Damien Dutrieux, consultant au CRIDON Nord-Est, maître de conférences associé à l'Université de Lille 2. |
Une modification des règles relatives à la surveillance des opérations funéraires est annoncée et devrait être adoptée dans le délai de six mois à compter de l’adoption du projet de loi.
La police des funérailles ne se limite pas à la délivrance d’autorisations ou à la réception de déclarations préalables. Est prévue une surveillance effective de certaines opérations funéraires, surveillance pouvant donner lieu au versement de vacations.
La surveillance des opérations funéraires a des conséquences directes en matière de responsabilité administrative, puisque, lors de l’exécution d’opérations matérielles, la responsabilité administrative engagée en cas de préjudice en résultant est celle de l’administration responsable de cette surveillance. Ainsi, l’action en responsabilité visant à la réparation du préjudice résultant des fautes commises par les agents d’une régie municipale de pompes funèbres doit être engagée contre l’État, lorsque la police nationale est compétente pour surveiller l’opération (CAA Marseille, 16 janv. 2006, n° 04MA00061 : JCP A 2006, 1075, obs. S. Chatain).
Intervention de fonctionnaires
Des fonctionnaires assistent aux opérations consécutives au décès, notamment pour s’assurer du respect des mesures de salubrité publique (CGCT, art. R. 2213-44). Ils dressent procès-verbal des opérations dont ils ont assuré la surveillance.
La loi n° 2008-1350 du 19 décembre 2008 relative à la législation funéraire a modifié le régime de la surveillance et des vacations funéraires (D. Dutrieux, la loi n° 2008‑1350 du 19 décembre 2008 relative à la législation funéraire – "La fin d’un long processus législatif" : JCP A 2009, act. 2). Des fonctionnaires (CGCT, art. L. 2213-14) assistent aux opérations consécutives au décès, notamment pour s’assurer du respect des mesures de salubrité publique. Il s’agit, dans les communes dotées d’un régime de police d’État, sous la responsabilité du chef de circonscription, du fonctionnaire de police délégué par ses soins, et, dans les autres communes, sous la responsabilité du maire, du garde champêtre ou d’un agent de police municipale délégué par le maire (dispositions maintenues).
Opérations concernées
Le Code (CGCT, art. L. 2213-14) précisait que la surveillance des fonctionnaires (ou du maire) s’imposait pour les opérations suivantes : les opérations d’exhumation (y compris les exhumations administratives consécutives à la reprise d’une concession non renouvelée selon la jurisprudence du Conseil d’État, CE, 26 juill. 1985, n° 36749, Lefèvre et a. : JurisData n° 985-605744 ; Rec. CE 1985, tables, p. 524), de réinhumation (si la réinhumation avait lieu dans un autre cimetière de la commune, les fonctionnaires accompagnaient le corps – CGCT, art. R. 2213-51) et de translation de corps.
Après une tentative de réforme avortée en raison de l’opposition du Sénat lors de l’adoption de ce qui deviendra la loi n° 2007-1787 du 20 décembre 2007 sur la simplification du droit, la loi n° 2008-1350 du 19 décembre 2008 est enfin venue réformer ce dispositif souvent critiqué.
Après avoir précisé quelles étaient les opérations concernées – nouvelle rédaction de l’art. L. 2213-14 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) – et précisé que les fonctionnaires pouvaient néanmoins assister, en tant que besoin, à toutes les autres opérations, les vacations sont limitées tant concernant leur montant fixé par le maire après avis du conseil municipal (entre 20 et 25 €) que pour les opérations concernées car seules celles visées à l’art. L. 2213-14 – la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration du droit ayant précisé que seules les opérations visées à l’alinéa premier de cet article étaient susceptibles de générer des vacations payables par les familles – peuvent générer des vacations (versées à la recette municipale).
Ces opérations sont les suivantes :
- fermeture du cercueil (lorsque le corps est transporté hors de la commune de décès ou de dépôt et dans tous les cas lorsqu’il y a crémation) ;
- exhumation (la loi n° 2011-525 précitée ayant précisé, dans l’alinéa 2 de l’art. L. 2213-14 précité, qu’étaient exclues de la surveillance obligatoire les exhumations administratives), à laquelle sont assimilées les opérations de réduction et de réunion de corps ;
- réinhumation ;
- translation.
La surveillance n’est plus obligatoire dans les autres cas, ce qu’a confirmé le décret n° 2010-917 du 3 août 2010 abrogeant les dispositions réglementaires du Code imposant d’autres surveillances (V. D. Dutrieux, "Surveillance des opérations funéraires et vacations funéraires : une simplification acquise" : JCP A 2010, act. 618).
Les autres opérations (transport, soins de conservation, moulage, inhumation, crémation) peuvent néanmoins être surveillées à la demande du maire ou du préfet, comme l’indique le dernier alinéa de l’art. L. 2213-14 du CGCT, mais aucune vacation ne pourra être demandée à la famille.
Ces règles vont changer
Le Gouvernement a déposé un projet de loi (voir le projet de loi : document 1) visant à être autorisé à changer par ordonnance ces règles afin de limiter la surveillance aux seules fermetures de cercueil avant crémation (voir l’étude d’impact : document 2).
Ces modifications devraient "profiter" et aux familles et aux opérateurs funéraires, et permettre l’utilisation pour d’autres missions des forces de police jusqu’alors mobilisées à cette surveillance.
Damien Dutrieux,
consultant au CRIDON Nord-Est, maître de conférences associé à l’Université de Lille 2.
Document n° 1 : N° 175 Sénat SESSION ORDINAIRE DE 2013-2014 Enregistré à la Présidence du Sénat le 27 novembre 2013 Projet de loi (procédure accélérée), relatif à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures, Exposé des motifs […] La cinquième mesure vise à alléger la participation des fonctionnaires de la police nationale à la surveillance des opérations funéraires, donnant lieu au versement de vacations. La loi n° 2008-1350 du 19 décembre 2008 relative à la législation funéraire et son décret n° 2010-917 du 3 août 2010 relatif à la surveillance des opérations et aux vacations funéraires ont déjà sensiblement réduit le nombre d’opérations funéraires devant être surveillées et donnant lieu à versement d’une vacation. En zone de police d’État, selon la nouvelle rédaction envisagée pour l’art. L. 2213-14 du CGCT, les services de la police nationale demeureraient chargés de la seule surveillance de la fermeture du cercueil lorsque le corps du défunt est destiné à la crémation, dans la mesure où celle-ci est un acte irréversible, ne permettant notamment plus de s’assurer ultérieurement de l’identité du défunt. […] TITRE V Dispositions relatives à l’administration territoriale Art. 9 […] III. - Dans les conditions prévues à l’art. 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance les mesures, relevant du domaine de la loi, pour modifier : 1° Le Code général des collectivités territoriales afin de : […] b) Alléger la surveillance des opérations de fermeture de cercueil ; […] Art. 16 I. - Les ordonnances prévues par la présente loi doivent être prises dans un délai de : 1° Six mois à compter de la publication de la présente loi en ce qui concerne l’art. 8, les 1°, 3°, 4°, b du 5° et 6° du III de l’art. 9 ainsi que le II de l’art. 13 ; […] |
Document n° 2 :
La loi n° 2008-1350 du 19 décembre 2008 relative à la législation funéraire a déjà modifié le régime de surveillance des opérations funéraires. L’objectif poursuivi consistait à réduire le nombre des opérations donnant lieu à surveillance, tout en conservant un degré suffisant de contrôle afin d’éviter notamment que les opérations funéraires ne donnent lieu à des substitutions de corps, des trafics illicites ou des atteintes à l’intégrité du défunt.
2. Objectif En zone de police d’État, selon la nouvelle rédaction proposée de l’art. L 2213-14 du CGCT, les services de la police nationale demeureraient chargés de la seule surveillance de la fermeture du cercueil lorsque le corps du défunt est destiné à la crémation, dans la mesure où celle-ci est un acte irréversible, ne permettant plus de s’assurer ultérieurement de l’identité du défunt.
3. Impact 3.1. Impact sur les administrations
4. Consultations 4.1. Consultations obligatoires |
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