La crémation, autrefois appelée incinération, est un mode de sépulture qui a connu une très lente évolution jusqu’au dernier quart du XXe siècle, mais n’est plus désormais marginalisée.
Jean-Pierre Tricon, avocat au barreau de Marseille. |
I - Son histoire s’articule autour de cinq dates principales :
1° - La loi du 14 novembre 1887, sur la liberté des funérailles, qui a permis à tout majeur ou mineur émancipé de choisir librement le mode de ses funérailles. Néanmoins, cette loi, inspirée du courant libéral de l’époque, s’est heurtée, dans son application à la crémation, à l’opposition véhémente des autorités catholiques.
En effet, dès le 19 mai 1886, le pape Léon XIII avait clairement exprimé son veto en la condamnant, tout en rappelant "qu’il convenait d’enterrer les corps des défunts". Cette condamnation du Saint-Siège portera un coup d’arrêt au développement de la pratique crématiste en France, malgré l’amendement de la loi sur la liberté des funérailles, adopté également en 1886 par le Parlement. Seule la mouvance anticléricale soutiendra les efforts de quelques municipalités pour construire des crématoriums et encourager au nom de l’hygiène publique l’incinération.
2° - Une date importante : celle du 5 juillet 1963, lorsque le Vatican a consenti à autoriser la crémation, tout en exprimant sa préférence pour l’inhumation, cette position ayant lourdement pesé sur son développement. Cependant, dès la fin du XIXe siècle apparaissent en France les premiers crématoriums, d’abord celui du Père-Lachaise mis en service en 1889, tout comme celui de Rouen, puis ceux de Reims (1903), Marseille (1909), Lyon (1913), Strasbourg (1922).
3° - Le décret n° 76-435 du 18 mai 1976 a été, vraisemblablement, le point de départ du vaste mouvement de propagation de la crémation, dans la mesure où il a simplifié les démarches afférentes à la constitution des dossiers présentés aux maires, compétents pour délivrer les autorisations. En effet, l’alternative offerte aux personnes ayant qualité pour pourvoir aux funérailles, lors de l’expression de la demande de crémation auprès du maire compétent, de s’affranchir de l’obligation de produire les dernières volontés écrites du défunt, a libéré les consciences et levé les barrières entre générations qui formaient obstacle à la crémation. En d’autres termes, la volonté du défunt, qui devait précédemment être attestée, a été, à partir du 18 mai 1976, supposée sur la foi d’une simple déclaration.
Ce décret, qui a traité, également, les soins de conservation, les inhumations et exhumations, les transports de corps, notamment avant la mise en bière, ainsi que la crémation, peut, à juste titre, être considéré comme l’un des textes fondateurs de la réglementation funéraire contemporaine, d’autant plus que la notion de "personne habilitée à pourvoir aux funérailles" a été étendue à tous les types d’opérations, à l’exception des exhumations, pour lesquelles l’exigence de la manifestation du plus proche parent du défunt a été maintenue.
L’essor de la crémation est manifeste dès 1976, le taux antérieur de 3 % des défunts incinérés annuellement a rapidement franchi le cap des 10 % en 1980, pour atteindre, au fil du temps, près de 35 % dans les zones urbaines, soit une moyenne de 25 % par an en France, les sociologues prédisant le seuil des 50 % pour la moitié du XXIe siècle.
Le décret n° 98-635 du 20 juillet 1998 n’a fait qu’améliorer le dispositif de destination des cendres, en élargissant son éventail, dont notamment la possibilité de sceller les urnes cinéraires sur les monuments funéraires, puis en rebaptisant le terme "jardin du souvenir", créé par les autorités communales, gestionnaires des cimetières, par celui de "lieu spécifiquement affecté à l’effet de disperser les cendres".
4° - Le décret n° 2007-328 du 12 mars 2007 relatif à la protection des cendres funéraires, qui, à défaut d’accorder un véritable statut juridique aux cendres, comme le proposait le rapport de la commission sénatoriale animée par messieurs Lecerf et Sueur, c’est-à-dire leur étendre les protections afférentes aux restes d’une personne humaine, a néanmoins actualisé le décret du 18 mai 1976 en instituant deux types de formalités administratives :
- le régime de la déclaration auprès du maire de la commune du lieu de dépôt, d’inhumation de l’urne ou de la dispersion des cendres,
- celui, plus contraignant au plan juridique, de l’autorisation du maire, pour le dépôt ou l’inhumation de l’urne dans une propriété privée, la dispersion des cendres dans un cimetière ou dans un site cinéraire.
5° - La loi n° 2008-1350 du 19 décembre 2008 relative à la législation funéraire, publiée au Journal officiel de la République française le 20 décembre 2008, page 19538. Le Chapitre III, intitulé "Du statut et de la destination des cendres des personnes décédées dont le corps a donné lieu à crémation", a concrétisé les orientations préconisées par la commission sénatoriale, qui avaient donné lieu à l’adoption d’une proposition de loi, à l’unanimité des sénateurs, le 22 juin 2006.
Malgré quelques modifications initiées par l’Assemblée nationale, l’essentiel du texte soutenu par messieurs Lecerf et Sueur se retrouve dans la loi du 19 décembre 2008.
II - La loi du 19 décembre 2008 : son apport est important pour la crémation
En premier lieu, elle a octroyé un statut juridique aux cendres et a modifié, à cet effet, le Code civil.
a) L’art. 11 de la loi :
"Après l’article 16-1 du Code civil, il est inséré un art. 16-1-1 ainsi rédigé : Le respect dû au corps humain ne cesse pas avec la mort. Les restes des personnes décédées, y compris les cendres de celles dont le corps a donné lieu à crémation, doivent être traités avec respect, dignité et décence."
b) L’art. 12 de la loi :
"L’art. 16-2 du Code civil est complété par les mots : "y compris après la mort".
Rappel des articles 16-1 et 16-2 du Code civil :
- Art. 16 : "La loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie."
- Art. 16-1 : "Chacun a droit au respect de son corps. Le corps humain est inviolable.
Le corps humain, ses éléments et ses produits ne peuvent faire l’objet d’un droit patrimonial."
- Art. 16-2 : "Le juge peut prescrire toutes mesures propres à empêcher ou faire cesser une atteinte illicite au corps humain ou des agissements illicites portant sur les éléments ou des produits de celui-ci."
Il résulte de cette rédaction de l’art. 16 et alinéas suivants du Code civil que les cendres bénéficient d’une protection juridique qui a entraîné, nécessairement, la modification des règles antérieurement applicables à leur destination.
c) Cette évolution du statut juridique des cendres cinéraires a engendré une réforme du droit pénal, notamment, l’art. 13 de la loi, qui est ainsi rédigé :
"Au deuxième alinéa de l’art. 225-17 du Code pénal, après les mots : "de sépultures" sont insérés les mots "d’urnes cinéraires".
Rappel de l’art. 225-7 du Code pénal :
"Toute atteinte à l’intégrité du cadavre, par quelque moyen que ce soit, est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende. La violation ou la profanation, par quelque moyen que ce soit, de tombeaux, de sépultures (d’urnes cinéraires)(1) ou de monuments édifiés à la mémoire des morts est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende. La peine est portée à deux ans d’emprisonnement et à 30 000 € d’amende lorsque les infractions définies à l’alinéa précédent ont été accompagnées d’atteinte à l’intégrité du cadavre."
d) Sur la destination des cendres :
L’art. 16 de la loi du 19 décembre 2008 a introduit à la section I du chapitre III du titre II du livre II de la deuxième partie du même Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) une sous-section 3 ainsi rédigée :
Sous section 3 : "Destination des cendres" :
1° - L’art. L. 2223-18-1 du CGCT :
"Après la crémation, les cendres sont pulvérisées et recueillies dans une urne cinéraire munie extérieurement d’une plaque portant l’identité du défunt et le nom du crématorium. Dans l’attente d’une décision relative à la destination des cendres, l’urne cinéraire est conservée au crématorium pendant une période qui ne peut excéder un an. À la demande de la personne ayant qualité pour pourvoir aux funérailles, l’urne peut être conservée, dans les mêmes conditions, dans un lieu de culte, avec l’accord de l’association chargée de l’exercice du culte. Au terme de ce délai et en l’absence de la décision de la personne ayant qualité pour pourvoir aux funérailles, les cendres sont dispersées dans l’espace aménagé à cet effet du cimetière de la commune du lieu du décès ou dans l’espace le plus proche aménagé à cet effet visé à l’art. L. 2223-18-2."
2° - L’art. L. 2223-18-2 du CGCT :
"À la demande de la personne ayant qualité pour pourvoir aux funérailles, les cendres sont en leur totalité :
- soit conservées dans l’urne cinéraire, qui peut être inhumée dans une sépulture ou déposée dans une case de columbarium ou scellée sur un monument funéraire à l’intérieur d’un cimetière ou d’un site cinéraire, visé à l’article L. 2223-40 ; (2)
- soit dispersées dans un espace aménagé à cet effet d’un cimetière ou d’un site cinéraire visé à l’art. L. 2223-40 ;
- soit dispersées en pleine nature, sauf sur les voies publiques.
Ces dispositions, ainsi que nous le mentionnions dans notre "Traité de Législation et Réglementation Funéraire", nous paraissaient méconnaître la possibilité de se faire inhumer dans une propriété privée, faculté ouverte par l’art. L. 2223-9 du CGCT, puisqu’il est manifeste que, désormais, les cendres bénéficient des protections juridiques jusque-là reconnues seulement au corps humain. À cet égard, force est de constater que cette possibilité existe bien, puisqu’une récente circulaire dispense le préfet d’exiger une étude hydrogéologique préalable.
3° - L’art. L. 2223-18-3 du CGCT :
"En cas de dispersion des cendres en pleine nature, la personne ayant qualité pour pourvoir aux funérailles en fait la déclaration à la mairie de la commune du lieu de naissance du défunt. L’identité du défunt ainsi que la date et le lieu de dispersion de ses cendres sont inscrits sur un registre créé à cet effet."
4° - L’art. L. 2223-18-4 du CGCT :
"Le fait de créer, de posséder, d’utiliser ou de gérer, à titre onéreux ou gratuit, tout lieu collectif, en dehors d’un cimetière public ou d’un lieu de dépôt ou de sépulture autorisé, destiné au dépôt temporaire ou définitif des urnes ou à la dispersion des cendres, en violation du présent Code est puni d’une amende de 15 000 € par infraction. Ces dispositions ne sont pas applicables aux sites cinéraires créés avant le 31 juillet 2005."
Ces nouvelles dispositions, qui ont été adoptées définitivement par le parlement de la République française le 19 décembre 2008, après quasiment deux ans et demi de discussions, avaient fait l’objet, après le vote du Sénat du 22 juin 2006, de sérieuses critiques, notamment en ce qui concernait la destination des cendres, car la loi nouvelle supprimait toute possibilité de les conserver dans une propriété privée, alors que près de 75 % des familles sollicitaient la restitution des cendres, dont au moins la moitié les détenaient au domicile.
Le libéralisme qui avait présidé à l’édiction du décret du 18 mai 1976, peut-être critiquable à l’époque, n’en avait pas moins instauré des comportements devenus coutumiers. Cette loi a engendré, sur ce point, un phénomène de "retour en arrière" et de destruction des droits acquis, durant trente-deux ans d’application, qui n’ont pas manqué de mettre les familles devant de sérieuses difficultés, alors que parallèlement elle a imposé aux communes des obligations nouvelles qui ont nécessité des investissements, mais aussi des espaces suffisants pour aménager ou accroître les terrains dédiés à la dispersion des cendres.
Que penser également de la possibilité offerte de déposer les cendres dans un lieu de culte, en violation de l’interdiction de créer des sépultures dans les édifices où les citoyens se rencontrent pour célébrer leurs religions, disposition contraire, à notre sens, à la loi de séparation de l’Église et de l’État et au principe de neutralité des églises, synagogues, mosquées ou tout autre édifice cultuel ?
Nous avions, lors d’un article intitulé "Analyse et commentaires de la loi du 22 juin 2006, paru dans Résonance, n° 23, de septembre 2006", mis en exergue ces critiques, tout en reconnaissant que l’attribution d’un statut juridique aux cendres cinéraires, qui étaient jusqu’alors considérées comme des "res nullius" (choses nulles), constituait une avancée fondamentale et nécessaire.
III - L’autorisation de crémation : une exception maintenue par le décret n° 2011-121, du 28 janvier 2011 :
L’art. R. 2213-34 du CGCT expose :
"La crémation est autorisée par le maire de la commune du lieu de décès ou, s’il y a eu transport de corps, du lieu de la mise en bière. Cette autorisation est accordée sur les justifications suivantes :
1° L’expression écrite des dernières volontés du défunt ou, à défaut, la demande de toute personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles et justifie de son état civil et de son domicile.
2° Un certificat du médecin chargé par l’officier d’état civil de s’assurer du décès et affirmant que celui-ci ne pose pas de problème médico-légal.
3° Le cas échéant, l’attestation du médecin ou du thanatopracteur prévue au troisième alinéa de l’art. R. 2213-15.
Lorsque le décès pose un problème médico-légal, la crémation ne peut avoir lieu qu’après l’autorisation du parquet, qui peut subordonner celle-ci à une autopsie préalable, effectuée par un médecin légiste choisi sur la liste des experts et aux frais de la famille. Lorsque le décès a eu lieu à l’étranger, la crémation est autorisée par le maire de la commune où elle est pratiquée. L’autorisation de transport de corps prévue par un arrangement international tient lieu, dans ce cas, de certificat du médecin."
Nous avons toujours soutenu que ces dernières prescriptions étaient en fait inapplicables, car la réglementation française impose que, pour être incinéré, le corps du défunt doit être placé dans un cercueil en bois d’au moins 18 millimètres d’épaisseur ou confectionné dans un matériau entièrement sublimable, agréé par le ministère de la Santé. La présence d’un cercueil hermétique, alliée à l’interdiction d’ouvrir un cercueil tant qu’un délai de cinq ans ne s’est pas écoulé après la mise en bière et la fermeture du cercueil, rend impossible la crémation.
Tel est le sens des réponses fournies par le ministre de l’Intérieur, dont celle à l’égard de la question écrite du sénateur Masson, sauf, selon le ministère, la possibilité de solliciter l’accord du procureur de la République. Or, il n’existe, ni dans le Code pénal, ni dans le Code de procédure pénale, hormis les mesures tendant à rechercher judiciairement la cause d’un décès (mort suspecte), de compétences attribuées au parquet dans ce domaine, qui relèvent des actes de police administrative et non judiciaire. Sur ce point, force est d’admettre que la réglementation funéraire n’a toujours pas apporté de réponse concrète à un problème qui tend, désormais, à perdurer. Or, si l’on se réfère aux dispositions du décret du 18 mai 1976, les pratiques en matière de crémation des corps placés dans des cercueils hermétiques étaient tout autres.
Dans son ouvrage intitulé "Funérailles et Sépultures", Émile Martin n’écrivait-il pas ?
"Les corps à incinérer ne doivent pas être mis dans les cercueils habituellement employés pour les inhumations. Ils doivent être placés dans des cercueils en bois léger : peuplier, sapin, bouleau ou aulne rainé, chevillés en bois et sans clous rivés, et dont les dimensions seront au maximum : 2 m de long, 0,60 de large, 0,50 de haut.
Si le corps doit faire l’objet d’un transport, le cercueil en bois léger (on parlait alors de volige) doit avoir ses parois intérieures garnies de toile caoutchoutée ou de carton bitumé. En outre, ce premier cercueil sera renfermé dans un autre cercueil hermétique établi conformément à l’art. 9 du décret du 15 mars 1928 ou dans un cercueil en chêne de 27 millimètres d’épaisseur avec frettes en fer et garniture étanche, selon que le transport rentrera dans les cas prévus aux articles 7 et 8 du même décret (pour mémoire, transport hors commune et transport hors du territoire métropolitain)."
La solution au problème contemporain de la crémation des corps placés dans des cercueils hermétiques nous est fournie par l’ancienne réglementation. Pourquoi ne pas revenir simplement à l’utilisation d’un double cercueil, dont celui hermétique pourrait être ouvert afin de permettre l’extraction du cercueil en bois léger, sans manipulation du cadavre, comme cela s’opère au moins dans l’un des 140 crématoriums de France qui transige à sa manière avec la législation ?
La question méritait, à notre sens, d’être posée.
Les délais : ils sont déterminés à l’art. R. 2213-34 du CGCT :
"La crémation a lieu :
- lorsque le décès s’est produit en France, vingt-quatre heures au moins et six jours au plus après le décès ;
- lorsque le décès a eu lieu à l’étranger ou dans un territoire d’outre-mer, six jours au plus après l’entrée du corps en France.
Les dimanches et jours fériés ne sont pas compris dans le calcul de ces délais. Des dérogations aux délais prévus au premier alinéa peuvent être accordées, en raison de circonstances particulières, par le préfet du département du lieu de décès ou de la crémation, lequel prescrit éventuellement toutes dispositions nécessaires." (3)
Les observations formulées précédemment sur la portée des clauses afférentes aux délais octroyés pour la crémation, lors de l’entrée en France du corps, sont réitérées. Lorsque le lieu de crémation est différent de celui où a été effectuée la fermeture du cercueil.
L’art. R. 2213-36, dispose :
"Lorsque la crémation est faite dans une commune autre que celle où a été effectuée la fermeture du cercueil, l’autorisation de transport de corps est produite au maire de la commune du lieu de la crémation." La crémation des restes exhumés est en cohérence avec les règles applicables aux exhumations.
Selon l’art. R. 2213-37 du CGCT :
"La crémation des restes des corps exhumés est autorisée, à la demande du plus proche parent, par le maire de la commune du lieu de l’exhumation." Sur la notion de plus proche parent du défunt ayant qualité pour solliciter une exhumation en vue de la crémation du corps, les jurisprudences civile, en cas de conflit entre les membres d’une même famille, et administrative, dès lors que le litige oppose des particuliers au maire, ont dégagé un principe directeur constant :
La qualité de plus proche parent du défunt est attribuée à la personne qui a eu, avec le défunt, la durée de vie commune la plus longue, c’est-à-dire stable et permanente, ce qui lui aura permis de connaître, en l’absence de dernières volontés écrites, ses intentions en matière de sépulture. Ce faisant, les espèces sont nombreuses, les juridictions ayant même reconnu à un concubin la qualité de plus proche parent, du fait d’une communauté de vie ininterrompue jusqu’à la disparition du compagnon.
Le maire est néanmoins tenu de s’assurer de la qualité déclarée de "plus proche parent" et commet une faute dès lors qu’il aura failli à cette obligation : Cour administrative d’appel de Nantes, 30 septembre 1998, Commune de Chatelaudren, req . n° 96NTO1061. Le juge civil peut également désigner un administrateur commun à la demande d’une famille qui ne peut réunir les autorisations de l’ensemble des plus proches parents, dès lors que l’intérêt général le justifierait : CE, 17 octobre 1997, Ville de Marseille
c/consorts Guien, req. n° 167648.
Enfin, le conjoint, si la durée de vie commune est jugée insuffisante, peut se voir départir de sa qualité de plus proche parent au bénéfice des collatéraux de la défunte.
En outre, l’art. 21 de la loi n° 2008-1350 du 19 décembre 2008 prescrit, dans son art. 19, une nouvelle rédaction de l’art. L. 2223-4 du CGCT, concernant l’obligation pour les communes de disposer d’un ossuaire affecté à perpétuité dans un cimetière communal aux restes exhumés, tout autant que la crémation ne serait pas contraire aux volontés exprimées de leur vivant par les défunts. Il est ainsi mentionné : "Le maire peut également faire procéder à la crémation des restes exhumés en l’absence d’opposition connue, attestée ou présumée du défunt. Les restes des personnes qui avaient manifesté leur opposition à la crémation sont distingués au sein de l’ossuaire."
Ces nouvelles prescriptions s’appliquent aux exhumations administratives opérées par les communes soit à l’expiration de la durée de validité minimum des sépultures en terrain commun ou service ordinaire (cinq ans), soit lors des procédures de reprise des concessions non renouvelées à leur terme (art. L. 2223-14 du CGCT), soit des concessions perpétuelles. Telles sont les principales dispositions législatives et réglementaires qui ont jalonné le parcours du régime juridique de la crémation.
Les règles applicables au fil du temps ont certes évolué, mais cette progression s’est imposée en fonction des attentes des Françaises et Français qui, de plus en plus, ont adopté la technique de la crémation et y ont adhéré. En revanche, nous soumettons à l’examen des autorités publiques nationales la question de la crémation des corps placés dans des cercueils hermétiques, qui mérite, à notre sens, une résolution absolument indispensable, en se référant aux enseignements du passé.
Jean-Pierre Tricon
Résonance hors-série #1 - Spécial Crémation - Août 2015
Nota :
1* Conséquence de la nouvelle rédaction.
2* L’ordonnance n° 2005-855 du 28 juillet 2005 avait proscrit les sites cinéraires privés.
3* Le régime des dérogations aux délais prescrits est identique à celui applicable aux inhumations.
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