien fermé en tout ou partie, même en cas de présence du maire ou de l’adjoint. Il en déduit alors que : "Le fait d’avoir procédé aux opérations d’exhumation pendant les heures d’ouverture dans une partie du cimetière ouverte au public, sans avoir au préalable demandé au maire de faire fermer une partie du cimetière, constitue un manquement de M. Jacques F. à son obligation contractuelle de moyens de s’assurer du respect des conditions légales prévues pour une exhumation.
Ces obligations légales ont pour but de préserver l’intimité nécessaire au respect du corps humain. Dès lors, en ne s’assurant pas fautivement du respect de la règle de la fermeture au public d’une partie du cimetière, l’entreprise a manqué à son obligation de traiter avec respect, dignité et décence les restes de Mme Betty H. Ce manquement contractuel a nécessairement causé un préjudice moral à Mme Viviane D., mère de la défunte."
Une exhumation respectueuse du défunt, mais nécessairement pénible
À l’aune de ces remarques, il est loisible de rappeler que l’art. L. 16-1-1 du Code civil nous enseigne que : "Le respect dû au corps humain ne cesse pas avec la mort. Les restes des personnes décédées, y compris les cendres de celles dont le corps a donné lieu à crémation, doivent être traités avec respect, dignité et décence."
C’est également sur ce fondement que l’opérateur est explicitement sanctionné par le juge : "Une entreprise de pompes funèbres est ainsi tenue d’une obligation de traiter avec respect, dignité et décence les corps des défunts dont l’inhumation ou l’exhumation lui sont confiées." Il faut donc comprendre que, pour le juge judiciaire, le fait de procéder à une exhumation sans que le cimetière soit fermé constitue un acte irrespectueux caractérisant un manquement au contrat signé avec la famille.
Parallèlement, mais l’on se console comme on peut, fut rejeté le préjudice d’avoir pour la mère assisté à cette exhumation. En effet, le juge relève que cette exhumation doit nécessairement se dérouler en présence d’un membre de la famille ou de son mandataire (art. R. 2213-40 du CGCT). Il est vrai qu’il est attesté que l’opérateur tenta de dissuader la mère d’assister à cette opération pénible. Il y a donc ici un enseignement majeur à tirer : la mise en cause potentielle de la responsabilité de l’opérateur, si la commune ne ferme pas matériellement au moins la partie du cimetière ou l’exhumation se déroule.
L’art. R. 2213-42 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) dispose désormais (art. 3 décret n° 2016-1253 du 26 septembre 2016 relatif aux opérations funéraires et à la reconnaissance des qualifications professionnelles nécessaires à leur exercice) que : "Les exhumations sont réalisées soit en dehors des heures d’ouverture du cimetière au public, soit, durant ces heures d’ouverture, dans une partie du cimetière fermée au public."
Or, il appert des témoignages que le cimetière n’était pas fermé lors de cette opération, et même d’ailleurs que le cimetière de cette commune n’était jamais fermé. Le juge estime alors que certes cette compétence appartient au maire et non à l’opérateur privé, mais que celui-ci doit s’assurer, avant de procéder à toute exhumation, que le cimetière était bien fermé en tout ou partie, même en cas de présence du maire ou de l’adjoint. Il en déduit alors que : "Le fait d’avoir procédé aux opérations d’exhumation pendant les heures d’ouverture dans une partie du cimetière ouverte au public, sans avoir au préalable demandé au maire de faire fermer une partie du cimetière, constitue un manquement de M. Jacques F. à son obligation contractuelle de moyens de s’assurer du respect des conditions légales prévues pour une exhumation.
Ces obligations légales ont pour but de préserver l’intimité nécessaire au respect du corps humain. Dès lors, en ne s’assurant pas fautivement du respect de la règle de la fermeture au public d’une partie du cimetière, l’entreprise a manqué à son obligation de traiter avec respect, dignité et décence les restes de Mme Betty H. Ce manquement contractuel a nécessairement causé un préjudice moral à Mme Viviane D., mère de la défunte."
Une exhumation respectueuse du défunt, mais nécessairement pénible
À l’aune de ces remarques, il est loisible de rappeler que l’art. L. 16-1-1 du Code civil nous enseigne que : "Le respect dû au corps humain ne cesse pas avec la mort. Les restes des personnes décédées, y compris les cendres de celles dont le corps a donné lieu à crémation, doivent être traités avec respect, dignité et décence."
C’est également sur ce fondement que l’opérateur est explicitement sanctionné par le juge : "Une entreprise de pompes funèbres est ainsi tenue d’une obligation de traiter avec respect, dignité et décence les corps des défunts dont l’inhumation ou l’exhumation lui sont confiées." Il faut donc comprendre que, pour le juge judiciaire, le fait de procéder à une exhumation sans que le cimetière soit fermé constitue un acte irrespectueux caractérisant un manquement au contrat signé avec la famille.
Parallèlement, mais l’on se console comme on peut, fut rejeté le préjudice d’avoir pour la mère assisté à cette exhumation. En effet, le juge relève que cette exhumation doit nécessairement se dérouler en présence d’un membre de la famille ou de son mandataire (art. R. 2213-40 du CGCT). Il est vrai qu’il est attesté que l’opérateur tenta de dissuader la mère d’assister à cette opération pénible. Il y a donc ici un enseignement majeur à tirer : la mise en cause potentielle de la responsabilité de l’opérateur, si la commune ne ferme pas matériellement au moins la partie du cimetière ou l’exhumation se déroule.
Philippe Dupuis
Consultant au Cridon, chargé de cours à l’université de Valenciennes, formateur en droit funéraire pour les fonctionnaires territoriaux au sein des délégations du CNFPT
Résonance n°163 - Septembre 2020
Consultant au Cridon, chargé de cours à l’université de Valenciennes, formateur en droit funéraire pour les fonctionnaires territoriaux au sein des délégations du CNFPT
Résonance n°163 - Septembre 2020
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