Décret n° 2016-1253 du 26 septembre 2016 relatif aux opérations funéraires et à la reconnaissance des qualifications professionnelles nécessaires à leur exercice.
Ainsi que le rappelle la notice de ce décret, deux réformes relativement récentes supposaient de mettre en concordance la partie réglementaire du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) et sa partie réglementaire. Nous examinerons donc successivement ces deux points.
I - La surveillance des opérations funéraires
On s’en souvient, la loi n° 2015-177 du 16 février 2015 relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures avait modifié le régime de la surveillance des opérations funéraires dans un souci d’une plus grande simplification. Ainsi, le nouvel art. L. 2213-14 CGCT est désormais rédigé de la sorte :
"Afin d’assurer l’exécution des mesures de police prescrites par les lois et règlements, les opérations de fermeture et de scellement du cercueil lorsqu’il y a crémation s’effectuent :
- dans les communes dotées d’un régime de police d’État, sous la responsabilité du chef de circonscription, en présence d’un fonctionnaire de police délégué par ses soins ;
- dans les autres communes, sous la responsabilité du maire, en présence du garde champêtre ou d’un agent de police municipale délégué par le maire.
"Lorsque le corps est transporté hors de la commune de décès ou de dépôt, les opérations de fermeture et de scellement du cercueil s’effectuent sous la responsabilité de l’opérateur funéraire, en présence d’un membre de la famille. À défaut, elles s’effectuent dans les mêmes conditions qu’aux deuxième et troisième alinéas." ;
Les fonctionnaires mentionnés aux deuxième et troisième alinéas peuvent assister, en tant que de besoin, à toute autre opération consécutive au décès.
On formulera les remarques suivantes :
a) Abandon de la surveillance des exhumations à la demande des familles.
Tout d’abord, toute la partie du premier alinéa renvoyant à la surveillance des exhumations à la demande des familles, de réinhumation et de translation de corps a totalement disparu du Code. Ainsi, ces opérations ne donnent plus lieu à surveillance de police et à perception de vacation, lorsque celle-ci était exigible.
b) Fermeture de cercueil et crémation : la dernière surveillance obligatoire.
Par contre, est conservée la surveillance des opérations de fermeture et de scellement du cercueil lorsqu’il y a crémation. Juridiquement, on notera l’ajout du terme "scellement", alors qu’en pratique ces cachets sont systématiquement apposés.
c) Fermeture de cercueil et transport hors de la commune pour inhumation : pas de surveillance si un membre de la famille est présent.
Enfin, pour ce qui est de la fermeture de cercueil lorsque le corps est transporté hors de la commune du lieu de fermeture pour être inhumé, ces mêmes opérations de fermeture et de scellement pourront être effectuées uniquement sous la surveillance d’un membre de la famille par l’opérateur funéraire lui-même. Ce n’est que s’il n’y a pas de membre de la famille présent que la surveillance aura lieu dans les mêmes conditions qu’auparavant.
Il fallait donc mettre en adéquation les parties réglementaires d’avec cette réforme, ce à quoi s’emploie ce texte.
L’art. 2 du décret vient premièrement modifier l’art. R. 2213-40 CGCT en ôtant le membre de phrase suivant lequel si le parent ou le mandataire de celui qui a demandé l’exhumation est absent l’opération n’a pas lieu, mais les vacations sont néanmoins perçues, ce qui est logique puisque désormais cette opération n’est plus soumise obligatoirement à surveillance et donc à vacations. L’art. 3 vient insérer à l’art. R. 2213-42 les quatre alinéas suivants :
"Les exhumations sont réalisées soit en dehors des heures d’ouverture du cimetière au public, soit durant ces heures d’ouverture, dans une partie du cimetière fermée au public.
"Lorsque le corps est destiné à être réinhumé dans le même cimetière, la réinhumation s’opère sans délai.
"Lorsque le corps est destiné à être réinhumé dans un autre cimetière de la même commune ou dans une autre commune, la translation et la réinhumation s’opèrent sans délai.
"Lorsque le cercueil est déposé dans un caveau provisoire, il est fait application des dispositions de l’art. R. 2213-29".
Il s’agit tout d’abord d’y intégrer les dispositions de l’art. R. 2213-46 que l’art. 6 supprime tout en venant apporter la précision suivant laquelle si cette exhumation est suivie d’une inhumation au caveau provisoire, on y appliquera les dispositions relatives à la gestion de cet équipement. L’intérêt réside alors essentiellement dans le premier des alinéas ajoutés, puisqu’il est précisé qu’il est possible de procéder à une exhumation pendant les heures d’ouverture du cimetière à la condition que la partie du cimetière où se déroule l’exhumation soit fermée au public.
Cette précision est la bienvenue, puisque le décret du 3 août 2010 (n° 2010-917) avait substitué à l’interdiction de procéder aux exhumations avant 9 heures, une interdiction d’exhumer pendant les heures d’ouverture du cimetière (R. 2213-46 CGCT : "Les exhumations sont toujours réalisées en dehors des heures d’ouverture du cimetière au public. Cette mesure, en apparence anodine, ne laissait pas se poser aux communes des problèmes pratiques, puisqu’elle ne tenait absolument pas compte de la diversité de superficie des cimetières, et il apparaissait ubuesque de devoir fermer un cimetière de plusieurs dizaines d’hectares pour une exhumation qui somme toute ne concernerait qu’une portion limitée de ce même équipement.
L’art. 5 vient remplacer le texte de l’art. R. 2213-45 par le suivant : "Art. R. 2213-45. - Les fonctionnaires mentionnés à l’art. L. 2213-14 contrôlent par tout moyen l’identité du défunt, assistent à la fermeture du cercueil et y apposent deux cachets de cire revêtus du sceau de l’autorité administrative compétente :
"1° Lorsqu’il doit être procédé à la crémation du corps ;
"2° En cas de transport de corps hors de la commune de décès ou de dépôt, lorsqu’aucun membre de la famille n’est présent." Il s’agit là d’une réécriture qui se veut plus simple que ces dispositions, sans que néanmoins il y ait de changement majeur.
L’art. 7 procède à la refonte de l’art. R. 2213-48 par les dispositions suivantes : "Art. R. 2213-48. - L’intervention des fonctionnaires mentionnés à l’art. L. 2213-14 donne lieu au versement d’une vacation pour chacune des opérations prévues ci-après :
"1° La fermeture du cercueil et la pose de scellés, en cas de transport du corps hors de la commune de décès ou de dépôt et lorsque aucun membre de la famille n’est présent ;
"2° La fermeture du cercueil et la pose de scellés, lorsqu’il doit être procédé à la crémation du corps."
De nouveau, il s’agit de la prise en compte des dispositions législatives qui viennent limiter le nombre des opérations désormais soumises à vacations afin que ne subsiste plus de discordances entre la partie législative et la partie réglementaire. Les fonctionnaires cités sont toujours (L. 2213-14 CGCT) :
- chef de circonscription de police nationale dans les communes dotées d’une régime de police d’État (cela ne concerne plus uniquement le seul commissaire de police, car de plus en plus de communes à régime de police d’État, notamment depuis la mise en œuvre de la police de proximité, voient les fonctions de chef de circonscription assurées par un lieutenant, un capitaine ou un commandant de police) ;
- maire dans les autres communes ;
- préfet de police à Paris (art. R. 2512-35 CGCT).
Il faut noter enfin que les chefs de circonscription peuvent déléguer leur compétence à tout fonctionnaire de police du corps de maîtrise et d’application de la police nationale. Les maires peuvent aussi déléguer leur compétence aux gardes champêtres ou encore, lorsqu’il en existe, à tout agent de police municipale (art. L. 2213-14 CGCT).
Attention, traditionnellement, s’il existe une police d’État, la responsabilité liée aux opérations surveillées était une responsabilité du maire au nom de l’État, car ces opérations sont alors placées sous la responsabilité d’un chef de circonscription de cette même police, et ce, quand bien même l’opération est matériellement effectuée par du personnel municipal. Tandis qu’en l’absence d’une telle police, la compétence étant strictement dévolue au maire par les textes, c’est alors lui qui en prend l’entière responsabilité.
Néanmoins, l’adoption de cette réforme, tout particulièrement dans l’hypothèse de l’exhumation, transférera cette responsabilité systématiquement au maire puisque l’État ne surveillera plus ces opérations. De même, l’opérateur funéraire pourrait en théorie devenir responsable lorsqu’en présence de la famille il assure la fermeture du cercueil. Gageons néanmoins que cette responsabilité ne sera que théorique, puisque justement la présence d’un membre de la famille pourvoira à ce qu’aucune erreur ne soit commise.
On relèvera que ce décret aurait pu donner lieu à la clarification de la notion de scellement, tout particulièrement lorsque c’est l’opérateur funéraire qui l’effectue. En effet, ce terme de "scellement" a été ajouté par la loi du 16 février 2015 ; auparavant, le Code n’évoquait que la fermeture du cercueil, et c’était cette fermeture qui, en pratique, donnait lieu à l’apposé des scellés par les autorités de police.
Ainsi, depuis l’adoption de la loi du 16 février 2015, on distingue l’opération matérielle que constitue la fermeture, et l’opération juridique constituée par la pose des scellés, là ou antérieurement le terme "fermeture" recouvrait les deux opérations. Néanmoins, il s’agira toujours que cette fermeture et ce scellement soient le fait d’une autorité de police. Par contre, en ce qui concerne la fermeture du cercueil en cas de transport de corps en vue d’une inhumation, existe la possibilité de recourir aux opérateurs funéraires si la famille est présente. Si la famille est absente, de nouveau la lettre du texte renvoie aux autorités traditionnellement compétentes en matière de police des opérations funéraires. Sous couvert d’atténuer la charge de travail de ces autorités, et le tout évidemment justifié par un salutaire souci de simplification, le texte n’en demeure pas moins lourd d’au moins deux interrogations purement pratiques pour les opérateurs funéraires.
En effet, premièrement, que se passe-t-il si une famille, qui pourtant avait assuré l’opérateur de sa présence, fait faux bond ? Le texte commande alors de pallier cette défection en prévenant immédiatement l’autorité de police à peine d’engager la responsabilité de l’opérateur funéraire. On imagine les problèmes que peuvent poser une telle situation, néanmoins, nous insistons sur l’impossibilité d’adopter une autre conduite sous peine de violer les dispositions prévues par le CGCT.
Deuxièmement, quelles formes revêtiront ces fameux scellés ? Il ne saurait être question d’employer un modèle analogue à celui de l’autorité de police, puisque l’opérateur funéraire ne dispose pas du pouvoir de police. Il conviendrait sans doute que l’opérateur se fasse établir un tampon qui pourrait, par exemple, comporter sa raison sociale et son numéro d’habilitation, ce qui permettrait de matérialiser son intervention et éventuellement d’attester de l’engagement de sa responsabilité…
II - Simplification touchant aux professionnels
Dans ce second volet du décret, il s’agit cette fois de la prise en compte de l’ordonnance n° 2015-1682 du 17 décembre 2015 portant simplification de certains régimes d’autorisation préalable et de déclaration des entreprises et des professionnels. L’art. R. 2223-134 est remplacé par les dispositions suivantes :
"Art. R. 2223-134 I. - Lorsqu’il est saisi d’une demande tendant à obtenir la reconnaissance des qualifications professionnelles prévue à l’art. L. 2223-49, le préfet accuse réception du dossier du demandeur dans le délai d’un mois à compter de sa saisine, et l’informe, le cas échéant, de tout document manquant.
"II. - Le préfet fait procéder, par les personnes mentionnées à l’art. R. 2223-135, à une vérification des connaissances, aptitudes et compétences acquises par le demandeur au cours de son expérience professionnelle ou de l’apprentissage tout au long de la vie et ayant fait l’objet à cette fin d’une validation en bonne et due forme par un organisme compétent. À l’issue de cette vérification, le préfet ou, pour les fonctions de thanatopracteur, le ministre chargé de la Santé, valide la vérification des connaissances, aptitudes et compétences.
"III. - Le préfet notifie, le cas échéant, au demandeur sa décision de le soumettre à une mesure de compensation, en lui précisant :
"1° Le niveau de qualification professionnelle requis en France et le niveau de la qualification professionnelle que possède le demandeur ;
"2° Les raisons pour lesquelles les différences substantielles qui sont observées dans les matières couvertes par ces deux niveaux de qualification, qui ne peuvent être que des différences de contenu lorsque l’activité considérée est réglementée dans l’État d’origine du demandeur, ne peuvent être couvertes par les connaissances, aptitudes et compétences acquises au cours de l’expérience professionnelle ou de l’apprentissage tout au long de la vie ayant fait l’objet, à cette fin, d’une validation en bonne et due forme par un organisme compétent ;
"3° Celles des matières du programme mentionné à l’art. R. 2223-136 sur lesquelles le demandeur est interrogé ou la durée et le contenu du stage d’adaptation en tenant compte des éléments recueillis lors de la vérification des connaissances.
"IV. - L’informe en outre que, s’il n’opte pas entre l’épreuve d’aptitude et le stage d’adaptation dans le délai d’un mois à compter de la notification de la décision, il sera réputé avoir renoncé à sa demande de reconnaissance de qualifications professionnelles.
"V. - La décision du préfet de reconnaissance des qualifications professionnelles est motivée et notifiée dans un délai de quatre mois à compter de la réception du dossier complet. La décision de recourir à une épreuve d’aptitude ou à un stage d’adaptation suspend ce délai jusqu’à la fin de l’accomplissement de cette mesure de compensation." Il s’agit essentiellement d’une prise en compte par un ajout au premier alinéa des validations des acquis ainsi que d’une nouvelle écriture des mesures de compensations.
Philippe Dupuis
Consultant au Cridon, chargé de cours à l’université de Valenciennes, formateur en droit funéraire pour les fonctionnaires territoriaux au sein des délégations du CNFPT
Résonance n°125 - Novembre 2016
Suivez-nous sur les réseaux sociaux :