Le Comité Consultatif National d’Éthique (CCNE) a organisé une grande consultation participative appelée les États généraux de la bioéthique.
Nicolas Pomiès, directeur d’Obsèques Prévoyance. |
Cette consultation, voulant mesurer l’évolution de mœurs de la population face aux avancées scientifiques qui font évoluer le rapport au vivant et à la mort, a vu la mobilisation des forces rétrogrades qui voient dans la science des attaques contre leurs croyances et leurs dogmes. Pourtant il est clair, que les derniers jours de vie ne sont plus appréhendés par les individus et les familles de la même manière qu’auparavant. Les professionnels du funéraire qui interviennent peu de temps après le dernier souffle de vie du défunt savent que la gestion de la vie a changé depuis ces dernières dizaines d’années. Ainsi le don d’organes est aujourd’hui encouragé et modifie la gestion du corps.
La pratique des transplantations nécessite le don d’organes soit à partir d’un donneur vivant volontaire, soit à partir d’un donneur décédé. Actuellement, la loi française autorise le prélèvement sur un sujet en état de mort cérébrale pour peu qu’il n’ait pas exprimé son refus lorsqu’il était vivant. Cependant, la loi précise qu’un dialogue est nécessaire avec la famille du sujet décédé. La difficulté vient du fait que la plupart des sujets victimes d’accident et en état de pouvoir céder certains de leurs organes pour des greffes n’ont pas clairement exprimé leur décision à ce sujet. Les membres des familles consultées émettent souvent des avis divers et, pour peu qu’un des proches du défunt s’y oppose, le prélèvement n’est pas réalisé. Cela est responsable d’une grande pénurie d’organes et donc du décès de nombreuses personnes inscrites sur des listes d’attente et non greffées. S’il n’y avait pas ces refus qui surviennent dans 30 à 50 % des cas, il n’y aurait aucune pénurie d’organes et tous les malades nécessiteux pourraient recevoir une transplantation.
Il est paradoxal de considérer que la pratique d’une autopsie médico-légale n’est pas soumise à la réflexion de la famille mais est imposée chez les victimes de meurtre ou chez certains accidentés, tandis que le prélèvement d’organes pour sauver d’autres vies humaines est soumis à cette condition. En exprimant les choses de façon un peu caricaturale, tout se passe comme si le fait de prélever des organes sur un sujet décédé était imposé par les pouvoirs publics, sans possibilité de dérogation, lorsque sont en jeu les intérêts d’une enquête judiciaire ou les intérêts financiers d’une assurance, alors que ce même prélèvement est soumis à des conditions beaucoup plus restrictives lorsqu’il est envisagé pour sauver la vie de malades gravement atteints.
Il apparaît donc, toujours dans une réflexion humaniste et laïque, indispensable d’offrir des conditions améliorées de prélèvement d’organes. C’est ce qu’a prévu la loi de janvier 2017. Reste à la faire appliquer correctement partout sur le territoire national. La souffrance de fin de vie est elle aussi perçue d’une nouvelle manière.
Plusieurs histoires dramatiques ont défrayé la chronique, portant à la connaissance de tous l’existence de situations dans lesquelles des malades en fin de vie désirent abréger leur souffrance physique et mentale mais ne sont pas en capacité de le faire eux-mêmes. Certes, le nombre de ces circonstances a légèrement diminué avec l’introduction de moyens permettant d’améliorer les soins palliatifs, le traitement de la douleur, etc. Il reste qu’on dénombre environ 4 000 cas de situations sans solution acceptable pour des personnes implorant la fin de leur vie chaque année en France.
En vérité, chez certains malades en fin de vie, les souffrances sont abrégées par des procédés médicamenteux qui accélèrent le décès. Cela n’étant ni codifié, ni autorisé par la loi, il y a de grandes disparités d’un hôpital à un autre, d’une équipe à une autre, ce qui est à l’origine de regrettables injustices. De plus, des équipes soignantes peuvent être poursuivies et des risques d’abus ou de mauvaise application peuvent se développer dans certains cas.
Il importe donc de légiférer pour combler les lacunes de la loi française. Tout en poursuivant le développement des soins palliatifs et de la prise en charge améliorée des malades en fin de vie, il est nécessaire d’offrir le choix entre diverses modalités de fin de vie : mort naturelle, sédation profonde et continue, aide active à mourir. Cette dernière option doit devenir un droit que pourra solliciter toute personne désireuse de se dispenser du calvaire d’une fin de vie très pénible. De plus, ce progrès entérinera une évolution infiniment souhaitable : la liberté pour chacun de disposer de sa vie, de ses 18 ans jusqu’à son dernier souffle, sans être soumis à un pouvoir extérieur lui dictant son destin.
Dans cette option d’un possible accès à une fin de vie médicalisée pour les malades en phase terminale d’une maladie incurable, la clause de conscience pourrait bien sûr être invoquée et personne ne serait contraint à quoi que ce soit, notamment dans le corps médical et soignant.
Actuellement la loi prévoit la possibilité pour le futur défunt de laisser des directives anticipées. Celles-ci ne sont que rarement respectées. Les équipes soignantes, lorsque la fin de vie a lieu comme 75 % des cas à l’hôpital, sont souvent prises en porte-à-faux entre leur conscience et les réactions des familles. Les souffrances de fin de vie à domicile sont souvent dramatiques.
C’est là que les contrats obsèques ressortant du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) pourraient avoir un rôle de facilitateurs de la fin de vie dans la dignité et la transparence des choix du futur défunt. En effet, le professionnel des obsèques qui recueille les dernières volontés d’une personne en établissant un devis de prestations de funérailles, est formé et obligatoirement titulaire d’un diplôme dont le contenu est cadré par l’État. L’entreprise qui réalise le devis dispose quant à elle d’un agrément préfectoral l’autorisant à organiser des obsèques.
Il ne serait pas inutile d’envisager de généraliser l’incorporation des directives anticipées et des choix sur la gestion des organes dans les dernières volontés stipulées dans le contrat obsèques.
Ce document serait conforme à la loi du 2 février 2016 en faveur des malades et personnes en fin de vie qui a prévu que les directives anticipées, "révisables et révocables à tout moment et par tout moyen", "s’imposent au médecin pour toute décision d’investigation, d’intervention ou de traitement, sauf en cas d’urgence vitale pendant le temps nécessaire à une évaluation complète de la situation et lorsque les directives anticipées apparaissent manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale".
De même pourrait être envisagé l’enregistrement dans le contrat, du testament crématiste pour ceux qui ont choisi ce mode de funérailles. Le futur défunt porteur d’une carte informant de l’existence d’un tel contrat obsèques pourrait ainsi plus facilement communiquer ses dernières volontés et pré-organiser le relais des intervenants autour de lui. Cette formule dégagerait tous les acteurs de leurs problèmes de conscience favorisés par le doute ou la méconnaissance des dernières volontés.
Obsèques Prévoyance travaille à incorporer dans ses contrats toutes ces dispositions au service de la quiétude des futurs défunts et de l’apaisement des familles.
Nicolas Pomiès
Directeur d’Obsèques Prévoyance
Résonance n°141 - Juin 2018
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