Une pratique pour les services publics municipaux facultatifs : crèches, restaurants scolaires, écoles de musique…
La mise en place, pour les services publics communaux, d’une tarification différenciée en fonction du domicile, s’avère une pratique développée, les élus tenant à offrir un accès privilégié aux personnes qui résident sur le territoire de la collectivité territoriale. L’idée poursuivie ici a trait au refus de faire financer deux fois un service public local par les usagers qui ont également la qualité de contribuables locaux. Alors que la légalité d’une telle pratique semblait a priori refusée par le Conseil d’État (CE, sect., 10 mai 1974, Denoyez et Chorques : Rec. CE, p. 274), elle a finalement été acceptée (CE, sect., 5 oct. 1984, commune de Lavelanet : Rec. CE 1984, p. 315) à la suite de l’intervention d’une décision du conseil constitutionnel (Déc. n° 79-107 DC du 12 juil. 1979 loi relative à certains ouvrages reliant les voies nationales ou départementales ; décision critiquée par une partie de la doctrine ; V. B. Seiller, Droit administratif - 2. L’action administrative : coll. Champs Université : Flammarion 2011, p. 66). Ce revirement a été opéré à propos d’une cantine scolaire et à cette occasion le juge administratif a reconnu la légalité d’une délibération mettant en place une tarification différenciée en fonction du domicile sur le fondement de l’égalité devant les charges publiques (le tarif le plus élevé ne doit pas dépasser le coût de revient réel ; CE 2 av. 1997, commune de Montgeron : Rec. CE p. 779).
La mise en place, pour les services publics communaux, d’une tarification différenciée en fonction du domicile, s’avère une pratique développée, les élus tenant à offrir un accès privilégié aux personnes qui résident sur le territoire de la collectivité territoriale. L’idée poursuivie ici a trait au refus de faire financer deux fois un service public local par les usagers qui ont également la qualité de contribuables locaux. Alors que la légalité d’une telle pratique semblait a priori refusée par le Conseil d’État (CE, sect., 10 mai 1974, Denoyez et Chorques : Rec. CE, p. 274), elle a finalement été acceptée (CE, sect., 5 oct. 1984, commune de Lavelanet : Rec. CE 1984, p. 315) à la suite de l’intervention d’une décision du conseil constitutionnel (Déc. n° 79-107 DC du 12 juil. 1979 loi relative à certains ouvrages reliant les voies nationales ou départementales ; décision critiquée par une partie de la doctrine ; V. B. Seiller, Droit administratif - 2. L’action administrative : coll. Champs Université : Flammarion 2011, p. 66). Ce revirement a été opéré à propos d’une cantine scolaire et à cette occasion le juge administratif a reconnu la légalité d’une délibération mettant en place une tarification différenciée en fonction du domicile sur le fondement de l’égalité devant les charges publiques (le tarif le plus élevé ne doit pas dépasser le coût de revient réel ; CE 2 av. 1997, commune de Montgeron : Rec. CE p. 779).
Une légalité douteuse au regard du droit de l’Union européenne
Comme le rappelle à juste titre Mme Martine Long ("Restauration scolaire" : JurisClasseur Collectivités territoriales, fasc. 700, § 95) : "La modulation tarifaire en fonction du domicile est aujourd’hui remise en question par la jurisprudence communautaire. La Cour de justice des communautés européennes a effectivement estimé dans un arrêt de 2003 (CJCE, 16 janv. 2003, aff. C-388/01, Comm. c/ Rép. italienne) que la mise en place d’un tarif préférentiel pour les résidents communaux en matière d’accès à un musée local est contraire à la libre circulation des services et au principe de non-discrimination".
Illégalité pour un crématorium
Bien qu’évoquée de façon indirecte, la question de l’illégalité d’un tarif préférentiel pour les habitants en matière de crémation est nécessairement confirmée tant par le juge du tribunal administratif que par celui de la cour administrative d’appel. Certes, il s’agit d’un service public facultatif, mais il convient d’observer, d’une part, que c’est un service public industriel et commercial, qui doit normalement faire couvrir le prix du service par les redevances des usagers (contrairement à un service public administratif qui peut fonctionner "à perte"). D’autre part, s’agissant d’un service délégué, il est difficilement compréhensible d’arguer un double financement par les contribuables locaux ; à l’exception de la volonté de favoriser ses habitants, on recherche vainement une différence objective entre les habitants de la commune du site d’implantation du crématorium et les autres usagers.
Solution identique à celle retenue pour les concessions funéraires
Il importe enfin de rappeler qu’une solution identique avait été adoptée à propos des tarifs des concessions funéraires du cimetière communal ; en effet, le juge refuse toutefois que les communes instituent un "droit d’entrée" en augmentant le prix de la concession pour les personnes non domiciliées sur leur territoire (CE, 10 déc. 1969, commune de Nerville-la-Forêt : Rec. CE 1969, p. 564).
Damien Dutrieux,
consultant au CRIDON Nord-Est, maître de conférences associé à l’Université de Lille 2.
Annexe CAA Bordeaux, 13 juillet 2011, n° 10BX01939, Société des crématoriums de France (...) Considérant que la Société des Crématoriums de France soutient enfin que le tribunal a commis une erreur de droit en retenant l’illégalité de la clause figurant à l’article 19 de la convention sans en déduire l’illégalité de l’ensemble de la procédure ni prononcer l’annulation totale des décisions attaquées ; que toutefois, il ressort du rapport présenté au conseil municipal du 4 nov. 2004 que si le maire a indiqué que la société Assistance Conseil Funéraire proposait des tarifs préférentiels pour les habitants de Montauban, elle n’en a pas fait un motif déterminant du choix proposé, qui relève essentiellement de la qualité du projet architectural de la société Assistance Conseil Funéraire, du coût de l’investissement et des conditions de l’équilibre du contrat, la société Assistance Conseil Funéraire ne prévoyant pas de déficit, au contraire de la Société des Crématoriums de France, alors même que l’estimation du nombre de crémations par cette dernière est plus élevé ; que dans ces conditions, la Société des Crématoriums de France n’est pas fondée à soutenir que la clause tarifaire illégale figurant au cinquième alinéa de l’art. 19 du contrat, aux termes de laquelle à l’issue d’une période de douze mois d’activité le délégataire proposera à l’autorité délégante un tarif préférentiel pour les Montalbanais, qui n’avait au demeurant fait l’objet d’aucune intégration dans les prévisions de recettes comme en témoigne la progression constante de la recette unitaire figurant dans les tableaux annexés à ladite convention, aurait dû être regardée comme ayant principalement conduit au choix du délégataire ; qu’en l’absence de toute incidence sur l’équilibre du contrat de cette clause, qui n’avait au demeurant reçu aucune application à la date à laquelle le tribunal administratif a statué, celui-ci n’a pas inexactement apprécié la portée de l’irrégularité qu’il constatait ; (...) |
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