I - Proposition de loi n° 656 Visant à permettre aux personnes désirant des obsèques civiles d’avoir le droit à une cérémonie dans un lieu décent, déposée par Michel Sapin et Jean-Marc Ayrault. Enregistrée à la présidence de l’Assemblée nationale le 29 janvier 2008. La loi de 1905 a consacré le principe de séparation des Églises et de l’État. La République française repose sur le principe de la laïcité où chacun est libre de ses convictions. À ce jour, de plus en plus de personnes ne souhaitent pas avoir d’obsèques religieuses et sont enterrées civilement. Mais, famille et proches ne se recueillent qu’au cimetière ou à la morgue. En vertu de la loi du 9 décembre 1905, les communes sont propriétaires des édifices religieux existant avant cette date et en assurent la défense et la conservation. Ces biens appartiennent au domaine public de la commune, et chaque habitant peut en disposer et contribue via l’impôt à son entretien. Alors que les relations entre l’État et les religions sont clarifiées, il semble nécessaire de permettre aux personnes laïques d’organiser, dans des conditions décentes, les cérémonies importantes de leur vie. S’agissant de la naissance et du mariage, les choses sont parfaitement organisées. Pour les obsèques, rien n’est vraiment prévu. Lorsque le défunt n’est pas enterré religieusement, il est difficile d’organiser une cérémonie dans des conditions décentes. La présente proposition de loi a pour objectif de garantir une égalité de traitement entre les personnes désirant des obsèques religieuses et celles désirant des obsèques civiles. Ainsi, comme de nombreuses communes le pratiquent déjà, il est prévu d’inscrire dans le CGCT l’obligation pour les communes de mettre à disposition une salle communale, afin que la famille du défunt puisse organiser une cérémonie dans des conditions convenables.
II - Proposition de loi Art. 1er L’art. L. 2223-1 du CGCT est complété par un alinéa ainsi rédigé : "Chaque commune met gratuitement à la disposition des familles qui le demandent une salle municipale remplissant toutes les conditions sanitaires et de sécurité nécessaires, pour leur permettre d’honorer la mémoire d’un défunt résidant dans cette commune au moment de son décès." Art. 2 Les charges qui pourraient résulter de l’application de la présente loi pour les collectivités territoriales sont compensées, à due concurrence, par le relèvement de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement, pour l’État par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus par les articles 575 et 575 A du Code général des impôts.
II - Proposition de loi n° 3807 Instituant des funérailles républicaines, présentée par Mme Paulette Guinchard. Enregistrée à l’Assemblée nationale le 23 mai 2007. Mesdames, Messieurs, Consciente que la mort est un événement difficile à appréhender, surtout dans nos sociétés sécularisées, la présente proposition de loi tend à améliorer les rapports de la société à la mort en instituant des "funérailles républicaines" pour ceux qui le souhaitent. Ces funérailles républicaines ont pour vocation première de remédier à l’absence de rites républicains lors de la cérémonie des obsèques – cérémonie qui nous concerne tous un jour, et ce, quelle que soit sa forme. La République française se doit de prévoir un rite propre pour commémorer la mort de ses citoyens. En tout état de cause, c’est la volonté de décomplexer le rapport à la mort, d’atténuer son côté tabou, qui nous anime dans cette initiative législative. Longtemps gouverné par le droit canonique, le droit des funérailles a été grandement marqué par la tradition chrétienne et ses rites propres. Il a pourtant largement évolué depuis la fin du XIXe siècle. Le grand intérêt de la loi du 15 novembre 1887 sur la liberté des funérailles (modifiée par la loi no 96-142 du 21 février 1996) réside dans la possibilité offerte à tout individu de choisir la forme et les rites de son inhumation (art. 3). Cette loi est en effet intervenue pour permettre aux défunts d’être inhumés, non plus obligatoirement selon des rites religieux mais de manière civile. La sécularisation à l’œuvre sous la IIIe République a donc permis à un individu athée ou agnostique de ne pas se faire inhumer selon des rites qu’il n’aurait pas choisis de son vivant. La liberté de conscience s’en est trouvée renforcée jusque dans la mort. Toutefois, si le concile de Vatican II a considérablement simplifié les rites catholiques des funérailles, il demeure que seules les funérailles religieuses – qui représentent 70 % des obsèques en Europe occidentale – ont un aspect vraiment solennel. En revanche, les funérailles civiles ne sont assurées que par un employé de l’opérateur des pompes funèbres choisi, et par un proche du défunt, qu’il soit ou non de la famille. Ceux-ci veillent au bon déroulement des funérailles, dans ses aspects les plus divers : éloge funèbre, discours et éventuellement recours à des procédés audiovisuels. Parfois, dans les grandes villes, la municipalité aménage un local qu’elle met à disposition de la famille. Parfois encore, c’est l’opérateur de pompes funèbres qui met une salle à disposition, mais, s’agissant alors d’une prestation supplémentaire, celle-ci est facturée. Pour le reste, les cérémonies se déroulent en plein air, dans les cimetières ou dans une salle adjacente au crématorium en cas de crémation. On assiste parfois même au regroupement des proches sur les parkings des lieux d’inhumation ou de crémation. La famille et les proches sont livrés à eux-mêmes et se sentent souvent abandonnés. Il n’y a donc pas de solennité institutionnelle dans les funérailles civiles. Les objectifs de la présente proposition de loi sont donc de renforcer le principe de liberté des funérailles et de rétablir la dignité de la personne humaine. La liberté des funérailles est accentuée puisque la présente proposition vise à introduire un droit nouveau en matière de droit des funérailles, se situant ainsi dans la continuité de la loi du 15 novembre 1887. Elle permettra à l’individu d’être inhumé ainsi qu’il l’a souhaité par voie testamentaire ou que ses ayants droit en ont manifesté la volonté au moment de l’organisation des obsèques : par des rites religieux ; – par des rites civils sans présence officielle (c’est-à-dire sans représentant de la commune), comme cela existe déjà pour les funérailles civiles ; – ou bien par des rites dits "républicains", c’est-à-dire avec la présence officielle d’un représentant de la commune. Cette présence permet, dans le cas où elle aurait été expressément souhaitée, de rétablir une certaine forme de solennité dans les obsèques civiles, notamment par la lecture d’un éloge funèbre. Il s’agit en fait de donner la possibilité à tout individu de s’en aller après un dernier salut officiel de la nation. On peut encore soutenir que l’existence du baptême républicain, même si ce dernier n’a qu’une valeur coutumière, peut justifier la mise en place d’obsèques civiles républicaines tout à fait officielles. L’intervention de la loi permettrait d’offrir cette possibilité à tout citoyen qui le souhaite sans que la concrétisation de ce souhait ne dépende du choix personnel du maire de la commune, comme c’est le cas pour obtenir un baptême républicain. Enfin, de telles dispositions existent déjà à l’étranger : ainsi, le Code administratif luxembourgeois prévoit la présence "d’un représentant de la commune ou de l’échevinage" au moment des funérailles civiles et la lecture d’un éloge funèbre par ce dernier (arrêté du gouverneur général du 20 août 1814, toujours en vigueur). Dans un deuxième temps, la proposition tend à rétablir la dignité de la personne humaine par la République française concernant certaines personnes qui, au moment de leurs obsèques, en sont privées. En effet, si le degré de solennité dans les funérailles est fonction de l’implication des familles dans leur organisation, certains défunts sont, dans les faits, inhumés avec un réel manque de dignité, que ce soit pour des raisons sociales ou familiales. Le phénomène de "désaffiliation" – au sens de Robert Castel – ou d’abandon des personnes âgées conduit à des situations dramatiques : des individus meurent dans un quasi-anonymat ; leur inhumation passe inaperçue. La canicule de 2003 fut assez dramatique pour que le problème devienne une question de société. Ce manque de dignité est insupportable dans un pays qui place la dignité de la personne humaine au centre de ses valeurs. L’individu qui n’aura pu prévoir ses obsèques faute de moyens, de famille ou de proches, pourra alors compter sur la nation pour lui assurer la dignité qui convient à toute cérémonie d’enterrement ou de crémation. Notre proposition vient en renfort de l’art. 2213-7 du CGCT, qui prévoit que "le maire ou à défaut le représentant de l’État dans le département pourvoit d’urgence à ce que toute personne décédée soit ensevelie ou inhumée décemment sans distinction de culte ni de croyance". Instituer des funérailles républicaines à coté des funérailles religieuses, sans préjudice du maintien des funérailles civiles existantes, serait donc un progrès dans la reconnaissance de la dignité de la personne humaine et le renforcement des liens qui unissent le citoyen à la République. Il vous est donc demandé, Mesdames et Messieurs, d’adopter la proposition de loi suivante.
III - Proposition de loi Art. 1er Après l’art. L. 2213-7 du CGCT, il est inséré un art. L. 2213-7-1 ainsi rédigé : "Art. L. 2213-7-1. – Chaque commune garantit l’organisation de funérailles républicaines. Les funérailles républicaines consistent en la présence d’un représentant de la commune lors de la cérémonie des obsèques. "L’organisation de funérailles républicaines intervient conformément à la volonté du défunt ou, à défaut, de ses ayants droit. "En l’absence d’organisation des funérailles par le défunt ou ses ayants droit, le représentant de la commune intervient au nom de la République pour rétablir, par sa présence, la dignité due à tout défunt, ainsi qu’à toute cérémonie de funérailles. "Les communes équipées de lieux d’inhumation et de crémation mettent à la disposition des proches du défunt une salle qui leur permettra de se recueillir dans des conditions décentes lors de la cérémonie, et ce, s’ils en font la demande expresse." Art. 2 Après l’art. 3 de la loi du 15 novembre 1887 sur la liberté des funérailles, il est rétabli un art. 4 ainsi rédigé : "Si le défunt a de son vivant manifesté le vœu qu’un représentant de la commune de son lieu de résidence habituelle soit présent à ses funérailles, la municipalité délègue un de ses représentants pour assurer, lors des rites civils, une présence officielle conformément à l’art. L. 2213-7-1 du CGCT. "Dans le cas où le défunt n’aurait pas prévu de son vivant les conditions formelles ou rituelles de son inhumation, ses ayants droit conservent la faculté de les fixer et, le cas échéant, de prévoir des funérailles républicaines prévues à l’art. L. 2213-7-1 du CGCT. "Si, de son vivant, le défunt n’a pas prévu les conditions de son inhumation, qu’il n’a pas d’ayants droit ou que ceux-ci ne se manifestent pas, les dispositions de l’art. L. 2213-7-1 du CGCT s’appliquent." Les funérailles républicaines : un acte républicain au service des citoyens qui n’appelle pas de participation financière. Avec la proposition du groupe socialiste du 9 décembre dernier, les funérailles républicaines sont désormais codifiées et installées. Désormais, chaque commune disposant d’une salle municipale adaptée met celle-ci gratuitement à disposition des familles qui le demandent et garantit ainsi l’organisation de funérailles républicaines. Sans pour autant constituer une obligation pour les communes et tout en reposant sur le volontariat des familles, le concept de funérailles républicaines est scellé. Peut-être verra-t-on apparaître un nouveau profil de métier dans les communes : "le maître de cérémonie républicaine" !
Nous reproduisons, ci-dessous, le texte intégral de la proposition de loi : "Les familles confrontées au deuil sollicitent de plus en plus les mairies pour l’organisation de cérémonies civiles. En effet, les citoyens qui ne se réclament d’aucune religion se trouvent démunis et attendent de notre République qu’elle leur offre des perspectives pour accompagner leurs morts. Organiser un dernier hommage au défunt autour d’un rituel funèbre civil peut être un apaisement pour la famille par la solennité qui s’en dégage et le soutien apporté. La loi du 9 décembre 1905 a consacré le principe de séparation entre l’Église et l’État ainsi que la liberté de conscience et de pratique cultuelle. La cérémonie civile ou laïque concerne les personnes ne souhaitant pas intégrer d’aspects religieux lors des obsèques du défunt. Jusqu’alors, seules les pompes funèbres jouaient un rôle clef dans ce type de cérémonie. La République française se doit de prendre en charge, comme elle le fait pour les naissances, les mariages, voire les parrainages civils, un rite propre pour commémorer la mort de ses citoyens. Chaque municipalité devrait être en capacité d’intervenir pour assurer un moment de recueillement auprès du défunt, même en l’absence de cérémonie religieuse. Cet acte républicain est un service aux citoyens qui n’appelle pas de participation financière. La présente proposition de loi vise donc à assurer la prise en charge civile des obsèques permettant à cet évènement de se dérouler dans les meilleures conditions et de répondre aux besoins exprimés par de très nombreuses familles."
IV - Proposition de loi Article unique I. – L’art. L. 2223-1 du CGCT est complété par un alinéa ainsi rédigé : "Chaque commune, dès lors qu’elle dispose d’une salle municipale adaptée, met celle-ci gratuitement à disposition des familles qui le demandent et garantit ainsi l’organisation de funérailles républicaines qui leur permettront de se recueillir. À la demande de la famille du défunt, un représentant de la commune, officier d’état civil, procède à une cérémonie civile." II. – La charge pour les collectivités territoriales est compensée, à due concurrence, par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du Code général des impôts."
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