La polémique après le rejet de la loi sur le congé parental, suite au décès d’un enfant : une opportunité pour améliorer le dispositif des aides au financement des frais d’obsèques.
Le rejet à l’Assemblée nationale d’une proposition de loi octroyant un congé de douze jours en cas de disparition d’un enfant a déclenché une vive polémique chez, notamment, les parlementaires de l’opposition, mais a aussi ébranlé les convictions de membres de LaREM (La République en Marche). Cette décision a été critiquée de toutes parts, y compris par François Ruffin, mais aussi par Emmanuel Macron, en personne, qui a "demandé au gouvernement de faire preuve d’humanité", dans ce dossier. La ministre du Travail s’est engagée "à trouver dans les tout prochains jours les solutions" pour un allongement à douze jours, car, selon ses propos, "face au deuil, il faut du soutien psychologique, et nous allons le renforcer".
Une fois de plus, l’actualité fournit un sujet sensible, celui du décès d’un enfant et les difficultés qu’il engendre chez certaines familles dépourvues des moyens financiers pour assurer la prise en charge des frais d’obsèques. À proprement parler, la polémique sur les douze jours de congé parental passera, ici, au second plan, car ce qui nous intéresse, c’est l’engagement souscrit devant des médias par Adrien Taquet, secrétaire d’État à la Protection de l’enfance, à propos des aides au financement des frais d’obsèques, lors du décès d’un enfant.
Mais, ce qui importe, afin de satisfaire le but assigné à cet article, ce sont ces déclarations et annonces d’Adrien Taquet, lequel sur des médias, dont RMC, au cours d’un entretien avec Jean-Jacques Bourdin, s’est engagé à revoir le dispositif trop disparate, selon lui, et nous partageons cet avis, des aides au financement des frais d’obsèques lors d’un décès d’un enfant. C’est ainsi qu’il a mis l’accent sur l’hétérogénéité des régimes des aides publiques ou privées, et souhaité les unifier.
Le mercredi 5 février, un député de LaREM a réitéré ces propositions devant les caméras de BFM Télé et, curieusement, alors que le débat au plan politique mettait en cause l’amateurisme du gouvernement, le secrétaire général de la CGCT, Philippe Martinez, a fait de l’aide au financement des obsèques d’un enfant son nouveau cheval de bataille, renvoyant, ainsi, au second plan la question des douze jours.
Dans un tel contexte, l’opinion publique a été sensibilisée, outre par la cherté des dépenses afférentes à l’organisation des obsèques d’un enfant, mais plus généralement, par le montant particulièrement élevé de tels débours qui, certes ne sont pas récurrents (selon l’Insee, une personne est concernée dans sa vie au moins deux fois à cette problématique), mais qui ont connu une progression, sans cesse démentie, depuis l’ouverture du marché à la concurrence avec la loi du 8 janvier 1993.
Selon la Cour des comptes : "Depuis les années 1950, entre 500 000 et 550 000 cérémonies d’obsèques ont été organisées chaque année en France. Une tendance à l’augmentation a été amorcée au début des années 2010, liée à l’arrivée des générations du "baby-boom" à des âges de forte mortalité, elle devrait se poursuivre. Elle contribuera à faire perdurer l’expansion du marché du funéraire, dont le chiffre d’affaires global est passé de 1,28 Md€ en 2000 à 2,25 Md€ en 2015, en raison de l’élargissement de l’offre à de nouveaux services et de la progression des tarifs."
Toujours selon l’Insee, ce marché est actuellement estimé à 2,5 milliards d’euros en France. Il est en croissance depuis 15 ans. Certes rapporté au montant du PIB connu en 2018, soit 2 353,1 milliards d’euros, ce chiffre est globalement marginal, mais il constitue, néanmoins, une source de revenus non négligeable pour les acteurs du secteur, d’autant plus qu’avec le vieillissement de la population après le "baby-boom", l’Insee prévoit une progression constante du nombre des décès, qui pourrait atteindre, voire dépasser en 2027, le chiffre de 700 000/an.
Cette situation est de nature à opérer un rappel des dispositions existantes en matière d’aides au financement des frais d’obsèques, car force est d’admettre qu’il existe de nombreuses opportunités afin de recevoir ou bénéficier, consécutivement à un décès, de modalités de paiement relativement pratiques, mais également des aides émanant d’organismes, soit officiels, soit à caractère privé, selon les clauses contenues dans des contrats d’adhésion à des régimes de prévoyance.
Naturellement, s’il existe à cette fin, un contrat "traditionnel" en prévision d’obsèques souscrit auprès d’un organisme d’assurances ou bancaire, immatriculé à l’ORIAS, la question du paiement des frais d’obsèques est résolue par les stipulations du contrat, puisque cette obligation incombe à l’assureur selon les modalités prévues dans le contrat (voir, à cet égard, la circulaire ministérielle, n° 2006-00119 C, du 20 décembre 2006).
À titre liminaire, il sera rappelé que, selon le Code civil, les frais d’obsèques sont analysés comme étant des frais liés à la succession de la personne décédée. L’élément manifeste de cette qualification de charge successorale des frais funéraires se retrouve dans l’existence d’un privilège général sur les meubles institué par l’art. 2331.2° du Code civil. Il s’agit, en pratique, d’une priorité de paiement dont jouit le bénéficiaire du privilège sur la vente des meubles du défunt, donc l’opérateur funéraire.
Il convient de relever la place de ce privilège, qui est situé en deuxième position après les frais de justice. Indéniablement, le droit civil offre au créancier privilégié une quasi-certitude de voir les frais d’obsèques remboursés, dès lors que le défunt laisse un patrimoine composé de meubles dont la valeur couvre largement ces frais, mais, n’apporte aucune garantie afférente à la décharge des frais d’obsèques imputables au débiteur (la famille du défunt).
De la même manière, toujours selon le Code civil, il existe des hypothèses où l’actif successoral n’est pas suffisant pour couvrir les frais funéraires consécutifs à une inhumation décente ; la jurisprudence a donc conféré, à titre subsidiaire, à l’obligation de payer les frais d’obsèques le caractère d’une obligation alimentaire soit, fondée pour les parents, sur l’art. 207, soit pour les enfants, selon les dispositions de l’art. 205 (obligation alimentaire étendue aux frais funéraires).
Plus grave encore
Selon l’arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation en date du 14 mai 1992 (Bull. Civil I, n° 140 p. 95), a été instauré le principe selon lequel : "Lorsque l’actif successoral ne permet pas de faire face aux frais d’obsèques, l’enfant, tenu de l’obligation alimentaire à l’égard de ses ascendants, doit, même s’il a renoncé à la succession, assumer la charge de ces frais, dans la proportion de ses ressources." Il sera noté que, dans cette décision, sont à la fois visés les articles 205 et 371 du Code civil, le premier ayant trait à l’obligation alimentaire, le second disposant que "l’enfant, à tout âge, doit honneur et respect à ses père et mère".
Personnellement, j’ajouterai que, selon le contenu de l’art. 207 du Code civil, même si "les obligations (alimentaires) résultant de ces dispositions sont réciproques", il y est mentionné, en son dernier alinéa, que : "Néanmoins, quand le créancier aura lui-même manqué gravement à ses obligations envers le débiteur, le juge pourra décharger celui-ci de tout ou partie de la dette alimentaire", ce que certains juristes ont qualifié "d’exception d’indignité".
Mais, une nouvelle fois, sauf à mettre en avant l’intérêt de ces dispositions légales pour les créanciers de dettes funéraires, donc les opérateurs funéraires habilités par les préfets, elles n’ont aucun effet pour l’obtention des aides au financement des frais d’obsèques d’un enfant décédé prématurément.
Il résulte de ce qui précède que les frais d’obsèques sont prélevés sur les biens de la succession, sauf si la valeur des biens est insuffisante. La société de pompes funèbres pourra soit poursuivre celui qui a signé le bon de commande, soit attendre que sa facture soit payée par la banque du défunt.
À cet égard, il est utile de rappeler qu’en vertu de l’art. L. 312-1-4 du Code monétaire et financier, la personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles du défunt peut obtenir, sur présentation de la facture des obsèques, le remboursement des frais exposés par un prélèvement sur les comptes du défunt, dans la limite du solde créditeur de ces comptes, tout ou partie des frais funéraires, auprès de sa banque teneuse de ses comptes, ou autoriser l’opérateur funéraire à solliciter le paiement de sa facture, pour un montant maximum désormais fixé à 5 000 €.
Le droit fiscal a progressivement aménagé le régime des déductions dans l’actif successoral du montant d’un montant forfaitaire, actuellement fixé, au maximum, à 1 500 €.
Mais, ce qui importe dans le cadre principal de cet article et la finalité informative auprès des familles en deuil, après la perte d’un enfant, c’est qu’il existe des opportunités pour l’obtention d’aides diverses pour assurer la couverture des frais des obsèques, dans l’attente des nouvelles mesures gouvernementales qui seront soumises, vraisemblablement, au vote du Parlement. Donc, opérer leur inventaire s’inscrit, prioritairement, dans les objectifs assignés à cet article.
Il s’agit des diverses aides qui peuvent êtres mises en place pour les enfants ou le conjoint, telles qu’exposées ci-après :
I. La CPCAM
Ainsi, la Sécurité sociale, dont à titre principal les CPAM, sont susceptibles d’allouer des aides exceptionnelles lors du décès d’un enfant, mais qui ne sont pas systématiques et de surcroît inégalitaires au plan national, car la gestion de ces caisses est décentra-lisée, étant départementale, et, de ce fait, ce sont les conseils d’administration qui décident de mettre en œuvre un dispositif d’aides souvent qualifié de "participation exceptionnelle pour frais d’obsèques", qui n’entrent pas dans leurs obligations légales.
C’est pourquoi, ici, les propos du secrétaire d’État à la Protection de l’enfance, Adrien Taquet, relayés par des parlementaires de LaREM, ou par M. Martinez, secrétaire général de la CGCT, prennent tout leur relief, car, non seulement il a été parfaitement indiqué aux auditeurs et téléspectateurs que ces aides n’étaient pas égalitaires et qu’elles étaient susceptibles de varier, tant selon la localisation géographique du décès, que dans leur montant, hypothèses auxquelles j’ajouterai celle de leur existence même.
À titre informatif, la CPAM des Bouches-du-Rhône, qui avait instauré durant plusieurs années ce dispositif, l’a supprimé depuis plus de quinze ans, aux motifs qu’il ne s’agissait pas d’une mission lui incombant, ayant recentré ses aides ou contributions aux domaines de la santé. D’ailleurs, il suffit de consulter le site AMELI des Bouches-du-Rhône pour se rendre compte que la CPAM 13 n’y fait pas figurer une telle potentialité.
II. Les aides de la Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse (CNAV)
Bien que présentées comme une solution pratique, il suffit de se rapporter à la circulaire 2002/18 du 26 mars 2002, pour mesurer son champ d’application, à savoir.
Objet : Prélèvements des frais d’obsèques sur les sommes dues au décès d’un retraité
En résumé : "Le seuil de prélèvement des frais d’obsèques sur les sommes dues au décès des titulaires de pensions de vieillesse est de 2 286,74 €".
Le seuil de prélèvement des frais d’obsèques sur les sommes dues au décès des titulaires de pensions de vieillesse n’avait fait l’objet d’aucun texte réglementaire adaptant son montant en euros, puisqu’il était exprimé en francs (15 000 francs) ; cf. circulaire CNAV n° 109/88 du 16 septembre 1988. La somme de 2 286,74 € a été obtenue en appliquant les règles de conversion prévues par les règlements communautaires.
Il s’ensuit que les aides de la CNAV sont uniquement destinées au financement des frais d’obsèques des titulaires de pensions de vieillesse et, de ce fait, ne trouvent pas à s’appliquer dans le cas du décès d’un enfant.
III. L’aide d’urgence de la Caisse d’Allocations Familiales (CAF)
La CAF intervient à peu près dans toutes les situations d’urgence, et le décès d’un proche qu’il faut inhumer en est une. Mais, là encore, il existe des inégalités selon les départements, car ces caisses sont indépendantes les unes par rapport aux autres.
À titre d’exemples :
a) Le cas du département de la Seine-Saint-Denis (93) : les aides peuvent atteindre la somme maximum de 2 000 €. Modalités de versement : 700 € automatiquement, et le solde en fonction et selon certaines conditions.
Conditions de l’obtention : il faut avoir un enfant et faire partie des familles très modestes avec un quotient familial en dessous de 584 €. Ce sera une assistante sociale, en liaison avec la CAF, qui se charge de la constitution du dossier.
b) Le cas du département des Yvelines : le montant maximum est abaissé à 1 000 €, alors que le quotient familial doit être inférieur à 2 000 €, élargissant ainsi le cercle des familles susceptibles de bénéficier de cette aide.
c) Dans le département du Loiret : montant maximum 800 €, avec un quotient familial de 1 000 €, sous la condition que l’enfant décédé donnait lieu au versement d’une prestation sociale.
La famille dispose d’un délai de 6 mois pour faire valoir ses droits et, lorsque les parents sont éligibles à cette aide, les 800 € seront versés sur présentation de la facture des obsèques, ou payés directement à l’entreprise ou régie municipale de pompes funèbres.
IV. Les participations inhérentes aux Cartes Bancaires (CB)
Il y a lieu de consulter les conditions générales du contrat ou de contacter la banque qui l’a délivrée. Chaque établissement a mis en œuvre un régime spécifique. Pour certains, ils accordent des participations financières dans les domaines suivants :
Frais de première conservation, de mise en bière, de soins de conservation rendus obligatoires par la législation (en fait, aucune obligation n’est imposée en cas de décès et inhumation ou crémation sur le territoire national), en revanche, en cas de transport à l’étranger ou en fonction de certaines exigences de compagnies aériennes, les soins de thanatopraxie sont alors imposés. Dans ce cas, il conviendra de se rapprocher des consulats des pays non adhérents à la Convention de Berlin ou aux arrangements de Strasbourg, ainsi que des affréteurs intervenant pour le transport des corps à bord d’aéronefs. Ce sera, donc, au cas par cas.
V. Les mutuelles de santé
Ce sont elles qui, selon les garanties souscrites, sont les principaux aidants des familles ayant été confrontées à un deuil. Lors d’un décès, il est vivement recommandé aux familles de se munir de leur carte d’affiliation lorsqu’elles se rendent chez un opérateur funéraire qui sera chargé de l’organisation des obsèques.
Les conseillers funéraires (soit par l’expérience acquise, soit parce qu’ils sont formés désormais à cet effet, selon le décret du 30 avril 2013 et l’arrêté ministériel du même jour, ayant instauré un diplôme national pour les conseillers funéraires – durée de la formation de 140 heures) devront se mettre en rapport avec la mutuelle de santé, afin de connaître le montant de cette participation aux frais funéraires et, bien évidemment, le faire connaître à leurs clients.
À Marseille, la Régie Municipale de Pompes Funèbres avait conclu avec une cinquantaine de mutuelles des conventions de tiers payant mutualiste, si bien que le montant de l’aide était défalqué du montant de la facture et recouvré selon des fréquences de quinze jours environ, directement auprès de la mutuelle partenaire.
Quelques exemples
a) La mutuelle MGEM : montant de la participation forfaitaire, 765 €, payée sur présentation de la facture, pouvant varier à la hausse selon la situation du salarié lors de ce triste évènement.
b) La mutuelle de santé Marseille Métropole Mutame Provence (ex - Mutuelle de Santé de municipaux de Marseille) : le montant de la participation est de l’ordre de 800 €.
c) La Mutuelle de la Police MGP : certainement celle qui contribue le mieux au financement des frais d’obsèques, pour environ 1 000 €/décès.
En fait, pratiquement, toutes les mutuelles apportent des aides au financement des frais d’obsèques. Il suffit, soit pour la famille, soit pour le conseiller funéraire, de se renseigner auprès des agents de l’organisme mutualiste.
VI. L’exonération
Elle résulte de l’art. L. 2223-27 du Code Général des Collectivités Territoriale (CGCT), modifié par la loi no 2008-1350 du 19 décembre 2008, qui énonce : "Le service est gratuit pour les personnes dépourvues de ressources suffisantes. Lorsque la mission de service public définie à l’art. L. 2223-19 n’est pas assurée par la commune, celle-ci prend en charge les frais d’obsèques de ces personnes. Elle choisit l’organisme qui assurera ces obsèques. Le maire fait procéder à la crémation du corps lorsque le défunt en a exprimé la volonté."
- Sur les conditions de l’application de ces dispositions
Question écrite n° 21273 de M. Jacques Maheas (Seine-Saint-Denis – Socialiste), publiée dans le JO Sénat du 19/01/2006 – page 149
M. Jacques Maheas avait attiré l’attention de M. le ministre d’État, ministre de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire, sur la distorsion d’égalité entre les communes qui comptent un hôpital sur leur territoire et celles qui n’en ont pas, au regard de la prise en charge des frais d’obsèques des indigents. Pour lui, selon les termes de l’art. L. 2223-27 du CGCT : "Le service est gratuit pour les personnes dépourvues de ressources suffisantes. Lorsque la mission de service public définie à l’art. L. 2223-19 n’est pas assurée par la commune, celle-ci prend en charge les frais d’obsèques de ces personnes. Elle choisit l’organisme qui assurera ces obsèques."
Et de préciser
"Une prise en charge communale revient au minimum à 1 500 € par personne décédée, mettant à contribution les résidants de la commune, alors qu’aucun lien, autre que celui du lieu de décès, ne rattache l’indigent à ce territoire. De plus, les hôpitaux ne génèrent aucune richesse pour les collectivités locales, puisqu’ils sont exonérés du paiement de la taxe professionnelle. L’application de l’art. L. 2223-27 du CGCT est donc une charge nette pour les communes.
En conséquence, il lui demande quelles mesures le Gouvernement entend mettre en œuvre pour rectifier cette anomalie entre les communes, soit par une prise en charge directe par l’État de ces frais, soit par l’octroi d’une dotation compensatoire aux collectivités locales, ou en substituant la notion de lieu de résidence habituelle à celle de lieu de décès dans le Code susnommé."
Dans sa réponse, le ministère de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire, publiée dans le JO Sénat du 29/06/2006 – page 1782, a apporté les informations suivantes :
"Selon les termes de l’art. L. 2213-7 du CGCT, "le maire ou, à défaut, le représentant de l’État dans le département pourvoit d’urgence à ce que toute personne décédée soit ensevelie et inhumée décemment sans distinction de culte ni de croyance". L’art. L. 2223-27 du Code précité dispose, quant à lui, que : "Le service est gratuit pour les personnes dépourvues de ressources suffisantes. Lorsque la mission de service public définie à l’art. L. 2223-19 n’est pas assurée par la commune, celle-ci prend en charge les frais d’obsèques de ces personnes. Elle choisit l’organisme qui assurera ces obsèques." Il résulte donc de l’ensemble de ces dispositions qu’il appartient à la commune de prendre en charge les frais occasionnés par les obsèques des indigents décédés sur son territoire."
Pour le ministre, au plan financier, l’État participant aux dépenses d’intérêt général des collectivités locales, et en particulier aux charges globales de fonctionnement des communes, à travers la Dotation Globale de Fonctionnement (DGF), dans laquelle a été incluse la subvention à titre de participation de l’État aux dépenses d’intérêt général qui était accordée aux communes, antérieurement à la loi n° 79-3 du 3 janvier 1979, portant création de la DGF, cette aide étatique est de nature à compenser ces obligations légales.
Il résulte de cette réponse que le ministre renvoie la question du financement par les communes de ces frais d’obsèques pour les personnes décédée sur le territoire d’une commune, à l’augmentation de la DGF, allouée annuellement aux communes par l’État.
À noter qu’il est encore fait référence à la notion "d’indigent", alors que, depuis l’instauration du RMI (1er décembre 1988), puis du RSA (le RSA a été mis en place par la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008, généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion), il est considéré qu’en France il n’existe plus réellement d’indigents (la notion d’indigence recouvre l’absence totale de revenus), raison pour laquelle il a été substitué celle de personne dépourvue de ressources suffisantes. En outre, c’est la situation personnelle du défunt qui doit être prise en considération, "intuitu personae", et point celle de sa famille, pourtant débitrice de droit des frais d’obsèques ainsi qu’énoncé supra.
À propos de la question écrite n° 00814 de Mme Marie-Thérèse Hermange (Paris – UMP), publiée dans le JO Sénat du 12/07/2007 – page 1243, et de la réponse apportée Madame la ministre de l’Intérieur, de l’Outre-mer et des Collectivités territoriales publiée dans le JO Sénat du 27/09/2007 – page 1724, la ministre ne fait plus allusion à la DGF en tant que mode de financement de ces charges financières imposées aux communes, mais invoque les dispositions de l’art. L. 2223-22 du CGCT, qui permet aux communes d’instituer des taxes sur les opérations de convoi, d’inhumation et de crémation, qui sont comptabilisées dans le budget général de la commune.
À la suggestion de la parlementaire de faire participer les départements à la prise en charge de ces dépenses, la réponse de la ministre est sans détours : "Le Gouvernement ne souhaite pas davantage que le département finance ces inhumations au titre de fonds sociaux, dès lors qu’il ne lui paraît pas opportun de fragiliser le bloc de compétences que constitue la réglementation funéraire et dont l’exercice est pleinement confié aux communes."
Cette position est contestable, car elle aggrave les inégalités entre les 35 000 communes françaises, environ. En effet, il convient à titre liminaire de préciser que ces taxes sont de nature fiscale et qu’elles s’agrègent aux frais ou redevances pour frais d’obsèques, déjà fortement lourds pour les budgets des familles. Ensuite, seule les communes d’importance au plan démographique sont, en règle générale, en mesure de mettre en œuvre ces taxes, qui sont au nombre de trois :
1) Taxe de convoi ;
2) Taxe d’inhumation ;
3) Taxe de crémation (seules les communes dotées d’un crématorium peuvent les instaurer).
Au surplus, il n’existe aucune obligation faite aux communes de les imposer, étant précisé qu’il revient au conseil municipal d’en arrêter le principe (une, deux ou les trois taxes), et d’en fixer les montants. Dans les grandes villes, comme Paris, Marseille, ces taxes existent, et leurs montants sont conséquents. Elles contribuent à renchérir le prix des obsèques, déjà considéré comme important.
En conclusion, nous sommes particulièrement favorables à l’instauration d’une aide financière substantielle de l’État allouée aux familles endeuillées après la perte d’un enfant, en vue de participer au financement des obsèques, tout en espérant qu’elle soit à la hauteur des enjeux moraux, affectifs, et matériels, mais aussi égalitaires, donc de même niveau, et atteigne un montant décent, soit de l’ordre au minimum de 2 000 €, ainsi que semblent le vouloir les acteurs étatiques et les partenaires associatifs ou sociaux, dont les syndicats.
Une mesure solidaire, juste et sociale qui, sans apaiser les conséquences affectives consécutives à la perte d’un enfant, améliorera la prise en charge des familles et les accompagnera dans les méandres des tarifs funéraires, trop méconnus et malheureusement souvent imprévisibles.
Jean-Pierre Tricon
Chevalier dans l’Ordre national du Mérite
Maître en droit
DESS Gestion des collectivités locales
Co-auteur du Traité de Législation et Réglementation Funéraire
Consultant au cabinet d’avocats Pezet & Associés
Formateur
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