Damien Dutrieux, consultant au CRIDON Nord-Est, maître de conférences associé à l’Université de Lille 2.
Interrogé par le sénateur Jean-Louis Masson, le ministre de l’Intérieur rappelle le principe du caractère onéreux des concessions funéraires, l’impossibilité d’une concession sans titre, mais aussi la faculté pour la commune de régulariser, pour l’avenir, les situations illégales.
Pas de concession funéraire sans titre
Le juge administratif a clairement précisé, à plusieurs reprises (v. par exemple CAA Douai 31 mai 2012, n° 11DA00776 : JCP A, n° 36, 10 septembre 2012, 2288, p. 18, note D. Dutrieux), qu’il ne peut exister une concession funéraire sans qu’un titre ait été régulièrement établi.
Cette question est importante lorsqu’il s’agit d’analyser les obligations de la commune en cas de translation de cimetière (puisque la commune doit déplacer à ses frais les corps présents dans les concessions et accorder une sépulture de mêmes dimensions dans le nouveau cimetière ; CAA Nantes, 23 mars 2004, n° 01NT01986, Commune de Loctudy : "Collectivités-Intercommunalité" 2004, comm. 174, obs. D. Dutrieux), ou les droits sur la concession, peu importe d’ailleurs l’existence de plusieurs inhumations et l’érection d’un monument sur la sépulture (CAA Nancy, 28 septembre 2006, n° 05NC00285), voire la légalité d’une procédure de reprise des tombes en terrain commun (CAA Marseille, 10 mars 2011, n° 09MA00288, Annie Piperno ; arrêt cité dans la réponse du ministre de l’Intérieur reproduite ci-contre).
Régularisation possible
À défaut de titre, les familles ne disposent d’aucun droit sur les terrains mis à leur disposition, qui seront repris par la commune pour d’autres inhumations, à l’issue d’un délai de rotation (dont le minimum est fixé à cinq années mais qui peut être augmenté en fonction de l’avis donné par l’hydrogéologue lors de la création du cimetière).
Étonnamment, le ministre évoque une régularisation possible de la situation par l’établissement d’une concession funéraire postérieurement à l’inhumation dans ce qui, juridiquement, doit s’analyser comme une sépulture en terrain commun. Or, le ministre ne précise pas qui doit établir cette concession (puisqu’il vise la commune et emploie, dans sa réponse, un "elle" qui ne peut concerner a priori le maire), et il peut sembler découler de cette réponse que le maire demeure compétent.
Néanmoins, le maire n’est a priori délégataire du conseil municipal (au titre de l’art. L. 2122-22 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) cité par le ministre) que pour délivrer une concession ou la reprendre, et non pour transformer une sépulture en terrain commun en concession. La jurisprudence applicable ne semble autoriser cette transformation qu’après adoption d’une délibération du conseil municipal (TA Lille, 11 mars 1999, n° 97-338 : AJDA, 20 décembre 1999, p. 26, note D. Dutrieux).
Il est regrettable que la réponse du ministre manque de précision à cet égard.
Annexe Réponse du ministère de l’Intérieur publiée dans le JO Sénat du 09/10/2014 – page 2300 |
Damien Dutrieux,
consultant au CRIDON Nord-Est, maître de conférences associé à l’Université de Lille 2.
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