Lorsque la concession n’est pas renouvelée par le titulaire, quels sont les droits de ses héritiers ?
La fille du concessionnaire
M. A, toujours vivant, a acheté une concession en 1981, où reposent sa femme et ses beaux-parents. Il n’a pas renouvelé cette concession, et depuis janvier 2013 la commune peut la reprendre. Un conflit l’oppose à sa fille, celle-ci avait demandé à renouveler la concession dans les temps impartis, renouvellement qui ne peut lui être accordé puisque le concessionnaire est vivant. La ville ne peut attribuer une concession où des corps reposent. Les services de la mairie ont donc suggéré un accord entre le père et la fille, afin que le père renouvelle la concession et en fasse donation à sa fille. Un accord amiable semble cependant peu probable. Dans ce cas, y a-t-il possibilité d’un recours judiciaire pour l’attribution de la concession en l’état à sa fille ?
La nature de la concession
Il est possible de supposer qu’il s’agit d’une concession trentenaire, et que M. A n’est pas remarié. Il n’est effectivement pas possible d’accorder le renouvellement à la fille pour une question de responsabilité (qui pèse actuellement [ou plutôt qui pesait jusqu’à l’intervention de la reprise communale] sur le titulaire de la concession, c’est-à-dire M. A, son père ; il n’est pas possible de créer une responsabilité pour autrui en droit français !).
L’impossible renouvellement
Le problème a été parfaitement analysé, en ce sens que seul un accord pourrait permettre le renouvellement (même s’il n’est plus de droit, puisque plus de trente-deux ans se sont écoulés, la commune peut toujours l’accorder, la reprise matérielle n’étant pas intervenue).
En pratique, c’est le tribunal d’instance qui est compétent pour régler les questions relatives aux funérailles, alors que le tribunal de grande instance doit régler les conflits familiaux relatifs à l’utilisation des sépultures (CA Douai, 14 juin 1999 : Les Petites Affiches, 1er septembre 1999, p. 10, note X. Labbée).
Une seule solution : "récupérer" le corps inhumé
Le "plus simple" consiste dans une demande d’exhumation présentée par la fille en mairie, demande à laquelle sera opposée l’absence de qualité de plus proche parent du défunt (sauf si M. A s’est remarié). C’est alors le refus d’exhumer qui sera arbitré par le tribunal de grande instance, la fille arguant la nécessité de donner une sépulture à sa mère qui risque de se retrouver à l’ossuaire, lorsque la commune mettra en œuvre la reprise matérielle de la concession (la reprise juridique étant déjà intervenue).
Si la fille ne pourra obtenir du juge que la concession lui soit attribuée, elle pourra éventuellement obtenir l’autorisation d’exhumer pour fonder une autre sépulture, cette fois à son nom.
Damien Dutrieux,
consultant au CRIDON Nord-Est, maître de conférences associé à l’Université de Lille 2.
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