Publié le 27 mai 2020, le décret n° 2020-648 modifiant le contenu et les modalités de délivrance des diplômes dans le secteur des services funéraires n’a malheureusement pas fait grand bruit dans la profession. C’est d’autant plus dommage que nous avons besoin que notre profession soit reconnue et que nous avons tous besoin de diplômés performants.
Le décret dont il est question, c’est pourtant le résultat des échanges et réunions d’un groupe de travail dédié à la formation et aux diplômes funéraires au sein du Conseil National des Opérations Funéraires (CNOF). Réclamé par la FFPF en septembre 2017, ce groupe est très vite devenu actif grâce à l’appui d’Isabelle Dorliat-Pouzet, cheffe du bureau des services publics locaux, sous-direction des compétences et des institutions locales, Direction Générale des Collectivités Locales (DGCL).
Constitué de membres du CNOF et d’experts, fédérations patronales, représentants des familles (dont certains sont jurés de nos diplômes) et partenaires sociaux, le groupe avait d’abord fait un constat de la formation et des diplômes funéraires, depuis leur mise en place en 2013 sur le territoire.
Parmi les anecdotes vécues par les membres et relatées :
- Un juré faisait savoir qu’il lui était arrivé d’être influencé par le directeur sur la notation du candidat, lequel, le rétribuant, lui faisait comprendre qu’il fallait qu’il obtempère ;
- Aucun professionnel funéraire n’étant présent aux épreuves, le juré devait se débrouiller pour connaître la législation funéraire et savoir si les réponses apportées par le candidat étaient en adéquation avec la loi ;
- Lors des épreuves orales, certains jurés devaient eux-mêmes composer un sujet quand d’autres avaient des sujets ou questions rédigées par l’organisme de formation.
De notre côté, nous avions interrogé candidats et entreprises. Le constat, dans la catégorie des inventaires à la Prévert, était sans appel :
- Un juré nous a signalé signer les copies de l’écrit sans avoir pu y jeter un regard ;
- Certains jurés n’étaient pas au complet lors des épreuves, voire étaient tous absents ;
- Certains élèves n’ont pas suivi 140 heures de cours lors de leur formation théorique, beaucoup moins ;
- Certaines entreprises ont rencontré des candidats à l’embauche – diplômés – qui n’avaient jamais vu un quelconque document funéraire : ni déclaration de transport ou de soins, ni certificat de décès, ni devis ;
- Certains stagiaires n’avaient aucune déontologie, aucun savoir-être face aux familles endeuillées ;
- Un membre du jury, élu de chambre consulaire, et dirigeant d’entreprise, s’est retrouvé face à une ancienne salariée avec laquelle les relations étaient tendues ;
- Peu de centres de formation fournissaient une grille d’évaluation du stagiaire lors de sa formation pratique…
Une fois ce constat dressé, la tâche de notre groupe était de réfléchir à la transformation de la formation et de son évaluation, et de tendre à en uniformiser le contenu afin de valoriser les diplômes nationaux, tant celui de maître de cérémonie (MC) que celui de conseiller funéraire (CF).
Le décret du 27 mai, s’il ne répond pas à toutes les attentes du groupe, a d’abord permis d’entendre les besoins des entreprises, en matière de comportement des futurs professionnels, notamment. Son objectif se présente d’ailleurs ainsi : "L’objectif du décret est de renforcer et d’encadrer davantage l’organisation des épreuves, dans leur contenu et leur format, et de renforcer les garanties d’impartialité des membres de jury et des écoles."
Nouveau texte, mode d’emploi
Première nouveauté : une "officialisation ministérielle" du diplôme délivré, grâce à une publication au Bulletin officiel : "Au terme de la session d’examens, le jury transmet la liste des diplômés au secrétariat du CNOF. La liste des diplômés est publiée une fois par an au Bulletin officiel du ministère de l’Intérieur." Cela s’imposait, entre les centres de formation "volatils" et les stagiaires qui perdaient leur "collante", il était impossible de savoir, en 2017, combien nous avions de diplômés MC et CF en France.
Une durée de formation pratique en entreprise plus longue. Là aussi, dans notre activité, difficile de prévoir si, pendant les 70 heures prévues, le stagiaire allait pouvoir assister à un nombre d’activités conséquent. Certains stagiaires nous avaient confié n’avoir pas vu de cérémonies lors de leur période de stage, voire pas de défunt. En allongeant la période de stage pratique à 140 heures, chaque stagiaire pourra observer l’activité funéraire et participer aux prestations proposées par l’entreprise accueillante.
Partant de cette durée allongée, "le candidat au diplôme de maître de cérémonie, par exemple, devra obligatoirement participer à un minimum de cinq activités de cette liste :
- participer à l’organisation logistique d’une cérémonie de mise en bière ;
- participer à une cérémonie funéraire ;
- participer à la remise d’urne funéraire à la famille ou à une dispersion des cendres ;
- visiter les parties techniques d’une chambre funéraire ou d’un crématorium ;
- assister à une inhumation ou à une crémation ;
- accueillir les proches d’un défunt dans le cadre de l’organisation des obsèques ;
- participer à un transport de corps avant ou après mise en bière ;
- assister aux travaux de cimetière des fossoyeurs et/ou marbriers (creusement de la fosse, ouverture d’un caveau et pose d’un monument…)".
Mais aussi, et surtout, le candidat aura à rédiger un rapport de stage, d’une à trois pages, suite à sa formation pratique, et c’est, entre autres, sur ce rapport que le jury s’appuiera pour évaluer la capacité du candidat à exercer la profession de maître de cérémonie ou de conseiller funéraire, lors des vingt minutes consacrées à l’oral. Ce rapport, qui existe pour un grand nombre de formations et diplômes, sera un véritable travail de rédaction fourni par le candidat. Beaucoup d’entreprises déploraient que les candidats à l’embauche n’aient pas la maîtrise de la langue française, en particulier à l’écrit.
La pondération des 3 notes composant le diplôme est également revue par le texte de mai 2020, accordant une part plus importante à la partie de l’épreuve théorique orale. Sur cette épreuve, il est même prévu une note éliminatoire, de 05/20.
- épreuve écrite : 50 % de la note finale (au lieu de 60 % avant novembre 2020),
- épreuve orale : 30 % de la note finale (au lieu de 20 % avant novembre 2020),
- évaluation de la formation pratique : 20 % de la note finale (identique par rapport au texte de 2012).
Cette évaluation de la pratique a conduit les membres du groupe à travailler sur une grille commune, composée de critères liés au comportement et à l’attitude du stagiaire ainsi qu’à l’évaluation de ses connaissances, acquises via la formation théorique : le dirigeant ou tuteur.
À titre d’exemple, durant le stage pratique, l’entreprise pourra établir si "le stagiaire connaît les démarches consécutives au décès, la notion de service public, les délais légaux, les règles applicables au transport de corps et les autorités à contacter selon les situations rencontrées", ou encore si, par ailleurs, "le stagiaire s’exprime de façon claire et intelligible, son élocution est fluide, il s’assure de la compréhension de ses interlocuteurs".
En tout, 10 critères, dont un relatif à l’assiduité, la ponctualité ou la bienveillance et la politesse du candidat, ou permettant à l’entreprise de prendre immédiatement contact avec le centre de formation, en cas de problème.
L’idée d’avoir des grilles de notation, pour les entreprises comme pour les jurés, est d’aller vers une harmonisation du niveau demandé pour l’obtention des diplômes, afin de répondre au mieux aux attentes des entreprises, que les stagiaires soient déjà salariés ou dans le cadre de leur embauche. Une charte d’éthique est également proposée, à faire signer à chaque juré, regroupant des critères indispensables, comme l’impartialité et la confidentialité.
Il faut noter également qu’aucun organisme de formation ne doit être écarté de cette démarche qualitative, et c’est dans ce but que le ministère a créé une adresse mail dédiée – cnof-diplôCette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser. –, sur laquelle chaque centre est invité à proposer des sujets de questionnaires, qui feront l’objet d’une validation par une commission issue du CNOF. "À ce jour, seule notre école a déposé des sujets", s’inquiète Florence Fresse. "Ce serait idéal, mais surtout indispensable, que toutes les structures de formation participent à la création de cette banque de données, notre profession, chaque organisme doit s’impliquer dans ce processus."
Florence Fresse
Déléguée générale de la FFPF
Résonance numéro spécial n°11 - Décembre 2020
Déléguée générale de la FFPF
Résonance numéro spécial n°11 - Décembre 2020
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