Le Code général des collectivités territoriales (CGCT) regroupe sous une même section les dispositions afférentes à la police des opérations funéraires et des lieux de sépultures
(art. L. 2213-7 à L. 2213-15 et R. 2213-2 à R. 2213-57). Cette section, intitulée "Police des funérailles et des lieux de sépulture", a réuni des textes jusqu’alors dispersés dans le Code des communes. Si cette dispersion pouvait faire douter de la qualification de police générale ou spéciale qu’il convenait de lui conférer, la qualification de police spéciale paraît s’imposer, bien que les buts fixés soient en très grande partie ceux de la police générale (M.-T. Viel, Droit funéraire et gestion des cimetières : coll. "Administration locale", 2e éd. Berger-Levrault 1999, p. 277). Cette police est confiée au maire (art. L. 2213-8), le préfet devant, à défaut d’intervention du maire, pourvoir à ce que toute personne décédée soit ensevelie et inhumée décemment (art. L. 2213-7).
Les objets du pouvoir de police
L’art. L. 2213-9 du CGCT énumère des objets sur lesquels porte ce pouvoir de police. Sont visés : le mode de transport des personnes décédées, le maintien de l’ordre et de la décence dans les cimetières, les inhumations et les exhumations. L’art. L. 2213-10 du Code, quant à lui, soumet à la police des maires les lieux de sépulture autres que les cimetières (cimetières des congrégations, sépulture établie sur une propriété privée, par exemple). S’ajoute enfin la prise en charge des obsèques des personnes décédées sur le territoire de la commune dans l’hypothèse où aucune famille n’y pourvoit (art. L. 2213-7 et L. 2223-27).
La diversité de ces objets explique la redondance (art. L. 2213-7, L. 2213-9, L. 2213-12 et L. 2213-13) avec laquelle le CGCT exprime l’obligation de neutralité de l’intervention municipale (liée au respect du caractère religieux ou civil donné aux funérailles et la nécessité de respecter la volonté du défunt). En effet, le maire se voit interdire "d’établir des distinctions ou des prescriptions particulières à raison des croyances ou du culte du défunt ou des circonstances qui ont accompagné sa mort" (art. L. 2213-9).
La police du cimetière " absorbe " les pouvoirs de gestion de cet espace
Avec l’arrêt "Cauchoix", le juge administratif a procédé à une extension des pouvoirs de police du cimetière du maire au détriment de la compétence en matière de gestion de cette parcelle du domaine public (CE, 20 fév. 1946, Cauchoix : Rec. CE 1946, p. 53). Dès lors, les pouvoirs de police englobent ce qu’il conviendrait de qualifier de pouvoirs de gestion du domaine public en dehors de cet espace public particulier qu’est le cimetière. Certains auteurs expliquent cet élargissement de compétence au profit du maire par la nécessité, pour le juge, de protéger la liberté des particuliers dans le cimetière et le droit que ceux-ci possèdent d’honorer leurs morts. En effet, dans le cadre de ses pouvoirs de police, le maire est limité par leur objet - maintien de l’ordre, neutralité et décence - alors que la gestion d’une parcelle du domaine public permet de se fixer d’autres objectifs d’intérêt général (cf. notamment, M.-T. Viel, ouvrage précité, p. 272).
Obligation générale de surveillance
L’existence de ce pouvoir de police induit une obligation générale de surveillance du cimetière. Selon le ministre de l’Intérieur : "La surveillance des cimetières étant une mission de police administrative dévolue au maire, la facturation de cette surveillance par le personnel communal aux entreprises effectuant des opérations de fossoyage ne saurait pouvoir être envisagée" (Rép. min. n° 4730 : JO Sénat Q, 19 fév. 1998, p. 598). À ce titre, le maire doit s’assurer du bon état des sépultures et mettre en demeure les titulaires des concessions dont le mauvais état constitue un risque pour l’hygiène ou la sécurité du cimetière, d’effectuer les travaux nécessaires. 2 réserves existent. Tout d’abord, l’exécution d’office ne peut être justifiée que par l’urgence (CE, 11 juil. 1913, de Chasteignier, Mure et Favreau : Rec. CE 1913, p. 832). À défaut, le juge administratif - juge du contrat que constitue la concession funéraire - devra être saisi.
Surveillance et responsabilité
Cette obligation de surveillance explique que le juge administratif va engager dans certains cas la responsabilité de la commune pour la réparation d’un préjudice résultant de la ruine d’un monument funéraire (CE, 19 oct. 1966, commune Clermont [Oise] : Rec. CE 1966, p. 550, en l’espèce la ruine du monument était due non à sa vétusté mais au défaut de surveillance).
De même, la surveillance doit porter sur les travaux exécutés par les concessionnaires. La responsabilité de la commune peut être mise en cause en raison de l’empiétement sur une concession par une construction édifiée sur une concession voisine, dès lors qu’il est établi que la commune n’avait pas surveillé ces travaux (CAA Nancy, 2 juil. 1991, n° 89NC01389 et 89NC01394, Consorts Tahir, Émilienne Debarge-Verqueren).
Par ailleurs, concernant la responsabilité de la commune en matière de vols dans le cimetière, il convient de relever la réponse apportée par le tribunal administratif de Marseille qui, dans son jugement du 8 juin 2004, démontre une approche pragmatique du juge et, fort heureusement, ne donne pas à l’obligation de surveillance du maire le caractère d’une obligation de résultat (TA Marseille, 8 juin 2004, G. c/ Ville Marseille : Collectivités-Intercommunalité 2004, comm. 249, note D. Dutrieux). La commune parvient à faire rejeter la requête en démontrant qu’étaient instituées des mesures destinées à assurer la surveillance du cimetière, ces mesures étant considérées comme suffisantes eu égard aux circonstances (J.-P. Tricon, ancien directeur des opérations funéraires de la ville de Marseille, rappelait que la ville de Marseille compte 21 cimetières et que le cimetière de Saint-Pierre connaît une superficie qui voisine les 63 ha [seconde nécropole de France par sa taille] ; V. Funéraire Magazine 2004, n° 149, p. 24). La commune n’est donc pas responsable des vols dans le cimetière si elle démontre que des mesures de prévention adaptées aux circonstances locales avaient été prises.
Dégâts causés par la chute d’un monument funéraire
À noter également que la commune ne peut être responsable des dégâts causés par la chute d’un monument funéraire, dès lors que n’est pas démontrée une faute commise dans l’exercice du pouvoir de police et consistant notamment dans la connaissance du descellement du monument non suivie de mesures de protection (CAA Nancy, 13 janv. 2005, n° 02NC00427, X c/ ville Nancy. - V. également TA Nancy, 22 janv. 2002, Gille c/ ville Nancy : Collectivités-Intercommunalité 2002, comm. 121, note J. Moreau) ; il s’agit en effet d’abord d’un litige d’ordre privé (responsabilité des dommages causés par un immeuble ; art. 1386 du Code civil) entre 2 concessionnaires de sépulture ou 1 concessionnaire de sépulture et 1 usager du cimetière (CA Rennes, 6 mars 2002, Le Mann c/ Benjamin Parchemin. - V. également E. Boehler, De la réparation du dommage causé par la ruine d’un monument funéraire : LPA 2 novembre 1990, p. 4).
Une circulaire du ministère de l’Intérieur du 11 janv. 2005 est venue rappeler les moyens juridiques et techniques à la disposition des maires pour assurer la protection des lieux de sépulture ainsi que le dispositif pénal permettant la répression des actes de profanation (V. texte reproduit : Collectivités-Intercommunalité 2005, comm. 52, note D. Dutrieux. - V. également T. Dubaele, Le racisme dans les cimetières : La Lettre du Funéraire 2005, n° 4, p. 2).
(art. L. 2213-7 à L. 2213-15 et R. 2213-2 à R. 2213-57). Cette section, intitulée "Police des funérailles et des lieux de sépulture", a réuni des textes jusqu’alors dispersés dans le Code des communes. Si cette dispersion pouvait faire douter de la qualification de police générale ou spéciale qu’il convenait de lui conférer, la qualification de police spéciale paraît s’imposer, bien que les buts fixés soient en très grande partie ceux de la police générale (M.-T. Viel, Droit funéraire et gestion des cimetières : coll. "Administration locale", 2e éd. Berger-Levrault 1999, p. 277). Cette police est confiée au maire (art. L. 2213-8), le préfet devant, à défaut d’intervention du maire, pourvoir à ce que toute personne décédée soit ensevelie et inhumée décemment (art. L. 2213-7).
Les objets du pouvoir de police
L’art. L. 2213-9 du CGCT énumère des objets sur lesquels porte ce pouvoir de police. Sont visés : le mode de transport des personnes décédées, le maintien de l’ordre et de la décence dans les cimetières, les inhumations et les exhumations. L’art. L. 2213-10 du Code, quant à lui, soumet à la police des maires les lieux de sépulture autres que les cimetières (cimetières des congrégations, sépulture établie sur une propriété privée, par exemple). S’ajoute enfin la prise en charge des obsèques des personnes décédées sur le territoire de la commune dans l’hypothèse où aucune famille n’y pourvoit (art. L. 2213-7 et L. 2223-27).
La diversité de ces objets explique la redondance (art. L. 2213-7, L. 2213-9, L. 2213-12 et L. 2213-13) avec laquelle le CGCT exprime l’obligation de neutralité de l’intervention municipale (liée au respect du caractère religieux ou civil donné aux funérailles et la nécessité de respecter la volonté du défunt). En effet, le maire se voit interdire "d’établir des distinctions ou des prescriptions particulières à raison des croyances ou du culte du défunt ou des circonstances qui ont accompagné sa mort" (art. L. 2213-9).
La police du cimetière " absorbe " les pouvoirs de gestion de cet espace
Avec l’arrêt "Cauchoix", le juge administratif a procédé à une extension des pouvoirs de police du cimetière du maire au détriment de la compétence en matière de gestion de cette parcelle du domaine public (CE, 20 fév. 1946, Cauchoix : Rec. CE 1946, p. 53). Dès lors, les pouvoirs de police englobent ce qu’il conviendrait de qualifier de pouvoirs de gestion du domaine public en dehors de cet espace public particulier qu’est le cimetière. Certains auteurs expliquent cet élargissement de compétence au profit du maire par la nécessité, pour le juge, de protéger la liberté des particuliers dans le cimetière et le droit que ceux-ci possèdent d’honorer leurs morts. En effet, dans le cadre de ses pouvoirs de police, le maire est limité par leur objet - maintien de l’ordre, neutralité et décence - alors que la gestion d’une parcelle du domaine public permet de se fixer d’autres objectifs d’intérêt général (cf. notamment, M.-T. Viel, ouvrage précité, p. 272).
Obligation générale de surveillance
L’existence de ce pouvoir de police induit une obligation générale de surveillance du cimetière. Selon le ministre de l’Intérieur : "La surveillance des cimetières étant une mission de police administrative dévolue au maire, la facturation de cette surveillance par le personnel communal aux entreprises effectuant des opérations de fossoyage ne saurait pouvoir être envisagée" (Rép. min. n° 4730 : JO Sénat Q, 19 fév. 1998, p. 598). À ce titre, le maire doit s’assurer du bon état des sépultures et mettre en demeure les titulaires des concessions dont le mauvais état constitue un risque pour l’hygiène ou la sécurité du cimetière, d’effectuer les travaux nécessaires. 2 réserves existent. Tout d’abord, l’exécution d’office ne peut être justifiée que par l’urgence (CE, 11 juil. 1913, de Chasteignier, Mure et Favreau : Rec. CE 1913, p. 832). À défaut, le juge administratif - juge du contrat que constitue la concession funéraire - devra être saisi.
Surveillance et responsabilité
Cette obligation de surveillance explique que le juge administratif va engager dans certains cas la responsabilité de la commune pour la réparation d’un préjudice résultant de la ruine d’un monument funéraire (CE, 19 oct. 1966, commune Clermont [Oise] : Rec. CE 1966, p. 550, en l’espèce la ruine du monument était due non à sa vétusté mais au défaut de surveillance).
De même, la surveillance doit porter sur les travaux exécutés par les concessionnaires. La responsabilité de la commune peut être mise en cause en raison de l’empiétement sur une concession par une construction édifiée sur une concession voisine, dès lors qu’il est établi que la commune n’avait pas surveillé ces travaux (CAA Nancy, 2 juil. 1991, n° 89NC01389 et 89NC01394, Consorts Tahir, Émilienne Debarge-Verqueren).
Par ailleurs, concernant la responsabilité de la commune en matière de vols dans le cimetière, il convient de relever la réponse apportée par le tribunal administratif de Marseille qui, dans son jugement du 8 juin 2004, démontre une approche pragmatique du juge et, fort heureusement, ne donne pas à l’obligation de surveillance du maire le caractère d’une obligation de résultat (TA Marseille, 8 juin 2004, G. c/ Ville Marseille : Collectivités-Intercommunalité 2004, comm. 249, note D. Dutrieux). La commune parvient à faire rejeter la requête en démontrant qu’étaient instituées des mesures destinées à assurer la surveillance du cimetière, ces mesures étant considérées comme suffisantes eu égard aux circonstances (J.-P. Tricon, ancien directeur des opérations funéraires de la ville de Marseille, rappelait que la ville de Marseille compte 21 cimetières et que le cimetière de Saint-Pierre connaît une superficie qui voisine les 63 ha [seconde nécropole de France par sa taille] ; V. Funéraire Magazine 2004, n° 149, p. 24). La commune n’est donc pas responsable des vols dans le cimetière si elle démontre que des mesures de prévention adaptées aux circonstances locales avaient été prises.
Dégâts causés par la chute d’un monument funéraire
À noter également que la commune ne peut être responsable des dégâts causés par la chute d’un monument funéraire, dès lors que n’est pas démontrée une faute commise dans l’exercice du pouvoir de police et consistant notamment dans la connaissance du descellement du monument non suivie de mesures de protection (CAA Nancy, 13 janv. 2005, n° 02NC00427, X c/ ville Nancy. - V. également TA Nancy, 22 janv. 2002, Gille c/ ville Nancy : Collectivités-Intercommunalité 2002, comm. 121, note J. Moreau) ; il s’agit en effet d’abord d’un litige d’ordre privé (responsabilité des dommages causés par un immeuble ; art. 1386 du Code civil) entre 2 concessionnaires de sépulture ou 1 concessionnaire de sépulture et 1 usager du cimetière (CA Rennes, 6 mars 2002, Le Mann c/ Benjamin Parchemin. - V. également E. Boehler, De la réparation du dommage causé par la ruine d’un monument funéraire : LPA 2 novembre 1990, p. 4).
Une circulaire du ministère de l’Intérieur du 11 janv. 2005 est venue rappeler les moyens juridiques et techniques à la disposition des maires pour assurer la protection des lieux de sépulture ainsi que le dispositif pénal permettant la répression des actes de profanation (V. texte reproduit : Collectivités-Intercommunalité 2005, comm. 52, note D. Dutrieux. - V. également T. Dubaele, Le racisme dans les cimetières : La Lettre du Funéraire 2005, n° 4, p. 2).
Damien Dutrieux
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