À l’aube de l’été 2021 et des périodes de vacances des Français, le pays va retrouver une vie plus "normale", la campagne de vaccination anti-Covid-19 ayant enfin pu démarrer et s’amplifier au fil des mois.
Sauf irruption soudaine d’un variant hyper agressif qu’aucun antidote ne serait capable de contrer, nous devrions donc revenir à une situation économique, sociale, culturelle et relationnelle conforme à ce que notre civilisation occidentale a connu pendant plusieurs décennies. Je parle volontairement de décennies et pas de siècles. Rappelons-nous en effet que la dernière épidémie de choléra en France ne remonte qu’à 1832 et qu’en l'absence de traitements, les populations avaient appliqué à cette époque la règle du confinement et de l’isolement afin d’essayer tant bien que mal de circonscrire la maladie.
Disons simplement que depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale et les couvre-feux imposés par l’occupant allemand – et de façon légèrement plus autoritaire que pour ceux que nous avons connus ! – notre population n’avait jamais vécu pareille situation.
Au sein de nos professions nous avons tous ressenti, dans certaines régions en particulier, de forts pics d’activité rendant parfois l’exercice de nos métiers particulièrement difficile et fatigant. Nous avons été en première ligne – même si les pouvoirs publics renâclent encore à le reconnaître – et l’affluence soudaine de décès a véritablement épuisé les personnels de beaucoup d’opérateurs.
Ce surcroît de décès concentré sur des périodes relativement courtes n’avait pas été mesuré depuis bien longtemps. 2020 restera, selon l’Insee, comme une année exceptionnelle de mortalité puisqu’en volume, il faut remonter à 1919 pour dépasser de tels seuils.
Rappelons que 1919 a été la triste année de la fameuse grippe espagnole. Cette année-là, toujours selon l’Insee, on a dénombré plus de 850 000 décès (contre un peu moins de 670 000 en 2020). Mais en 1919, la France comptait seulement 39 millions d’habitants contre un peu moins de 67 millions en 2020 ! Le choc avait été d’une violence inouïe, surtout après les 4 années de guerre effroyables que le pays venait de connaître.
Maintenant, forts de cela, il est intéressant de mesurer les enseignements que nous pouvons tirer de l’année que nous venons de connaître notamment par rapport à nos métiers mais aussi par rapport à ce que nous pouvons attendre de l’attitude post pandémie de nos clients (familles et souscripteurs de contrats).
Pour ce qui concerne l’activité funéraire, beaucoup prévoient un ralentissement net du nombre de décès dans les prochaines années. Si cela est avéré, on peut anticiper d’importants risques d’affaiblissement de certains opérateurs notamment parmi ceux qui connaissent aujourd’hui de fortes difficultés de trésorerie.
D’autres pensent que le "siphonage" de décès connu en 2020 sera compensé par la disparition de personnes qui ont été privées de soins durant la pandémie, parce que l’accès aux traitement aura été particulièrement compliqué durant les multiples périodes de confinement. Selon eux, le manque d’activité devrait donc être relatif.
D’un point de vue général, il est certain que la population, et notamment les seniors, a été notoirement effrayée des conséquences de cette pandémie que personne, à part peut-être Bill Gates qui avait pressenti qu’une telle catastrophe pouvait se produire, n’avait envisagée.
En matière de prévoyance funéraire, la conséquence de cette "peur de mourir" engendrée par cette période sombre de notre histoire récente devrait être positive pour l’activité des contrats obsèques. C’est en tout cas ce que nous constatons à l’heure actuelle où les souscriptions reprennent avec une vigueur plutôt inattendue. Les seniors qui souhaitent organiser leurs obsèques en prestations sont de plus en plus nombreux à souscrire des contrats en prévision d’obsèques dans les agences de pompes funèbres.
On peut se demander si la pandémie ne les a pas davantage engagés à prendre leurs dispositions pour organiser leurs funérailles à l’avance.
- Peut-être parce qu’ils ont eux-mêmes vécu la disparition d’un proche parent qui a été fauché par la maladie et qu’ils ont très mal compris les interdits imposés par les consignes sanitaires.
- Peut-être ont-ils constaté que sans aucune préparation, leurs obsèques risquaient d’être organisées à la hâte sans que personne ne puisse respecter ce qu’ils avaient souhaité.
L’effacement des hommages, des rites et de l’accompagnement du défunt a profondément marqué les différentes périodes de confinement que nous venons de traverser. La plupart des gens qui ont vécu cela pour un proche ont été marqués à vie par le départ quasiment anonyme de celui-ci. Ils ne veulent donc plus que cela se reproduise et même si chacun sait que la souscription d’un contrat obsèques n’empêchera pas les autorités d’imposer des contraintes sanitaires susceptibles d’entraver la tenue d’une cérémonie ou d’un départ traditionnel.
Finalement, c’est peut-être une réaction de "survie des traditions, des rites et des hommages" qui pousse les potentiels souscripteurs de contrats à passer à l’acte.
Pour les opérateurs funéraires, cette attitude "nouvelle" constitue une réelle opportunité pour affirmer qu’ils sont les seuls garants du respect des volontés et les dépositaires de ce que souhaitait la personne de son vivant. Je rappelle, même si j’enfonce des portes ouvertes, que cela confère un véritable avantage concurrentiel pour les opérateurs funéraires par rapport à un banquier qui n’aura pas cette capacité.
J’invite donc tous ceux qui le comprennent à profiter de cette période unique de doutes des populations pour mettre l’accent sur le développement de cette activité au sein de leurs agences. Ainsi, ils renforceront leur entreprise et son avenir.
Philippe Gentil
Directeur général de Mésange Prévoyance - FAPE OBSÈQUES/LE VŒU FUNÉRAIRE
Résonance n° 171 - Juin 2021
Résonance n° 171 - Juin 2021
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