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Empathie : faculté de s’identifier à autrui, de ressentir les sensations d’un autre (le-dictionnaire.com). En voilà un mot barbare, qui résume pourtant à la perfection ce qui me semble être une évidence pour tout professionnel qui met un point d’honneur à exercer son métier convenablement.

 

Curti-Mikael
Curti Mickael

Or, dans la plupart des reportages, enquêtes ou dossiers parus récemment dans les médias, il semblerait que ce sentiment ait disparu du contexte funéraire. Que faut-il en penser ? Les professionnels du funéraire sont-ils inexorablement motivés par l’appât du gain ? N’y en a-t-il réellement plus de soucieux du travail bien fait ? Le sentiment humain a-t-il laissé la place au capitalisme ?
Je les entends d’ici : "Le marché de la mort en pleine expansion ! Les arnaqueurs du deuil !..." Mais a-t-on déjà reproché à un médecin de vivre de la maladie ? Le boulanger ne profite-t-il pas de la faim de ses clients ?
Comment ne pas s’indigner d’être "réduit" à si peu de chose alors que nous sommes encore tellement nombreux à mettre en avant un profond respect pour les familles endeuillées, au détriment même parfois de notre vie de famille. Sans parler de notre propre vécu qu’il faut savoir mettre de côté le temps d’exercer notre activité.

S’identifier aux familles de défunts ou aux défunts eux-mêmes lors de nos entretiens est un sentiment humain auquel chacun a déjà été confronté. Le tout est de pouvoir faire la part des choses, de mettre ses émotions de côté et surtout de faire preuve d’écoute, de compréhension et d’ouverture d’esprit.
J’en ai pour exemple deux professionnelles parmi tant d’autres avec lesquelles j’ai eu l’occasion de converser récemment. L’une d’elles, technicienne en devenir, la seconde thanatopractrice expérimentée, toutes les deux touchées à leur niveau par la Grande Faucheuse.
Émilie, 19 ans, m’est apparue comme une jeune fille sensible, peut-être trop… Attirée par le milieu funéraire par vocation et "depuis toujours", c’est alors qu’elle est touchée par un deuil il y a quelque temps qu’un blocage se manifeste. Il lui est alors de plus en plus difficile d’assister aux soins de conservation, activité à laquelle elle se prédestine pourtant. Le souvenir de son grand-père est encore trop présent, son travail de deuil n’est pas encore achevé. Il lui faudra faire un travail sur elle-même afin de dépasser ce stade et de pouvoir mener à bien son projet professionnel. "Je veux faire ce métier qui me tient à cœur, et par la même occasion rendre hommage à mon grand-père", tels sont ses mots, et ils se passent de commentaires. Elle est en bonne voie pour réussir, et nous lui souhaitons bonne chance.

Claire, quant à elle, est totalement ancrée dans le milieu funéraire, depuis près de 17 ans maintenant. Très impliquée dans la profession, c’est en tant que travailleuse libérale qu’elle exerce la thanatopraxie et prend part activement au programme de formation des futurs techniciens.
Ayant subi la perte de ses deux grands-mères consécutivement, c’est face au décès de sa mère que l’incompréhension commence à se faire sentir. Certaines personnes ne comprennent pas sa peine, la mort étant son lot quotidien. Mais comment oser catégoriser des sentiments ! Pourquoi une professionnelle comme elle ne se sentirait-elle pas meurtrie par la perte d’un proche ? Comme elle le dit elle-même : "Nous avons certes conscience du caractère inéluctable de la "Mort", alors que la plupart des gens doivent nourrir le secret espoir d’y échapper", idée fausse, bien entendu. Nul n’est immunisé contre ça. Nous apprenons peut-être à relativiser un peu plus facilement, ou pas…

Cet épisode de tension passé, c’est une nouvelle épreuve à laquelle elle va devoir se confronter, son combat contre la maladie. Le jour de l’annonce de son diagnostic, c’est au premier abord un sentiment de colère et d’abattement qui se fait sentir. Quand on lui dit : "Vous avez un cancer", elle entend : "Il vous reste 3 mois à vivre".

Sans remettre en cause sa propre sensibilité mais ayant déjà un contact différent avec la mort de par son activité professionnelle, c’est avec une philosophie toute particulière qu’elle a pris la décision de rebondir. Elle a imaginé "SA" propre mort et l’a même couchée sur papier. Ce nouveau deuil auquel il fallait faire face, c’était le sien. L’éloignement alors de certains proches est, à mon sens, un phénomène inévitable. Le tout est de se savoir entouré par les gens que l’on aime et qui nous aiment, c’est le principal.
Les épisodes chirurgicaux et médicamenteux sont maintenant derrière elle. Claire est entrée en rémission, mais garde toujours bien présente dans son esprit cette épée de Damoclès au-dessus de sa tête.

En effet, profondément choquée d’avoir vu sa mère, qui se croyait guérie, s’effondrer lors d’une rechute, elle s’est mise à adopter comme principe de vie que chaque jour est un jour de gagné, mais reste prête à affronter un éventuel nouvel assaut de la maladie.
Malgré tout, Claire reste une personne active qui croque la vie à pleines dents, et a décidé de relativiser "les petits tracas de la vie quotidienne" en continuant d’exercer avec passion son métier.
D’ailleurs, l’un des embaumements les plus difficiles psychologiquement qu’elle ait dû pratiquer reste sans conteste celui de son propre formateur. Cette faculté qu’ont les professionnels du funéraire, et en particulier les thanatopracteurs, à mettre de côté leurs émotions personnelles afin d’assurer un travail impeccable a été relatée récemment.

Avec de tels témoignages et de telles rencontres, je ne peux que me conforter dans mon idée qu’il existe encore des personnes qui exercent cette activité pour les bonnes raisons. La volonté de bien faire et l’amour de la profession passent avant les contraintes personnelles.

C’est le cas d’énormément d’entrepreneurs de pompes funèbres, d’assistants funéraires, de thanatopracteurs ou de fossoyeurs, etc. Il est important, à mon sens, de séparer travail et vie personnelle afin de ne pas sombrer. Bien entendu, nous sommes fatalement influencés par nos expériences respectives, celles-ci doivent être une force et non une faiblesse. Derrière chaque "croque-mort", il y a un être humain.

Ces pseudo-documentaires qui se vantent de faire du buzz avec des sujets tels que "la face cachée des pompes funèbres" nous montrent la plupart du temps des cas isolés de personnes peu scrupuleuses qui ne correspondent en rien à la mentalité de la profession.
 
Comme Émilie et Claire, nous sommes extrêmement nombreux à vouloir promouvoir et faire aimer cette noble profession et ouvrir les yeux du grand public sur la réalité des pompes funèbres, des hommes et des femmes qui travaillent pour les autres et au service des autres. Il faut absolument rendre à César ce qui est à César et redonner un visage humain à la profession.

À bon entendeur…

Curti Mickael

Instances fédérales nationales et internationales :

FNF - Fédération Nationale du Funéraire FFPF - Fédération Française des Pompes Funèbres UPPFP - Union du Pôle Funéraire Public CSNAF - Chambre Syndicale Nationale de l'Art Funéraire UGCF - Union des Gestionnaires de Crématoriums Français FFC - Fédération Française de Crémation EFFS - European Federation or Funeral Services FIAT-IFTA - Fédération Internationale des Associations de Thanatoloques - International Federation of Thanatologists Associations