Dans le dernier numéro de Résonance, nous relevions un arrêt du 3 juin 2014 dans lequel la cour administrative d’appel de Bordeaux venait condamner une commune pour défaut de surveillance du cimetière en raison de la disparition de "restes" qui devaient se trouver dans une concession funéraire. Cette fois, c’est la cour administrative d’appel de Marseille qui refuse d’engager la responsabilité de la commune de Cassis pour la chute d’un monument funéraire.
Damien Dutrieux, consultant au Cridon Nord-Est, maître de conférences associé à l’université de Lille 2 |
Un litige purement privé
Comme l’a clairement jugé le tribunal administratif de Nancy dans un jugement confirmé par la cour administrative d’appel de Nancy (TA Nancy, 22 janvier 2002, X c/ Ville Nancy : "Collectivités territoriales – Intercommunalité" 2002, comm. 121, note J. Moreau ; CAA Nancy, 13 janvier 2005, n° 02NC00427, X. c/ Ville Nancy "Collectivités territoriales – Intercommunalité", septembre 2005, comm. 162, note D. Dutrieux), concernant la chute d'un monument funéraire, la responsabilité administrative demeure l'exception. En effet, il s'agit d'un litige d'ordre privé (responsabilité des dommages causés par un immeuble ; C. civ., art. 1386) entre deux concessionnaires de sépulture, ou un concessionnaire de sépulture et un usager du cimetière (CA Rennes, 6 mars 2002, Le Mann c/ Benjamin Parchemin ; v. également E. Boehler, "De la réparation du dommage causé par la ruine d'un monument funéraire" : Petites affiches 2 novembre 1990, p. 4).
L’existence d’un pouvoir de police
Toutefois, les obligations incombant au maire au titre de ses pouvoirs de police permettront au juge administratif d'accueillir exceptionnellement une action en responsabilité dirigée contre la commune s'il s'avère que le dommage résulte principalement d'un défaut d'entretien ou de surveillance du cimetière (CE, 19 octobre 1966, Cne Clermont (Oise) : Rec. CE 1966, p. 551. – CE, 23 juin 1976, Tony : "Revue du droit public" 1977, p. 521. – V. également TA Marseille, 8 juin 2004, G. c/ Ville Marseille : "Collectivités-Intercommunalité" 2004, comm. 249, note D. Dutrieux).
Une carence prouvée dans l’exercice du pouvoir de police
Néanmoins, seuls des signes manifestes de descellement sans réaction de l'autorité municipale peuvent démontrer l'existence d'une faute susceptible de fonder efficacement une action en responsabilité, ce que n'a pas prouvé le requérant. En l’espèce, la cour administrative d’appel de Marseille, dans cet arrêt du 4 juillet 2014, prend soin de relever que le requérant "ne démontre pas que le caveau présentait extérieurement, avant l’incident en cause, un état de délabrement rendant prévisible la chute de sa pierre tombale". À défaut de preuve apportée d’une négligence de l’Administration, la responsabilité de la commune ne peut donc être engagée.
La nécessité de mettre en œuvre les mesures utiles
Les communes doivent garder à l’esprit cette jurisprudence confirmée, en ce sens que, si un concessionnaire prend soin d’informer la mairie de risques d’effondrement du monument voisin, la commune devra mettre en œuvre tous les moyens dont elle dispose pour éviter les conséquences désormais connues d’une fragilité du monument, et, notamment, les nouveaux moyens donnés par la loi n° 2008-1350 du 19 décembre 2008.
En effet, le législateur est venu créer, dans un nouvel art. L. 511-4-1 du Code de la construction et de l'habitation, une procédure de péril propre aux cimetières, et qui consiste en une simplification de la procédure de péril "ordinaire".
Ce dispositif attendait ses mesures d’application qui ont été publiées avec le décret n° 2011-121 du 28 janvier 2011. Ce décret complète le Code de la construction et de l’habitation de six nouveaux articles (art. D. 511-13 à D. 511-13-5), qui précisent les informations à fournir au concessionnaire et les modalités de leur notification, ainsi que la combinaison de la procédure avec la présence de secteurs particuliers au regard du droit de l’urbanisme ou de l’environnement (sépulture inscrite à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques, située dans le champ de visibilité d’un monument concerné par cette législation, ou située en site inscrit, en secteur sauvegardé ou dans une aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine) et le rôle de l’architecte des Bâtiments de France. Ces articles sont entrés en vigueur le 31 janvier 2011 (v. D. Dutrieux, "La procédure de péril applicable aux monuments funéraires menaçant ruine" : Cah. jur. coll. terr. mars 2011, p. 27).
Damien Dutrieux
Annexe République française 1°) de réformer le jugement n° 1002209 du 29 mars 2012 du tribunal administratif de Marseille qui a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la commune de Cassis au paiement des sommes provisoirement estimées à 50 000 € en réparation du préjudice que Mme E... A... estime avoir subi et de 30 000 € en réparation du préjudice moral subi par M. F... A... et M. D... A...; Vu le Code de justice administrative ; 3 - Considérant que le lundi 13 avril 2009, apprenant par sa cousine que la pierre tombale du caveau familial se situant au cimetière communal de Cassis avait chuté, Mme C... s’est rendue sur les lieux, le même jour à 17 heures, accompagnée de Mme A... afin de constater les dégâts ; que, cependant, peu de temps après leur arrivée, la pierre tombale du caveau voisin est tombée sur Mme A..., la blessant grièvement ; que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, il n’est pas établi qu’un tel événement était prévisible dès lors qu’il résulte de l’instruction que seule la pierre tombale du caveau de la famille C... est tombée la veille ou l’avant-veille ; que si Mme A... et autres font valoir que cet incident ayant eu lieu le 11 avril 2009, la commune de Cassis aurait dû intervenir afin de sécuriser les lieux, Mme A... a déclaré à la gendarmerie qu’il s’agissait de la veille, soit le 12 avril alors que selon le témoignage de Mme B... C..., cette pierre tombale serait tombée le 11 avril ; qu’à supposer même que cet incident soit survenu le samedi 11 avril, il ne peut être reproché à la commune de Cassis son absence d’intervention après ce premier effondrement au demeurant sans gravité dans la mesure où celui-ci ne lui a pas été signalé immédiatement ; 6 - Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Cassis, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, verse à Mme A... et autres quelque somme que ce soit au titre des frais que ceux-ci ont exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la commune Décide : |
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