D’après l’art. L. 2223-22 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) : "Les convois, les inhumations et les crémations peuvent donner lieu à la perception de taxes dont les tarifs sont votés par le conseil municipal. Dans ces tarifs, aucune surtaxe ne peut être exigée pour les présentations et stations dans un lieu de culte." À la lecture de ce texte, il en est déduit que la commune ne peut prélever d’autres taxes que celles ci-dessus désignées. Ce principe a même été rappelé par le Conseil d’État dans un arrêt n° 293220 du 17 octobre 2008 (mentionné dans les tables du recueil Lebon).
Marion Perchey, responsable juridique Le Vœu. |
I - Les taxes :
Néanmoins, beaucoup de communes ont instauré diverses "taxes" sur certaines opérations funéraires, qui sur un plan juridique sont illégales, faute notamment à la fin du monopole des pompes funèbres. En effet, certaines communes ont maintenu des prélèvements alors même qu’elles n’assuraient plus le service en direct ou sous délégation. Ainsi, sous le vocable de "taxes" se cachent des redevances pour service rendu (ex. : la "taxe" d’exhumation légalement prélevée lorsque le fossoyeur communal est intervenu, illégale dans le cas contraire).
Si ces taxes sont instaurées sans qu’il y ait service rendu, le maire encourt des poursuites pénales. Ainsi, dans son art. 432-10, le Code pénal dispose que : "Le fait, par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, de recevoir, exiger ou ordonner de percevoir à titre de droits ou contributions, impôts ou taxes publics, une somme qu’elle sait ne pas être due, ou excéder ce qui est dû, est puni de cinq ans d’emprisonnement et d’une amende de 500 000 €, dont le montant peut être porté au double du produit tiré de l’infraction. Est puni des mêmes peines le fait, par les mêmes personnes, d’accorder sous une forme quelconque et pour quelque motif que ce soit une exonération ou franchise des droits, contributions, impôts ou taxes publics en violation des textes légaux ou réglementaires. La tentative des délits prévus au présent article est punie des mêmes peines."
Dans les taxes issues de l’application de l’art. L. 2223-22 du CGCT, se distinguent la taxe d’inhumation, la taxe de crémation et la taxe sur les convois.
S’agissant de la taxe d’inhumation
Il s’agit d’un prélèvement instauré par délibération du conseil municipal, demandé pour toute opération d’inhumation d’un corps ou d’une urne dans une sépulture. Ainsi, peuvent donner lieu au prélèvement de cette taxe :
- l’inhumation en terrain commun (malgré la gratuité) ;
- l’inhumation en terrain concédé d’un corps ou d’une urne (la taxe s’ajoutant alors au prix de la concession et au droit fixe de 25 € pour les concessions temporaires, cf. art. 739 du Code général des impôts) ;
- l’inhumation en terrain privé ;
- le scellement d’une urne sur un monument funéraire.
S’agissant de la taxe de crémation
Elle ne peut être prélevée que par la commune sur le territoire de laquelle sera effectuée l’opération.
S’agissant de la taxe sur les convois
C’est un prélèvement sur les cortèges funèbres qui suivent le corps du défunt lors de son arrivée au cimetière, par exemple, et non des taxes sur les transports de corps avant ou après mises en bière. Rappelons que la circulaire n° NOR/INT/B/97/00211/C du 12 décembre 1997 précise que : "Les convois funéraires recouvrent les opérations de transport de corps après mise en bière effectuées sur le territoire de la commune à condition qu’ils soient réalisés avec pompe ou cérémonie." Ainsi, le fait pour une mairie de demander une taxe sur le transport du cercueil (à ne pas confondre dès lors avec la vacation exigée en l’absence de famille lors de la fermeture du cercueil dans le cadre d’un transport vers une autre commune) est contraire à l’esprit de l’art. L. 2223-22 du CGCT et constitue un prélèvement illégal.
II - Les redevances
D’autres prélèvements existent et utilisent le vocable de "taxe" de manière impropre : la taxe de seconde et ultérieures inhumations, la taxe de réunion de corps, la taxe de dispersion.
- La première de ces "taxes" est une redevance qui est perçue à l’occasion des inhumations qui ont lieu dans une même concession, à partir de la seconde inhumation (Conseil d’État, sect., 18 janvier 1929, "Sieur Barbé”). Il s’agit en réalité non pas d’une taxe, mais d’une modalité de paiement du prix de la concession (question n° 24234, réponse publiée au JOAN le 22/03/1999 p. 1754). Cette redevance est légalement prélevée si son instauration date d’avant l’achat de la concession. On peut trouver cette "taxe" sous le vocable de "taxe de superposition" de corps (Conseil d’État, 26 juillet 1982, "Commune de Jouy-Bonvoisin c/ Alie et autres”, requête n° 19 429).
- La seconde est la "taxe" perçue quand on procède à la réunion ou réduction de corps permettant de libérer un emplacement dans la concession. La redevance payée est celle en vigueur au moment de l’attribution ou du renouvellement de l’emplacement (question n° 24234, réponse publiée au JOAN le 22/03/1999 p. 1754).
- La troisième est perçue dans le cadre d’une dispersion dans le site dédié à cet effet (circulaire n° 97-00211 C du 12 décembre 1997).
Ainsi, le Conseil d’État a jugé illégale l’institution par un conseil municipal d’un "droit d’entrée" dans le cimetière communal pour les personnes décédées hors du territoire de la commune et n’y ayant ni domicile ni droit à une sépulture de famille, dans le but, non pas d’assurer la rémunération d’un service rendu, mais de limiter l’octroi des concessions aux personnes étrangères à la commune (CE, 10 déc. 1969, n° 76354).
Notons que d’autres redevances (et non pas taxes) peuvent être instaurées s’il y a service rendu par le personnel municipal affecté à ces opérations : les "taxes" d’exhumation, d’ouverture de caveau, de chargement ou de déchargement de cercueil, d’admission en chambre funéraire municipale constituent toutes des redevances pour services rendus.
Marion Perchey
Responsable juridique Le Vœu
Résonance n°120 - Mai 2016
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