La loi de séparation et de régulation des activités bancaires de juillet 2013 comporte un certain nombre de dispositions concernant la prévoyance funéraire. Nous avons fait le point précédemment sur ces dispositions, elles représentent des avancées notables pour la profession. Toutefois pour la disposition concernant la revalorisation des contrats obsèques nous attendons la parution de l’arrêté ministériel qui devra préciser les modalités de calcul de la rémunération des fonds confiés à l’assureur. Essayons d’y voir un peu plus clair.
Maurice Abitbol, directeur Obsèques Prévoyance. |
Que dit le Code des assurances ?
Un contrat d’assurance-vie est un contrat par lequel l’assureur prend l’engagement, en contrepartie du versement de primes ou de cotisations, de régler au souscripteur, à l’adhérent ou au tiers désigné, un capital ou une rente déterminée, en cas de décès de l’assuré ou en cas de survie de celui-ci, à une époque et pendant une durée définie dans le contrat.
Les assureurs doivent constituer des provisions techniques destinées à faire face aux engagements qu’ils ont pris. Le capital qui devra être versé au terme du contrat correspond au cumul des primes encaissées, diminué des frais de gestion et de souscription du contrat et majoré des intérêts servis par l’assureur.
De manière générale la revalorisation des capitaux assurés est imposée par la loi, elle se décompose en deux éléments : le taux d’intérêt technique et la participation aux bénéfices. Le taux de revalorisation est égal au taux technique plus la participation aux bénéfices. Le taux technique est en quelque sorte le taux minimum que la loi impose aux assureurs et la participation aux bénéfices est le fruit de la qualité des placements effectués dans la sécurité par les assureurs.
Le taux d'intérêt technique est utilisé pour la tarification des contrats et pour le calcul des provisions mathématiques qui représentent la capitalisation des engagements de l'assureur à l'égard des assurés.
Comme le taux technique est intégré aux tarifs, ce qui va différencier la revalorisation des capitaux assurés, c’est la participation aux bénéfices. Par exemple quand un souscripteur paie en prime unique un montant inférieur au capital assuré cela signifie que l’assureur a anticipé dans son tarif le taux technique. Son contrat ne peut plus être revalorisé que de la participation aux bénéfices. Dans le cas de primes périodiques la transparence est beaucoup moins évidente mais le mécanisme est le même.
La revalorisation des capitaux assurés va dépendre aussi des frais de gestion et du prélèvement sur les produits financiers que la loi limite à 15 %. D’où l’importance de connaître le taux de chargement global du contrat d’assurance pour juger de sa qualité.
Que dit le Code Général des Collectivités Territoriales ?
Comme nous le savons depuis la fin du monopole des pompes funèbres, le contrat obsèques est un contrat d’assurance-vie qui doit respecter le Code des assurances, accompagné d’un contrat de prestations qui doit respecter la législation funéraire. Un contrat obsèques est en principe un contrat d’assurance souscrit pour la durée de la vie.
Le second alinéa de l’art. L. 2223-34-1 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) est rédigé comme suit : "Tout contrat prévoyant des prestations d’obsèques à l’avance précise les conditions d’affectation des bénéfices techniques et financiers conformément à l’art. L. 132-5 du Code des assurances. Il lui est affecté chaque année une quote-part du solde du compte financier, au moins égale à 85 % de ce solde multiplié par le rapport entre les provisions mathématiques relatives à ce contrat et le total des provisions mathématiques. Il fait aussi l’objet d’une information annuelle conformément à l’art. L. 132-22 du Code des assurances. Un arrêté précise les modalités de calcul et d’affectation de cette quote-part".
Cela signifie que le contrat prévoyant des prestations d’obsèques à l’avance doit être traité comme tout contrat d’assurance et bénéficier au moins de 85 % des produits financiers obtenus par l’assureur. Ce contrat fait l’objet d’une information annuelle comme tout contrat d’assurance. Mais en plus il doit être multiplié par le rapport entre les provisions mathématiques relatives à ce contrat et le total des provisions mathématiques de l’assureur. Les modalités de calcul et d’affectation de cette quote-part seront précisées par arrêté ministériel. Il est difficile pour l’instant de mesurer l’efficacité de cette disposition tant que le ministre n’a pas pris son arrêté. Nous ne voyons pas en quoi cette disposition diffère de ce que prévoit le Code des assurances.
Cela signifie-t-il que le Code des assurances n’était pas respecté par les organismes proposant des contrats obsèques ou que la revalorisation de ces contrats était inférieure à celle des autres contrats d’assurance-vie ? Étonnant ! Il y a donc des raisons de s’interroger sur le progrès qu’est censée nous apporter cette nouvelle tentative de mieux revaloriser les contrats obsèques.
Que recherche le souscripteur d’un contrat prévoyant des prestations d’obsèques à l’avance ?
Rappelons simplement que la personne qui s’adresse à un opérateur de services funéraires pour financer ses obsèques à l’avance, souhaite en général prévoir l’organisation et le déroulement de ses funérailles et décharger sa famille de tout souci administratif et financier. Il faut donc lui proposer un contrat d’assurance qui lui apporte une garantie financière, adossé à un contrat de prestations qui lui apporte la garantie que les prestations qu’elle a choisies seront réalisées et financées.
Pour éviter toute ambiguïté, ce contrat doit être accompagné d’un devis détaillé et personnalisé qui implique nécessairement un dialogue du souscripteur avec un professionnel du service funéraire. Cet échange entre le professionnel du service funéraire et le souscripteur d’un contrat obsèques personnalisé permet de déterminer avec précision les prestations choisies par le signataire.
Pour donner de véritables garanties aux souscripteurs d’un contrat prévoyant des prestations obsèques à
l’avance il faut définir des règles de transparence qui fassent apparaître de manière claire :
- si le capital souscrit couvre intégralement les prestations obsèques,
- si les ayants droit peuvent avoir à régler un supplément financier et dans quelles conditions,
- si les ayants droit peuvent percevoir la différence entre le capital majoré des intérêts produits et le montant des obsèques,
Un contrat obsèques est un contrat d’assurance adossé à un contrat de prestations de services funéraires. Il implique donc un accord de partenariat équilibré entre l’assureur et l’opérateur funéraire dans le respect de la spécificité de chacun. Ce partenariat peut se développer notamment dans l’élaboration d’un contrat spécialement étudié pour permettre de garantir dans la durée le financement des obsèques du souscripteur. C’est tout le problème de la revalorisation des contrats obsèques.
Chaque souscripteur devrait pouvoir accéder facilement à tout moment au montant du capital assuré par son contrat et vérifier si son contrat de prestations funéraires est couvert.
Pour les contrats souscrits il y a vingt ans le taux technique était de 3,5 %. Ce taux reste valable pour toute la durée de ce contrat. Tant que les taux de rendement des assureurs étaient supérieurs à 6, voire 5 %, la revalorisation des contrats était suffisante.
Aujourd’hui les taux annuels sur le marché sont très bas et les compagnies d’assurances annoncent des rendements de l’ordre de 3 % nets par an pour leurs contrats d’assurance-vie. Ces contrats aujourd’hui ne pourront pas être revalorisés suffisamment et ne le seront plus tant que les taux sur le marché seront bas. Pour qu’ils soient à nouveau correctement revalorisés, il faudra que les taux nets de rendement des assureurs soient supérieurs à 3,5 %.
Depuis 2013 le taux technique est de 1,25 % puisqu’il dépend des emprunts d’État sur le marché et que celui-ci est très bas. Cela ne signifie pas pour autant que les contrats souscrits cette année seront suffisamment revalorisés pour couvrir l’augmentation des prix des prestations funéraires qui reste supérieure au taux d’intérêt sur le marché obligataire.
En matière funéraire, si l’on veut satisfaire à la demande des souscripteurs de contrats obsèques, il faut concevoir un contrat spécifique qui se fixe comme objectif prioritaire de compenser en tout état de cause la différence entre la revalorisation faite par l’assureur et l’évolution des prix des prestations funéraires. Il faut surtout indiquer clairement qui prend le risque financier en sachant que ce risque ne peut être couvert par l’assureur parce que la loi ne le lui permet pas. Il ne peut par conséquent être pris que par l’opérateur. Il faut donc faire en sorte que ce risque soit considérablement réduit notamment en faisant participer le souscripteur.
Comme nous savons que le taux d’augmentation des prix dans le secteur funéraire est actuellement plus élevé que le taux net de rémunération des marchés financiers il faut pouvoir établir un capital assuré qui permettra de financer les obsèques à terme ou au moins prévoir une révision quinquennale du montant du capital assuré prévu au contrat.
Maurice Abitbol
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