Il est fatigant de voir et de lire que les pompes funèbres sont des voleurs. Faux, ils ne le sont pas (tous). Des milliers d’entreprises indépendantes, le plus souvent familiales, travaillent jour et nuit, semaine et week-end, pour répondre aux besoins de la famille. On ne peut pas fermer une agence de pompes funèbres comme un coiffeur ou un boulanger, les vacances sont donc parfois difficiles à prendre. Être entrepreneur dans le secteur funéraire demande beaucoup d’énergie et de temps, parfois au détriment de sa vie personnelle et familiale. Tous ces efforts ont un coût qui est difficilement mesurable par le grand public.
Nous souhaiterions permettre à chacun de pouvoir payer moins cher les obsèques. Alors, comment faire ?
On peut réduire les marges, mais il y a des limites. On peut supprimer tout ce qui n’est pas obligatoire, mais cela doit être le choix des familles. On peut aussi éviter de facturer des porteurs quand ils ne sont pas indispensables ; ceci nous paraît évident. Plus sérieusement, n’y a-t-il pas d’autres acteurs qui devraient faire un effort ?
Il y a quelque temps, le groupe Sublimatorium Florian Leclerc a adressé une demande au Président de la République et au ministère des Finances pour que la TVA soit supprimée sur les contrats obsèques et les prestations funéraires, son application étant contraire à la loi selon notre interprétation.
Prélever de la TVA sur les obsèques réglées par avance par un défunt est illégal. De même pour celles qui sont réglées par un prélèvement direct sur son compte. Les contrats obsèques sont des placements et la somme sert à payer les funérailles après le décès. Or, la loi est claire, selon le Code fiscal, c’est l’administration fiscale (ou fisc) qui est autorisé à recouvrer les sommes dues pour les impôts, mais les amendes ne sont plus recouvrables après le décès et, surtout, le défunt n’est plus assujetti aux taxes. Il est donc interdit de taxer les morts ce qui implique qu’une famille qui vient régler des obsèques de son vivant est bien assujettie à la TVA, mais le défunt, qui a provisionné sous quelque forme que ce soit de l’argent pour celles-ci, les paie après sa mort, donc la TVA ne devrait pas lui être réclamée.
La réponse de la Direction Générale des Finances Publiques (DGFP) fut la suivante :
"[…] La directive n° 2006/112/CE du 28 novembre 2006 relative au système commun de la TVA ne comprend aucune disposition permettant d’exonérer les services funéraires.
En effet, seuls les États qui exonéraient ces services avant le 1er janvier 1979 ont eu la possibilité de continuer à les exonérer postérieurement à cette date sur le fondement de la clause dite de "gel".
Or, la France, qui a renoncé à cette faculté à cette même date, s’est définitivement privée de la possibilité d’exonérer ces prestations.
Aussi, l’exonération que vous préconisez mettrait la France en infraction au regard du droit communautaire et l’exposerait à un contentieux dont l’issue serait nécessairement défavorable […]".
La primauté de la loi européenne ne permet donc pas de supprimer la TVA : très bien…
Toutefois, avant la libéralisation du secteur funéraire et durant l’épopée des régies funéraires, il me semble que la TVA n’était pas due malgré le renoncement de la France à sa faculté d’exonérer les services funéraires. Ce n’est qu’à partir de la chute du monopole d’État que la TVA est devenue obligatoire, bien après le 1er janvier 1979.
Néanmoins, si je me fie à la réponse de la DGFP ci-dessus, nous devons trouver d’autres axes d’amélioration afin de réduire le coût des obsèques.
En voici quelques-uns
L’État ne peut pas exonérer la TVA mais il peut la réduire à son taux le plus bas, c’est-à-dire à 5,5 %, ou encore à 2,1 %. Il est capable de l’augmenter… donc de le diminuer.
Il y a aussi certains services à la personne qui sont défiscalisés à hauteur de 50 %, on retrouve notamment le service suivant : aide à domicile pour les personnes âgées (prestation de conduite du véhicule personnel, accompagnement dans les déplacements, assistance dans les actes de la vie quotidienne, jardinage, etc.). Les services funéraires comme les porteurs, le transport, l’entretien des tombes ou les soins à domicile pourraient rentrer dans cette catégorie de services à la personne.
Le transport d’un lieu à un hôpital lors d’un accident de son vivant est pris en charge par la Sécurité Sociale et les mutuelles, alors pourquoi ne financeraient-elles pas également le dernier transport d’une personne décédée ayant cotisé toute sa vie ?
Les études faites sur le coût des obsèques est une moyenne effectuée sur les devis obtenus dans de nombreuses sociétés de pompes funèbres. Néanmoins, ces études ne font pas la distinction entre les différents types de commerces existants, c’est-à-dire les magasins indépendants et les magasins intégrés.
Les chiffres et la logique montrent qu’une entreprise intégrée est généralement plus chère qu’une entreprise indépendante, adhérente d’un groupement ou non, et ceci est normal car les frais de gestion des structures intégrées sont très importants. Payer un collaborateur pour tenir une permanence téléphonique, tous les soirs et tous les week-ends, à un coût. Payer des personnes pour gérer chaque secteur en a un aussi. Faire un retour sur investissement aux investisseurs, de même. Force est de constater que ces dernières années le nombre d’entreprises indépendantes a diminué suite à leur rachat par des groupements intégrés.
La progression des frais d’obsèques se justifie donc par différentes raisons qui ne sont pas toutes mentionnées ci-dessus. Le travail du groupe Sublimatorium Florian Leclerc ne se limite pas à la négociation avec les fournisseurs, il consiste également à approfondir les quelques pistes mentionnées plus haut afin que les acteurs du funéraire ne soient pas toujours obligés de se défendre sur le montant de leurs devis. Nous prônons les valeurs que portent les entreprises indépendantes du secteur funéraire afin qu’elles soient connues et reconnues par le plus grand nombre.
Florian Leclerc
Résonance n° 153 - Septembre 2019
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