Spécialiste de l’objet physique, concret, porteur pour la famille du souvenir du défunt, qu’est la plaque funéraire, Sylvestre Olgiati, dirigeant de Mémograv et de France Funéraire, nous fait part de ses réflexions sur l’impact d’Internet et de la digitalisation dans un métier attaché au cimetière, ayant été lui-même un précurseur dans l’utilisation du Web comme média commercial.
Sylvestre Olgiati, dirirecteur général de Mémograv et de France Funéraire. |
Internet et le numérique ont changé en une vingtaine d’années la nature de nombreuses activités. Face aux nouvelles étapes franchies aujourd’hui, avec la prégnance d’Internet notamment, qu’est-ce qui va réellement changer demain pour les professions funéraires ? "Ce que je constate, malgré les nouveaux usages liés au Web, le développement de la crémation, de la digitalisation, est que le marché du souvenir funéraire reste stable. On ne voit pas se dessiner une érosion continue de notre marché qui bénéficierait à des secteurs dits "digitaux", indique tout d’abord Sylvestre Olgiati.
"On se rend compte que le cimetière reste un lieu de mémoire évident et qu’une trace physique reste essentielle pour beaucoup de familles. Celui-ci (et tout ce qui s’y rattache, comme la cérémonie) reste très présent, très vivace. Il y a une idée reçue qui veut que cela ne soit plus à la mode, que ce soit dépassé. Mais, moi, au quotidien, je relève le contraire avec des ventes de plaques qui se portent bien, qui trouvent leurs places sur le marché et qui vont dans les cimetières."
En réalité, la digitalisation ne modifie pas l’équilibre essentiel que représente le face-à-face concret entre les familles et les opérateurs funéraires, indispensable lorsqu’on doit organiser des obsèques. On est ici loin de passer à un modèle virtuel. "Ce qu’apporte la digitalisation, ce sont des nouvelles pratiques quant à l’offre commerciale et à sa communication. Il est obligatoire pour les professionnels du funéraire d’être "à jour". Il n’est plus possible pour un fabricant de travailler "avec un calepin et le crayon sur l’oreille". Même le catalogue papier n’est plus suffisant. Dans la pratique commerciale actuelle, Internet est un passage obligé."
Pour différentes raisons d’ailleurs, notamment pour une question d’image. Un entrepreneur se doit d’avoir une adresse mail, un site Web… pour ne pas paraître passéiste. "Ceux qui sont dans la digitalisation progressent plus vite, vendent plus et mieux, arrivant à agréger une offre qui correspond plus aux goûts des familles, du marché. Par exemple, nous n’avons jamais été aussi proches de la demande exprimée par la famille qu’avec le configurateur de Mémograv, qui permet à celle-ci, chez l’opérateur funéraire, de faire la maquette en temps réel et de voir la plaque se créer sous ses yeux."
Les nouvelles techniques numériques permettent d’être plus proche des attentes du consommateur qu’est aussi la famille. Si le professionnel est apte à offrir un service de qualité, à répondre aux demandes rapidement, de manière pertinente, voire de présenter des propositions prédictives, il aura un consommateur qui achètera plus et plus vite. "Le digital va indéniablement changer la donne, modifier, enrichir et simplifier les relations, faciliter les interactions commerciales. Cela va leur permettre d’augmenter, de varier leur offre, en ayant, de plus, la capacité d’une forte réactivité face aux besoins et/ou aux désirs des acheteurs."
Mais tout cela doit se faire sans casser les codes classiques, les usages propres à cette activité si particulière. Le funéraire est un domaine touchant à l’intime, vivant naturellement dans un écosystème à évolution lente. L’imprégnation du numérique dans celui-ci, à l’inverse d’autres secteurs économiques, se fera petit à petit. "Aujourd’hui, nous restons à l’écoute des différentes nouvelles technologies issues de la digitalisation et de l’avancée d’Internet. Nous testons les innovations qui en découlent et les mettons en pratique si elles s’avèrent congruentes pour nos métiers", conclut Sylvestre Olgiati.
Gil Chauveau
Résonance hors-série n°3 - Janvier 2017
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