Tout contrat dont la finalité est d’assurer un financement en prévision d’obsèques est obligatoirement un contrat d’assurance-vie. L’assureur, en échange de cotisations, s’engage à payer le moment venu un capital destiné à couvrir la facture des obsèques du souscripteur. Ce capital est revalorisé chaque année en fonction des intérêts produits sur les marchés financiers. Il est censé compenser l’augmentation des prix des services funéraires. La baisse des rendements des placements des assureurs rend cet objectif de plus en plus difficile à atteindre.
Maurice Abitbol, directeur d’Obsèques Prévoyance. |
Les prix des services funéraires
L’Institut National de la Statistique et des Études Économiques (INSEE) publie régulièrement des indices de prix. Destiné à apprécier l’inflation, l’Indice des Prix à la Consommation (IPC) permet de mesurer de façon synthétique l’évolution du prix des produits consommés par les ménages. Le champ de l’IPC se définit comme celui de la consommation finale effective marchande monétaire des ménages. Il est constitué de sous-indices qui représentent l’évolution des prix au niveau des différents secteurs de consommation : produits alimentaires, habillement, logement, appareils ménagers, santé, transports, communications, loisirs et culture, éducation, hôtellerie, et autres biens et services.
L’indice général des prix est l’instrument de mesure de l’augmentation des prix à la consommation. Il est parfois contesté, comme insuffisamment représentatif de la consommation des ménages, parce qu’il accorde une place plus ou moins importante à telle ou telle catégorie de produits. Mais il est établi par une administration dont la compétence est reconnue par tous, et sert de référence objective de la mesure de l’augmentation des prix à la consommation. Cet indice en base 100 en 2015 est passé entre 2000 et 2016 de 78,2 à 100,31, soit une augmentation moyenne annuelle de 1,77 %.
Les services funéraires font partie de la catégorie des autres biens et services, et font l’objet d’un indice particulier. Cet indice est une composante de l’indice général. Tous les mois sont relevés les prix d’un convoi avec et sans transport, en métropole et dans les départements d’outre-mer. Ces relevés servent à l’établissement de l’indice des prix des services funéraires et à sa publication mensuelle. L’indice des prix des services funéraires base 100 en 2015 est passé entre 2000 et 2016 de 62,2 à 103,21, soit une augmentation moyenne annuelle de 4,12 %. Les prix dans les services funéraires augmentent nettement plus que l’augmentation générale des prix.
Un contrat obsèques est un pari
Un contrat obsèques c’est-à-dire un contrat qui permet au client de l’opérateur funéraire de préparer ses obsèques à l’avance, est une assurance-vie avec une garantie financière associée à un contrat de prestations funéraires financé par cette assurance-vie. Ce contrat doit le moment venu permettre de faire face au financement des prestations choisies, et éviter à ses proches tous soucis administratifs et financiers.
Les produits financiers servis par l’assurance doivent couvrir l’augmentation des prix des services funéraires, c’est en cela que le contrat obsèques est un pari. Comme les assureurs ne peuvent lier leurs contrats qu’à l’évolution des marchés financiers, il faut que les taux d’intérêt pratiqués sur ces marchés soient supérieurs à l’augmentation des prix des prestations funéraires.
Tendance à la baisse des taux d’intérêt
Les assureurs, depuis quelques années, doivent faire face à une baisse structurelle des taux d’intérêt. Les placements obligataires constituent l’essentiel des portefeuilles des acteurs du marché. Les obligations ou les instruments de placement détenant des titres à revenus fixes représentent la plus grande partie des portefeuilles des acteurs de l’assurance-vie. Étant donné la structure des placements des assureurs, la baisse des taux d’intérêt implique une baisse des rendements de leurs actifs. Les rendements financiers en 2016 sont, en moyenne, inférieurs à 3 %.
Déjà en 2014, l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR), adossée à la Banque de France, avait appelé les assureurs-vie à limiter les revalorisations annuelles des montants garantis dans leurs contrats afin de ne pas fragiliser leur situation financière.
Le contrat d’assurance-vie
Un contrat d’assurance-vie est un contrat par lequel l’assureur prend l’engagement, en contrepartie du versement de primes ou de cotisations, de régler au souscripteur, à l’adhérent ou au tiers désigné, un capital ou une rente déterminé, en cas de décès de l’assuré ou en cas de survie de celui-ci, à une époque et pendant une durée définie dans le contrat.
Les assureurs doivent constituer des provisions techniques destinées à faire face aux engagements qu’ils ont pris. Le capital qui devra être versé au terme du contrat correspond au cumul des primes encaissées, diminué des frais de gestion et de souscription du contrat, et majoré des intérêts servis par l’assureur.
De manière générale, la revalorisation des capitaux assurés est imposée par la loi, elle se décompose en deux éléments : le taux d’intérêt technique et la participation aux bénéfices. Le taux de revalorisation est égal au taux technique plus la participation aux bénéfices. Le taux technique est en quelque sorte le taux minimum que la loi impose aux assureurs, et la participation aux bénéfices est le fruit de la qualité des placements effectués dans la sécurité par les assureurs. Le taux technique a été de 0,25 % pratiquement tout au long de l’année 2016, et à ce jour, il est toujours à ce niveau.
La réglementation funéraire
Le contrat obsèques est un contrat d’assurance-vie qui doit respecter le Code des assurances, accompagné d’un contrat de prestations qui doit respecter la législation funéraire.
Pour tout contrat prévoyant des prestations d’obsèques à l’avance, le Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT), en son art. L. 2223-34-1, précise les conditions d’affectation des bénéfices techniques et financiers conformément à l’art. L. 132-5 du Code des assurances. Cela signifie que le contrat obsèques doit être traité comme tout contrat d’assurance-vie et bénéficier au moins de 85 % des produits financiers obtenus par l’assureur. Ce contrat fait aussi l’objet d’une information annuelle.
La personne qui s’adresse à un opérateur de services funéraires pour financer ses obsèques à l’avance souhaite en général prévoir l’organisation et le déroulement de ses funérailles, et décharger sa famille de tout souci administratif et financier. Il faut donc lui proposer un contrat d’assurance qui lui apporte une garantie financière, adossé à un contrat de prestations qui lui donne la garantie que les prestations qu’elle a choisies seront : "réalisées et financées".
Pour éviter toute ambiguïté, ce contrat doit être accompagné d’un devis détaillé et personnalisé, qui implique nécessairement un dialogue du souscripteur avec un professionnel du service funéraire. Cet échange entre un professionnel du service funéraire et le souscripteur d’un contrat obsèques personnalisé permet de déterminer avec précision les prestations choisies par le signataire.
Pour donner de véritables garanties aux souscripteurs d’un contrat prévoyant des prestations obsèques à l’avance, il faut définir des règles de transparence qui fassent apparaître de manière claire :
- si le capital souscrit couvre intégralement les prestations obsèques,
- si les ayants droit peuvent avoir à régler un supplément financier, et dans quelles conditions,
- si les ayants droit peuvent percevoir la différence entre le capital majoré des intérêts produits et le montant des obsèques.
Un contrat obsèques est un contrat d’assurance adossé à un contrat de prestations de services funéraires. Il implique donc un accord de partenariat équilibré entre l’assureur et l’opérateur funéraire dans le respect de la spécificité de chacun. Ce partenariat peut se développer notamment dans l’élaboration d’un contrat spécialement étudié pour permettre de garantir dans la durée le financement des obsèques du souscripteur. C’est tout le problème de la revalorisation des contrats obsèques.
Depuis quelques années, les taux annuels sur le marché sont très bas, et les compagnies d’assurances annoncent, pour leurs contrats d’assurance-vie, des rendements de l’ordre de 3 % net par an. Ces taux ne permettent pas de revaloriser suffisamment les contrats.
Si l’on veut satisfaire à la demande des souscripteurs de contrats obsèques, il faut concevoir un contrat spécifique qui se fixe comme objectif prioritaire de compenser en tout état de cause la différence entre la revalorisation faite par l’assureur et l’évolution des prix des prestations funéraires. Il faut surtout indiquer clairement qui prend le risque financier, en sachant que ce risque ne peut être couvert par l’assureur parce que la loi ne le lui permet pas. Il ne peut donc être pris que par l’opérateur. Il faut donc faire en sorte que ce risque soit considérablement réduit, notamment en faisant participer le souscripteur. Chaque souscripteur devrait pouvoir accéder facilement à tout moment au montant du capital assuré par son contrat et vérifier si son contrat de prestations funéraires est couvert.
L’opérateur funéraire est, à titre accessoire à son activité principale, un intermédiaire d’assurance. Il est soumis au devoir de conseil. À ce titre, il doit bien informer le souscripteur sur la nature du contrat qu’il lui propose et sur le risque de ne pouvoir financer, le moment venu, la totalité des services funéraires prévus selon l’évolution de l’environnement financier.
Il faut indiquer clairement, conformément à la circulaire ministérielle ad hoc, qui prend le risque financier, en sachant que ce risque ne peut être couvert complètement par l’assureur. Le souscripteur de contrat obsèques en prestations reçoit chaque année un courrier lui indiquant le montant de la revalorisation de son contrat. À cette occasion, il doit être informé si l’écart entre le taux de revalorisation et le taux d’augmentation des prix dans le secteur funéraire devient trop grand et remet en cause les prestations funéraires définies dans le contrat.
Pour faire face à cette difficulté, un bon contrat obsèques devrait prévoir, au moins tous les cinq ans, une révision du capital assuré par le souscripteur, de manière à lui garantir le financement des prestations au niveau souhaité.
Maurice Abitbol
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Résonance n°132 - Juillet 2017
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