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Éternel mal-aimé, le terrain commun souffre de son assimilation à la sépulture des indigents et des nécessiteux, quand il n’est pas considéré comme un synonyme de la fosse commune. Pourtant, il constitue bien le seul service public obligatoire en matière de sépulture…

 

 

I - Un service public obligatoire pour la commune

L’inhumation en terrain commun est le seul service public obligatoire que doit offrir la commune. Ces emplacements sont mis gratuitement à disposition des personnes ayant le droit à l’inhumation dans la commune (L. 2223-3 du CGCT). Rappelons brièvement que ces sépultures sont gratuites et normalement individuelles. Les catégories de personnes pouvant bénéficier de ce type d’inhumation sont celles déterminées par l’art. L. 2223-3 du CGCT, à savoir :
Art. L. 2223-3 du CGCT
" - décédées sur le territoire de la commune ;
- domiciliées dans la commune, quel que soit le lieu où elles sont décédées ;
- non domiciliées dans la commune, mais y possédant une sépulture de famille ;
- aux Français établis hors de France n’ayant pas une sépulture de famille dans la commune et qui sont inscrits sur la liste électorale de celle-ci".
Le dernier alinéa a été ajouté par la loi du 19 novembre 2008, et en pratique semble d’un intérêt limité. Il est en effet permis de s’interroger sur l’intérêt de cette réforme : peu de gens sollicitent de tels emplacements, tant la croyance populaire de leur attribution aux seuls indigents est malheureusement forte. De plus, cette hypothèse est réservée à des Français immatriculés dans des consulats à l’étranger et inscrits sur la liste électorale de la commune. Or, l’art. L. 12 du Code électoral permet à ces Français de s’inscrire sur la liste électorale des communes suivantes :
- commune de naissance ;
- commune de leur dernier domicile ;
- commune de leur dernière résidence, à condition que cette résidence ait été de six mois au moins ;
- commune où est né, est inscrit ou a été inscrit sur la liste électorale un de leurs ascendants ;
- commune sur la liste électorale de laquelle est inscrit ou a été inscrit un de leurs parents jusqu’au quatrième degré.
On peut rester dubitatif sur la volonté d’un Français vivant à l’étranger depuis des années de se faire inhumer en terrain commun pour une durée limitée à cinq ans dans le cimetière d’une commune où a été inscrit sur la liste électorale son arrière-arrière-petit-cousin, alors qu’il serait parfaitement légitime à demander l’octroi d’une concession funéraire dans un lieu de son choix puisque l’octroi de concessions funéraires n’est pas visé par ces dispositions. Rappelons que l’alinéa premier de l’art. L. 2223-13 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) dispose que : "Lorsque l’étendue des cimetières le permet, il peut être concédé des terrains aux personnes qui désirent y fonder leur sépulture et celle de leurs enfants ou successeurs.” C’est bien le terrain commun qui est obligatoire, la concession n’est qu’une faculté.
L’art. L. 2223-3 du CGCT dispose que : "Les personnes décédées sur [le] territoire [de la commune], quel que soit leur domicile […], [celles] domiciliées sur son territoire, alors même qu’elles seraient décédées dans une autre commune […], [et enfin celles] non domiciliées dans la commune mais qui y ont droit à une sépulture de famille".
Seulement, l’art. L. 2213-13 du CGCT relatif à la délivrance des concessions ne mentionne pas quelles sont les personnes qui ont le droit d’obtenir une concession dans le cimetière. Il est donc possible d’obtenir une concession funéraire dans le cimetière d’une commune alors même que l’on n’a aucun droit à y être inhumé. Le juge interdit de réserver les concessions aux seuls habitant de la commune (TA Orléans, 31 mai 1998 Cortier : Juris-data n° 1988-051006).
Il apparaît donc que le seul motif valable pour refuser à une personne qui en fait la demande une concession funéraire, quand bien même elle ne serait pas domiciliée sur le territoire de la commune et sous réserve bien sûr que le conseil municipal ait permis l’octroi de ces concessions, soit le manque de place dans le cimetière (CE 5 décembre 1987, Commune de Bachy c/Mme Saluden-Laniel, AJDA 1998, p. 258, conclusions Piveteau). Le juge administratif acceptera d’indemniser le préjudice tant matériel que moral naissant du refus d’octroi d’une concession funéraire (CAA Marseille 20 mai 1998, Commune de Saint-Étienne-du-Grès, req. n° 96MA00906).
En tout état de cause, il appartiendra au juge de statuer sur le bien fondé d’une telle demande. Il peut néanmoins être validé des refus dans certains cas, par exemple, le refus d’un emplacement représentant une trop grande superficie (CE 25 juin 2008, Consorts Schiocchet, req. n° 297914). Cet arrêt illustre d’ailleurs à l’envi que les préoccupations de gestion de ce domaine public peuvent être prises en compte lors de la délivrance d’une concession.
Le juge n’évoque t-il pas que : "Considérant qu’un maire, qui est chargé de la bonne gestion d’un cimetière, peut, lorsqu’il se prononce sur une demande de concession, prendre en considération un ensemble de critères, parmi lesquels figurent notamment les emplacements disponibles, la superficie de la concession sollicitée au regard de celle du cimetière, les liens du demandeur avec la commune, ou encore son absence actuelle de descendance."
L’art. L. 2223-2 du CGCT prévoit que la taille de ces terrains doit être cinq fois plus étendue que l’espace nécessaire pour y déposer le nombre présumé annuel de morts susceptibles d’y être inhumés. Les corps seront donc inhumés pendant une durée d’au moins cinq années avant toute possibilité de reprise de l’emplacement. C’est le sens actuel de l’art. R. 2223-5 du CGCT lorsqu’il énonce que : "L’ouverture des fosses pour de nouvelles sépultures n’a lieu que de cinq années en cinq années." Il est évident que ces dispositions, directement transposées de l’art. 6 du décret du 23 prairial an XII, sont parfaitement inadaptées de nos jours, et qu’il serait bon de les reformuler puisqu’elles ne tiennent aucunement compte des emplacements dévolus aux concessions funéraires.
Ces délais pourront être allongés mais non raccourcis suivant le contexte hydrogéologique du cimetière ainsi que la composition des sols. Il suffira de le mentionner au règlement du cimetière. L’augmentation du délai permettra, si le règlement du cimetière le permet, de pratiquer l’opération de réduction de corps sans "aider la nature", ce qui serait une infraction pénale.
Lorsqu’on voudra pratiquer une reprise à l’issue du délai de rotation, la commune devra publier un arrêté de reprise, dans lequel on spécifiera la date effective de la reprise, le délai laissé aux familles pour reprendre les objets, signes et monuments funéraires sur la sépulture. Pour le reste, les inhumations auront lieu en fosses. Il ne pourra être placé qu’un corps par cercueil, et donc par fosse (R. 2223-16 du CGCT). Il existe deux exceptions prévues à cet article, qui sont : le corps de plusieurs enfants mort-nés de la même mère, ou bien le corps d’un ou plusieurs enfants mort-nés et leur mère également décédée, qui peuvent être réunis dans le même cercueil.

II - Des droits limités pour les familles

Les familles n’ont aucun droit sur les terrains mis à leur disposition, le maire détermine ainsi l’emplacement qu’il juge le plus propice, inspiré uniquement du bon ordre dans le cimetière et du bon aménagement de celui-ci. Le juge administratif va accepter que les familles clôturent ces sépultures tout en permettant au maire, par le biais de ses pouvoirs de police, d’en réglementer les dimensions et positionnements dans l’intérêt de la circulation dans le cimetière. Cette limitation s’exprimera, par exemple, par :
- l’impossibilité de retenir un emplacement à l’avance ;
- l’emplacement est attribué par le maire une fois le décès survenu ;
- l’impossibilité d’exiger l’inhumation de plusieurs cercueils au même emplacement, au même moment ou à des dates ultérieures ;
- l’impossibilité de se maintenir en place au-delà du délai de rotation du terrain. La famille du défunt ne dispose d’aucun droit pour imposer un délai plus long ou un maintien en place, même si elle propose un paiement. Ce dernier ne pourrait pas être institué par le conseil municipal, puisque le terrain général doit être mis gratuitement à la disposition de l’utilisateur (Trib. civil Dôle 14 février 1883, GP 1884, 1, 1351) ;
- l’impossibilité de réclamer l’utilisation de l’emplacement pour autrui ;
- l’impossibilité de transmission de droits à des tiers.
C’est, là encore, une différence importante avec le droit des concessions funéraires.
Néanmoins, dans un arrêt de la cour d’appel de Riom du 10 avril 2003 (CA Riom 10 avril 2003, RG 1133-2002), une commune est condamnée pour voie de fait commise dans un cimetière à l’occasion de la reprise de sépultures en terrain commun. La cour étend ainsi logiquement aux sépultures en terrain commun la protection qui jusqu’ici existait au profit des concessions funéraires (voir par exemple : TC 25 novembre 1963, Commune de Saint-Just-Chaleyssin : Rec. CE, p. 793). Il sera juste possible à la famille de demander la transformation du terrain commun en emplacement concédé à l’issue du délai de rotation.
Pour compléter notre propos, voici une parfaite illustration des limites de droits des bénéficiaires de terrains communs par opposition aux titulaires de concessions funéraires :
Considérant qu’aux termes de l’art. L. 2213-8 du CGCT : "Le maire assure la police des funérailles et des cimetières", et qu’aux termes de l’art. L. 2223-12 du même Code : "Tout particulier peut, sans autorisation, faire placer sur la fosse d’un parent ou d’un ami une pierre sépulcrale ou autre signe indicatif de sépulture" ;
Considérant qu’il appartient au maire, dans le cadre des pouvoirs de police qu’il tient de l’art. L. 2213-8 précité du CGCT en matière de police des cimetières et de sépultures, de fixer les règles selon lesquelles peut intervenir la reprise des fosses en terrain commun, de même, par voie de conséquence, que l’enlèvement des matériaux et ornements déposés sur ces fosses ;
Considérant que, par arrêté du 13 novembre 2001, le maire de Saint-Sauveur-Lendelin, après que la commission compétente a constaté l’état d’abandon de certaines fosses "de nature à nuire au bon ordre et à la décence du cimetière", a décidé que les emplacements de ces fosses seront repris par la commune ; que l’art. 2 dudit arrêté ajoute que les matériaux des monuments et les emblèmes funéraires existant sur ces emplacements abandonnés, qui n’auraient pas été enlevés par les ayants droit dans un délai de deux mois après la publication de cet arrêté, "seront enlevés par les soins de la commune qui en disposera dans l’intérêt du cimetière" ; que, ce faisant, le maire n’a pas, contrairement à ce que soutient Mme X, excédé ses pouvoirs en matière de police des cimetières et de sépulture, mais s’est borné à définir des règles justifiées par la nécessité d’assurer la propreté du cimetière communal dans l’intérêt de l’ordre public ;
Considérant que Mme X, qui n’a d’ailleurs pas contesté le jugement du 27 mars 2005 devenu définitif par lequel le tribunal administratif de Caen a estimé que, faute de produire un titre en justifiant, et alors que la commune de Saint-Sauveur-Lendelin contestait l’existence d’une concession, elle n’était pas concessionnaire de l’emplacement de la sépulture et de la tombe gravée aux noms du grand-oncle et de la tante de son défunt mari dans le cimetière communal, ne saurait utilement se prévaloir des dispositions des articles du CGCT applicables à la procédure de constat de l’état d’abandon des concessions funéraires, dès lors que le présent litige ne porte pas sur l’abandon d’une concession, mais sur celui d’une sépulture ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier, et n’est pas contesté, que l’autorité municipale a informé la population à partir du 9 octobre 2000, par six avis d’insertion dans la presse locale et par voie d’affichage notamment, à la mairie et dans l’enceinte du cimetière, de la mise en œuvre de la procédure de reprise de tombes dans le cimetière communal, qui a ultérieurement fait l’objet de la mesure fixée par l’arrêté du 13 novembre 2001 susmentionné ; que Mme X qui, lors du dépôt de sa plainte le 6 janvier 2003, avait expressément reconnu avoir pris connaissance dudit arrêté, n’a pris aucune disposition en vue de sauvegarder la sépulture en cause, édifiée sur un emplacement du terrain commun du cimetière ; qu’elle n’a pas davantage pris de dispositions pour obtenir la restitution du monument et des éléments funéraires à la suite de l’intervention de l’arrêté municipal du 13 novembre 2001 alors, pourtant, que les opérations de reprise ne se sont déroulées qu’un an plus tard ; que, dans ces conditions, le maire de Saint-Sauveur-Lendelin a pu légalement, conformément aux prescriptions dudit arrêté, disposer de la sépulture en cause, de même que des matériaux et des ornements qu’elle comportait et opposer à la requérante la décision de refus contestée ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que Mme X n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision implicite de rejet, résultant du silence gardé par le maire de Saint-Sauveur-Lendelin". (CAA Nantes 4 mars 2008, n° 07NT01321)

III - Une reprise informelle
 
La reprise de ces sépultures sera décidée par une délibération du conseil municipal qui charge le maire de son exécution. Elle s’opère par un arrêté du maire affiché aux portes de la mairie et du cimetière, et notifié aux membres connus de la famille. Si on ne connaît personne, on se contentera de l’affichage. Cet arrêté précise :
- la date de la reprise effective ;
- le délai laissé aux familles pour récupérer les objets déposés sur la sépulture.
Dans ce délai, la famille peut également décider le transfert du corps dans une autre sépulture ou sa crémation. Dans le cas contraire, les restes seront déposés à l’ossuaire ou crématisés par la commune. Les objets non repris deviendront la propriété de la commune. Là encore, les différences d’avec le formalisme rigide des concessions sont flagrantes.
Enfin, notons le nouvel art. L. 2223-12-1 du CGCT, instauré par la loi du 19 décembre 2008, qui dispose que "le maire peut fixer des dimensions maximales aux monuments érigés sur les fosses". Si cette disposition, placée dans le CGCT dans le chapitre "Dispositions générales", ainsi que l’emploi du vocable "fosse" laissent à penser que le maire ne peut valablement réglementer que les dimensions des monuments funéraires dans les terrains communs et non dans les concessions funéraires, force est de constater que, bien souvent, le juge applique les mêmes protections aux constructions érigées sur l’un ou l’autre de ces types d’emplacements.
 
On remarquera qu’une réponse ministérielle

(Rép. min. n° 36690, JOAN 9 décembre 1991) évoque deux points intéressants :
- le premier est l’obligation que le corps ne soit pas intact pour que l’exhumation ait lieu, d’où l’importance d’un délai de rotation approprié à la nature des sols ;
- le second concerne la possibilité pour le gouvernement de régulariser un emplacement en terrain commun où plusieurs inhumations auraient été illégalement réalisées en le transformant en concession. Solution d’ailleurs avalisée par la jurisprudence :
 
"Considérant, en premier lieu, qu’il résulte de ces dispositions que chaque commune est, indépendamment de l’attribution d’une quelconque concession, tenue de consacrer à l’inhumation des défunts des terrains spécialement aménagés et que toute personne peut faire placer une pierre sépulcrale ou tout autre signe indicatif de sépulture sur la fosse d’un parent ou ami ; que, par suite, la double circonstance que trois inhumations ont été réalisées entre 1966 et 1999 à l’emplacement du cimetière communal de Moutiers où avait été enterré M. G V. en 1955 et qu’un monument funéraire y a été construit ne saurait établir l’existence d’une concession délivrée à ce dernier ou à ses descendants, dont il ne résulte pas de l’instruction qu’elle ait été attribuée à quiconque et dont l’octroi ne peut d’ailleurs donner lieu qu’à une décision expresse ;

Considérant, en deuxième lieu, qu’en l’absence de toute concession antérieure sur ledit emplacement, la commune de Moutiers a pu légalement, et ce sans méconnaître le droit à sépulture reconnu par les dispositions précitées de l’art. L. 2223-3 du CGCT, accorder par acte du 5 mars 1999 une concession perpétuelle sur l’emplacement litigieux à Mme V., veuve de M. A V., fils de M. G V. et décédé en 1999 ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les requérants, descendants de M. G V., qui n’apportent par ailleurs aucun élément à l’appui de leurs allégations selon lesquelles le maire de Moutiers aurait opposé un "silence méprisant" à leurs demandes d’information, ne sont pas fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté leur requête tendant à engager la responsabilité de la commune de Moutiers à raison de la faute qu’aurait commise son maire dans l’exercice de son pouvoir de gestion du cimetière communal". (CAA Nancy, 28 septembre 2006, nº 05NC00285, Consorts V.)
Rappelons enfin que, pour le juge administratif, une concession funéraire dont le montant n’a jamais été acquitté est en droit un terrain commun, et, comme tel, il obéit aux règles de reprise des terrains communs et non à celle des concessions :
"Considérant que, par arrêté du 8 janvier 2004 relatif à la reprise des terrains généraux dans les cimetières, le maire de la commune de Castelnaudary a décidé, à compter du 1er mars 2004, de la reprise des terrains ayant servi aux inhumations dans les fosses ordinaires, jusqu’à l’année 1998, ainsi que de ceux dont le montant de l’achat n’a jamais été acquitté, situés notamment dans le cimetière de Crozes ; qu’en outre, était prévue, à défaut d’exhumation au 29 février 2004, l’exécution de l’opération, les restes mortels étant déposés à l’ossuaire ; qu’enfin, les familles étaient invitées à l’enlèvement des signes funéraires et autres éléments existant sur les tombes avant le 29 février 2004, ces objets déplacés par l’Administration étant mis à leur disposition pendant un an et un jour ; que, dans le courant de l’année 2004, en exécution de l’arrêté précité du 8 janvier 2004, la commune de Castelnaudary a procédé à la reprise, dans le cimetière de Crozes, des terrains où étaient inhumés, respectivement depuis 1903, 1919 et 1921, le grand-oncle M. J-F C, la grand-tante, Mme M B et la grand-mère, Mme R B épouse B de Mme A ;
Considérant, d’une part, que les emplacements accueillant des sépultures, en l’absence de toute concession, notamment à raison du défaut de versement de la redevance due à ce titre, sont soumis au régime de droit commun des terrains généraux ; que, dès lors que les articles L. 2223-17 et R. 2223-12 à R. 2223-15 du CGCT déterminent les dispositions applicables à la reprise des terrains affectés aux concessions, Mme A ne peut utilement soutenir que l’arrêté précité qui ne régit que les terrains généraux dans les cimetières de l’Est, de l’Ouest et des Crozes aurait méconnu ces dispositions ;
Considérant, d’autre part, que, contrairement à ce qu’elle soutient, Mme A n’établit pas que les emplacements où étaient inhumés depuis 1903, 1919 et 1921 M. J-F C et Mmes M et R B dans le cimetière des Crozes, ont donné lieu à l’établissement d’un acte de concession à titre perpétuel ; qu’ainsi, il ne ressort d’aucune disposition législative ou réglementaire qu’il appartenait au maire de Castelnaudary de mettre en œuvre une procédure d’état d’abandon et d’informer individuellement les membres de la famille des défunts ; que, par suite, en procédant à la reprise desdits emplacements constituant des terrains généraux, le maire de Castelnaudary n’a pas méconnu les articles L. 2223-17 et R. 2223-12 à R. 2223-15 du CGCT qui, comme il a été précédemment indiqué, déterminent les dispositions applicables à la reprise des seules concessions ; que, par suite, le maire de la commune de Castelnaudary n’a pas commis de faute de nature à engager la responsabilité de la commune ; […]" (CAA Marseille, 10 mars 2011, n° 09MA00288, Mme A P ). Ainsi, aucun titre n’est délivré à l’occasion des inhumations en terrain commun. Il convient d’ailleurs de remarquer que, si aucun titre de concession ne peut être produit (il devrait normalement exister trois exemplaires du titre : l’un dans les mains du concessionnaire, le deuxième conservé par la commune et le dernier, enfin, déposé à la Trésorerie municipale), le juge qualifiera la sépulture de "terrain commun".
Il convient de relever que le CGCT n’évoque pas ces formalités de reprises. Néanmoins, la jurisprudence en fait un préalable obligatoire (Cass. crim., 3 octobre 1862, Chapuy : Bull. crim. 1862, II, p. 908), d’ailleurs récemment rappelé par le juge administratif et résidant essentiellement en la publication d’un arrêté publié en mairie sans avoir à rechercher la famille du défunt, fort logiquement d’ailleurs, puisque celle-ci ne bénéficie d’aucun droit sur le terrain, à expiration du délai de rotation :
"[…] Considérant, en premier lieu, qu’aux termes du premier alinéa de l’art. L. 2223-1 du CGCT : "Chaque commune consacre à l’inhumation des morts un ou plusieurs terrains spécialement aménagés à cet effet" ; qu’aux termes de l’art. L. 2223-4 du même Code : "Un arrêté du maire affecte à perpétuité, dans le cimetière, un ossuaire aménagé où les restes exhumés sont aussitôt réinhumés. Le maire peut également faire procéder à la crémation des restes exhumés en l’absence d’opposition connue, attestée ou présumée du défunt. Les restes des personnes qui avaient manifesté leur opposition à la crémation sont distingués au sein de l’ossuaire" ; qu’aux termes de l’art. R. 2223-5 dudit Code : "L’ouverture des fosses pour de nouvelles sépultures n’a lieu que de cinq années en cinq années" ; qu’enfin, aux termes de l’art. R. 2223-6 : "Les cendres des restes exhumés sont déposées dans un columbarium, dans l’ossuaire ou dispersées dans le lieu spécialement affecté à cet effet prévu à l’art. R. 2223-9" ; qu’il résulte de la combinaison de ces dispositions qu’en dehors du cas des concessions accordées dans un cimetière communal, les emplacements peuvent être repris par l’autorité administrative sans formalité préalable particulière, après le délai de rotation prévu par l’art. R. 2223-5 du CGCT, et qu’en l’absence de position connue du défunt lui-même, l’Administration peut alors faire procéder à la crémation des restes exhumés, puis déposer ceux-ci dans l’ossuaire collectif prévu à cet effet ;
[…] Considérant que si les requérantes soutiennent que le président du syndicat intercommunal ne pouvait légalement procéder à l’exhumation et à la crémation du corps de leur père sans les avoir précédemment informées, il résulte de l’instruction que l’arrêté du 15 octobre 2007, à caractère réglementaire, prévoyant la reprise des terrains communs, des enfeus et des cases de columbarium délivrés pour cinq ans dans lesquels ont eu lieu des inhumations faites en service ordinaire avant le 31 décembre 2002, et le cas échéant, la crémation des corps, a été publié par voie d’affichage dans la mairie des communes adhérentes au syndicat, ainsi qu’au sein du cimetière intercommunal des Joncherolles ; que cet arrêté concernait notamment l’emplacement occupé par le défunt X. ; qu’ainsi, en l’absence de dispositions législatives ou réglementaires imposant à l’autorité administrative d’informer individuellement les membres de la famille du défunt, les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que le président du syndicat intercommunal ne pouvait légalement procéder à l’exhumation et à la crémation du corps de leur père sans respecter une telle formalité, aucun élément du dossier ne permettant au surplus d’établir qu’une promesse en ce sens aurait été expressément formulée par les agents du syndicat intercommunal ;
[…] Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le syndicat intercommunal du cimetière des Joncherolles n’a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité, et que, dès lors, les conclusions susvisées doivent être rejetées ; […] "( TA Montreuil, 27 mai 2011, n° 1012029, Mmes F et J R).

Philippe Dupuis
Consultant au Cridon, chargé de cours à l’université de Valenciennes, formateur en droit funéraire pour les fonctionnaires territoriaux au sein des délégations du CNFPT.

 

Résonance n°132 - Juillet 2017

 

 

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