Un mot a suscité un certain nombre d’interrogations dans la loi du 16 février 2015 relative au droit funéraire. Ce terme, c’est celui de "scellement" ajouté à l’art. L. 2213-14 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT). Ce simple ajout, loin d’être anecdotique, pose, en droit, de réelles interrogations quant à cette opération.
Le scellement : une opération distincte de la fermeture du cercueil
Le nouvel art. L. 2213-14 du CGCT, issu de la loi du 16 février 2015, est désormais rédigé ainsi :
Afin d’assurer l’exécution des mesures de police prescrites par les lois et règlements, les opérations de fermeture "et de scellement du cercueil lorsqu’il y a crémation s’effectuent" :
- dans les communes dotées d’un régime de police d’État, sous la responsabilité du chef de circonscription, en présence d’un fonctionnaire de police délégué par ses soins ;
- dans les autres communes, sous la responsabilité du maire, en présence du garde champêtre ou d’un agent de police municipale délégué par le maire.
"Lorsque le corps est transporté hors de la commune de décès ou de dépôt, les opérations de fermeture et de scellement du cercueil s’effectuent sous la responsabilité de l’opérateur funéraire, en présence d’un membre de la famille. À défaut, elles s’effectuent dans les mêmes conditions qu’aux deuxième et troisième alinéas."
Les fonctionnaires mentionnés aux deuxième et troisième alinéas peuvent assister, en tant que de besoin, à toute autre opération consécutive au décès.
Il y a donc lieu de distinguer deux types d’opérations où la question du scellement, acte d’exécution d’une mesure de police, se pose :
- la fermeture du cercueil lorsqu’une crémation est demandée,
- la fermeture du cercueil en cas de transport de corps en vue d’une inhumation.
On remarquera que la lettre du texte, implicitement, dispense de scellement la fermeture de cercueil si le corps ne quitte pas la commune du lieu de mise en bière, ce qui est logique puisque l’opération n’est plus qu’optionnellement surveillée, ainsi que l’atteste le dernier alinéa de l’art. L. 2213-14 du CGCT.
Que faut-il entendre par scellement ?
Ce terme de "scellement" a été ajouté par la loi du 16 février 2015 ; auparavant, le Code n’évoquait que la fermeture du cercueil et non le scellement, et c‘était cette fermeture qui, en pratique, donnait lieu à l’apposé des scellés par les autorités de police. Ainsi, désormais, la loi du 16 février 2015 distingue l’opération matérielle que constitue la fermeture, et l’opération juridique constituée par la pose des scellés, là ou antérieurement le terme "fermeture" recouvrait les deux opérations.
Le scellement confié à l’autorité de police
Néanmoins, l’article est clair, en cas de crémation, il s’agira toujours que cette fermeture et ce scellement soient le fait d’une autorité de police, c’est-à-dire :
- chef de circonscription de police nationale dans les communes dotées d’un régime de police d’État ;
- maire dans les autres communes ;
- préfet de police à Paris (art. R. 2512-35 du CGCT).
Tout autre procédé est à proscrire et serait indubitablement illégal.
Le scellement confié optionnellement à l’opérateur funéraire
En revanche, en ce qui concerne la fermeture du cercueil en cas de transport de corps en vue d’une inhumation, existe la possibilité de recourir aux opérateurs funéraires si la famille est présente. Si la famille est absente, de nouveau, la lettre du texte renvoie aux autorités traditionnellement compétentes en matière de police des opérations funéraires. Sous couvert d’atténuer la charge de travail de ces autorités, et le tout évidemment justifié par un salutaire souci de simplification, le texte n’en demeure pas moins lourd d’au moins deux interrogations purement pratiques pour les opérateurs funéraires.
En effet, premièrement, que se passe-t-il si une famille, qui pourtant avait assuré l’opérateur de sa présence, fait faux bond ? Le texte commande alors de pallier cette défection en prévenant immédiatement l’autorité de police, sous peine d’engager la responsabilité de l’opérateur funéraire. On imagine les problèmes que peuvent poser une telle situation, néanmoins, nous insistons sur l’impossibilité d’adopter une autre conduite, sous peine de violer les dispositions prévues par le CGCT.
Deuxièmement, quelles formes revêtiront ces fameux scellés ? Il ne saurait être question d’employer un modèle analogue à celui de l’autorité de police, puisque l’opérateur funéraire ne dispose pas du pouvoir de police. Il conviendrait sans doute que l’opérateur se fasse établir un tampon qui pourrait, par exemple, comporter sa raison sociale et son numéro d’habilitation, ce qui permettrait de matérialiser son intervention et éventuellement d’attester de l’engagement de sa responsabilité…
Philippe Dupuis
Consultant au Cridon, chargé de cours à l’université de Valenciennes, formateur en droit funéraire pour les fonctionnaires territoriaux au sein des délégations du CNFPT.
Résonance n°115 - Novembre 2015
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