Frais d'inhumation imposés à certaines mairies
15e législature
Texte de la question
Question écrite n° 08005 de Mme Jocelyne Guidez (Essonne - UC) publiée dans le JO Sénat du 06/12/2018 - page 6110
Mme Jocelyne Guidez attire l'attention de Mme la ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales sur les frais d'inhumation imposés à certaines mairies. En effet, une commune ayant sur son territoire un hôpital peut se voir attribuer la prise en charge financière de l'inhumation d'une personne décédée, lorsque la famille ne se manifeste pas ou lorsqu'elle n'en a plus. À titre d'exemple, une commune de l'Essonne a dû prendre en charge cinq décès sur une année. Surtout, il convient de préciser que, dans certains cas, celles-ci n'arrivent pas toujours à être remboursées des frais pouvant atteindre 4 000 €.
Par ailleurs, cette situation génère un travail administratif supplémentaire pour les collectivités territoriales qui doivent, soit procéder aux recherches de l'adresse du défunt, soit prendre contact avec le centre communal d'action sociale où est établie sa résidence habituelle. En conséquence, elle lui demande quelle mesure le Gouvernement pourrait entreprendre pour éviter de faire peser sur certaines mairies une responsabilité qui ne relève pas, par nature, de leur champ d'action.
Texte de la réponse
Réponse du ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales publiée dans le JO Sénat du 18/04/2019 - page 2113
L'art. L. 2213-7 du CGCT donne compétence au maire ou, à défaut, au représentant de l'État dans le département, pour pourvoir d'urgence à ce que toute personne décédée soit inhumée décemment, sans distinction de culte ni de croyance. Aux termes de l'art. L. 2223-27 du même Code, "le service est gratuit pour les personnes dépourvues de ressources suffisantes. Lorsque la mission de service public définie à l'art. L. 2223-19, (c'est à dire le service des pompes funèbres), n'est pas assurée par la commune, celle-ci prend en charge les frais d'obsèques de ces personnes".
Il résulte de l'application combinée de ces dispositions qu'il revient bien aux communes de prendre en charge les frais liés aux obsèques des personnes dépourvues de ressources suffisantes. Cela fait donc partie intégrante des charges et responsabilités qui leur reviennent au titre de leurs compétences propres. À noter qu'en cas de délégation de service public portant sur le service extérieur des pompes funèbres, le délégataire couvre les coûts résultant de l'inhumation des personnes indigentes décédées sur le territoire. Le caractère d'indigence n'est cependant pas systématiquement retenu : il convient d'apprécier au cas par cas si le défunt est effectivement sans actif successoral et dépourvu de créanciers alimentaires ou de conjoint survivant.
En effet, le principe demeure que la famille du défunt doit pourvoir aux funérailles et prendre en charge les frais liés aux obsèques, même si les héritiers renoncent à la succession (1re chambre civile de la cour de cassation, 14 mai 1992). Certaines situations nécessitent cependant que la commune prenne en charge les frais en premier lieu (par exemple en cas d'urgence). Elle a alors par la suite la possibilité de se retourner contre les ayants droits pour recouvrer tout ou partie des frais engagés, ou se rembourser sur le patrimoine du défunt au titre de son droit à percevoir l'impôt. Si le patrimoine peut couvrir les frais d'obsèques, il n'y aura pas indigence, et la succession sera tenue au paiement des frais (art. 806 du Code civil).
Par ailleurs, l'art. L. 2223-27 du CGCT précise que la commune "choisit l'organisme qui assurera ces obsèques". Conformément à l'art. L. 2223-21-1 du même Code modifié par la loi n° 2015-177 du 16 février 2015 relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures, les opérateurs de pompes funèbres doivent déposer des devis types chiffrés présentant les prestations qu'ils fournissent. Ces devis doivent être déposés "dans chaque département où elles ont leur siège social ou un établissement secondaire, auprès des communes où ceux-ci sont situés, ainsi qu'auprès de celles de plus de 5 000 habitants".
Même en cas d'urgence, les communes disposent donc des documents leur permettant d'effectuer une inhumation à un prix convenable dans des conditions décentes et respectueuses de la dignité de ces personnes. En tout état de cause, l'art. L. 2223-22 du CGCT donne compétence aux communes pour instituer des taxes sur les inhumations, les convois et les opérations de crémation réalisées sur leur territoire. Ces fonds permettent de financer les dépenses engagées pour l'inhumation des personnes dépourvues de ressources suffisantes. Le Gouvernement n'envisage donc pas de faire évoluer la réglementation en la matière.
Revue juridique n° 6 - Avril/Août 2019
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