Pas de qualité des monuments funéraires sans expérience du métier, contrôle de la production et créativité : c’est le socle du savoir-faire développé par Pascal Claudel, le patron de Monustone et d’Art Cinéraire.
Au début, il y a la matière. Ce bloc de granit dont on fait les objets funéraires, et qu’il faut savoir choisir pour sa qualité. Patron des sociétés vosgiennes Monustone et Art Cinéraire, Pascal Claudel se fie à son l’expérience. Son long parcours professionnel dans la pierre est son atout majeur.
"C’est une recherche permanente du meilleur produit, explique-t-il. Il faut connaître les carrières, et suivre le vieillissement du granit. Regarder comment il évolue à tel ou tel autre endroit, s’il se ternit, s’il verdit. Je suis également très attentif aux retours des clients qui ont posé tel monument il y a dix ans, et qui me disent comment il s’est tenu dans la durée."
Pour mener à bien son activité de négoce en s’approvisionnant en Chine ou en Inde, il a su s’entourer, trouver les bonnes personnes pour "chasser" la matière première. Témoin, son relais en Inde, un ami de 25 ans, "efficace spécialiste des carrières et du granit avant d’être spécialiste des monuments. Quelqu’un de très pointu que j’ai connu lorsque j’achetais des blocs là-bas. Quand il arrive dans une usine, il peut imposer ses vues aux fournisseurs, demandant d’acheter du granit de telle provenance, orientant les prix. Il visite les carrières en permanence. Sa famille y vend des engins de chantier. Il entretient aussi un réseau. Il sait qu’une carrière est vivante. Qu’un jour, elle a de la matière à proposer, que le lendemain elle n’en a plus. On peut ne pas trouver de beaux blocs pendant deux mois, puis ça revient".
Un réel contrôle des produits fabriqués
Monustone a également formé sur place sa propre équipe de sculpteurs et de graveurs de monuments, s’affranchissant ainsi du risque de médiocre qualité conséquence de la grande mobilité des ouvriers indiens, et assurant donc un contrôle des produits fabriqués. "Ils se déplacent d’usine en usine. Les monuments que j’importe sont finis. Parfois, le nom du défunt est même gravé. Mais il revient au bureau français, dans les Vosges, de positionner les décorations voulues par le client, d’envoyer un plan, puis de contrôler l’activité des équipes chinoises et indiennes."
Pascal Claudel est admiratif de l’ouvrage artisanal pratiqué par ses sculpteurs et graveurs. "Ils sont incroyables, souvent formés sur le tas. L’un d’eux, qui vient du Nord de l’Inde, m’a confié voici trois ans qu’il n’avait jamais vu une disqueuse. J’étais éberlué."
Voir sa production s’élaborer à 10 000 kilomètres ne change pas grand-chose pour ce passionné de monuments funéraires. Il n’a plus désormais en France que son bureau d’études. "J’ai été fabricant jusqu’en 2004, avant d’être emporté par la vague des importations, poursuit-il. Je ne fais aujourd’hui pas autre chose. Mais je ne vais plus acheter des blocs sur le port d’Anvers. Je les trouve dorénavant au port chinois de Xiamen. En Inde, c’est différent. Là, il y a ces agents qui surveillent l’exploitation des carrières. Au moment d’acheter, l’usine envoie un inspecteur pour faire la sélection finale, négocier le prix et organiser le marquage des blocs et le transport."
"J’avais une des usines les plus modernes du secteur", se souvient-il des années passées. Aujourd’hui, je n’ai plus les soucis de produire moi-même. Je me concentre à plein sur la création. Depuis longtemps, je visite des cimetières en France, en Italie, en Espagne. On y trouve souvent une idée, une source d’inspiration." Important, à l’heure de la personnalisation accrue des objets funéraires.
Winnie l’ourson et l’Himalaya
"Personnaliser, j’ai commencé en 1985. Je crée des objets uniques, parfois remarquables comme des chapelles. Ces objets pourront peut-être ensuite entrer au catalogue." Témoin, l’ourson Winnie sculpté en Inde en janvier dernier, reproduit depuis à une vingtaine d’exemplaires. Ou des vases-fleurs. Ou encore la pierre tombale "Himalaya 351", offrant un paysage apaisant de pierre avec sa rivière, son pont, son arbre.
"Je l’ai dessiné un soir après qu’un client pompe funèbre a reçu une famille. En 15 minutes, je me suis inspiré d’un dessin d’enfant pour créer ce monument. Le lendemain, j’envoyais un premier projet. J’écoute ce que le client a ressenti et je le transcris en 3D. Mon catalogue est une source d’inspiration. Une pompe funèbre qui met mon catalogue dans les mains d’une famille doit pouvoir relever les réactions au fur et à mesure que les pages se tournent. Sur une couleur, sur un arrondi, sur un motif. Quand c’est fini, les ayant observé, le professionnel doit avoir en tête le monument qu’il va destiner aux proches du défunt."
Enrichir sa gamme : voilà une préoccupation constante. Pascal Claudel s’apprête encore à proposer une toute nouvelle collection. Il y travaille cet été, et la présentera lors du salon FUNÉRAIRE PARIS 2017 en novembre prochain.
Olivier Pelladeau
Résonance hors-série n°4 - Août 2017
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