Comment être certain que sa volonté sera respectée si l’on est ultérieurement frappé par le déclin cognitif ? Une question qui peut vous être posée à vous, professionnel du funéraire. Vous devez apporter une réponse éclairée. Le mandat de protection future est la solution. Explications.
Avec l’avancée en âge, l’on devient souvent plus vulnérable, moins autonome. Il arrive parfois que l’on ne soit plus en capacité de prendre des décisions. Il existe alors une réponse "institutionnelle" à cette situation. Il s’agit de la mise en tutelle ou en curatelle. Cette protection est décidée et mise en place par le juge des tutelles.
C’est une réponse autoritaire de sauvegarde des intérêts de la personne. Certes, le juge va chercher un tuteur ou un curateur avant tout dans l’entourage familial et, si ce n’est pas possible, auprès de professionnels, mais on ne se saura jamais si ce choix aurait été celui de la personne vulnérable si elle avait pu choisir. La difficulté vient de la situation dans laquelle se retrouve la personne à protéger.
Une situation particulière. En effet, la volonté d’un défunt se traduit dans un testament car quand on est en pleine possession de ses moyens, l’on conserve son entière liberté. Mais dès que survient l'incapacité au sens juridique du terme, ce sont les "autres" qui décident à notre place. Il existe une solution depuis 2009, encore trop peu connue et qui pourtant permet de concilier perte d’autonomie et volonté personnelle. Son nom ? Le mandat de protection future.
Mieux maîtriser son devenir
Le mandat de protection future est un acte volontaire, un contrat qui peut être mis en place par toute personne en pleine possession de ses moyens. C’est une anticipation d’une situation qui pourrait arriver à chacun d’entre nous dans un futur plus ou moins proche. Plutôt que de subir l’aléa d’une situation et du choix d’une personne désignée pour s’occuper de la personne en perte d’autonomie sévère, c’est le "futur dépendant potentiel" qui fait le choix de la personne et des moyens à lui accorder si cette situation de handicap devait advenir.
Cette liberté de choix va s’imposer à tous si les critères de désignation de fonds et de formes sont respectés. Concrètement, vous, conseil funéraire, devez inviter votre interlocuteur à réfléchir sur le choix d’une ou de deux personnes qui ont sa confiance, et moins âgées qu’elle. C’est un conseil de bon sens, mais pas toujours pris en compte, car, généralement, les amis ont souvent approximativement le même âge.
Ce peut être un membre de la famille ou une tierce personne, car la loi laisse ce libre choix. Là où les personnes désignées doivent accepter ce contrat. Autrement dit, ce n’est pas ici l’expression d’un projet ou d’un vœu, mais bien d’une obligation librement consentie. Il faut ensuite que toutes les parties au contrat se rendent chez le notaire de leur choix qui va formaliser le mandat de protection future.
Le contrat fixera l’étendue des pouvoirs de la personne de confiance. Les volontés consignées peuvent être nombreuses et variées. Par exemple, manifester les souhaits de : rester chez soi autant que possible, et sinon indiquer l’EPHAD de son choix, gérer le patrimoine (tout ou partie) de la personne protégée, mais aussi bénéficier d’un coiffeur tous les quinze jours ou prendre soin de son animal de compagnie. La liste des possibilités est longue. Vous pouvez aussi expliquer à votre client qu’il est possible de nommer une ou deux personnes de confiance différentes selon les tâches à accomplir.
Ce mandat une fois accepté et signé peut être dénoncé par les deux parties ou aménagé tant qu’il n’y a pas eu un début d’exécution, autrement dit tant que la personne protégée est saine d’esprit. Dans le cas contraire, la situation se complique et ce sera au juge des tutelle de trancher. Voilà pour les grandes lignes.
À côté du mandat de protection future pour soi, il en existe un autre dit "de protection future pour autrui". Cet acte est généralement utilisé pour protéger des enfants handicapés. Là encore, les modalités sont à définir avec le notaire. Rappelez à vos clients que ces deux mandats ne sont pas à confondre avec une procuration générale, qui ne concerne que la réalisation d’actes courants et – à retenir… – qui cesse quand la personne devient vulnérable.
À ne pas confondre non plus avec l’acte de directives anticipées où l’on désigne une personne de confiance qui fera respecter la volonté thérapeutique d’un patient (de s’éteindre sans le maintenir en vie dans une situation désespérée, par exemple). Comme on peut le comprendre, le mandat de protection future relève de la volonté et du respect de la personne selon les critères et le choix de celui ou celle qui l’aura mis en place. C’est une liberté dans un univers de plus en plus réglementé.
Patrick Lelong
Résonance n° 173 - Septembre 2021
Résonance n° 173 - Septembre 2021
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