Depuis toujours, la Confédération des Professionnels du Funéraire et de la Marbrerie (CPFM) répond quotidiennement aux questions de ses adhérents. Il nous a semblé intéressant de partager avec les lecteurs de Résonance, les réponses que nous avons déjà apportées à nos adhérents, sur les points les plus fréquemment soulevés.
Nous proposerons au cours des prochaines parutions, des réponses sur différents points ou questions ayant trait aux problématiques du secteur funéraire.
Richard Ferret, directeur général délégué de CPFM |
Dans cette édition, nous abordons une question que l’actualité médiatique a fait ressortir ces temps-ci : celle relative au transfert et au séjour en chambre funéraire des corps des personnes décédées dans des établissements de santé dépourvus de chambre mortuaire.
La CPFM a été interrogée à plusieurs reprises sur la situation de décès survenus dans un établissement médico-social (clinique, maison de retraite, …) ne disposant pas d’une chambre mortuaire : Qui doit prendre en charge les frais de transfert sans cercueil vers une chambre funéraire ?
D’aucuns considèrent que ces frais doivent être supportés par la famille (ou la personne qui pourvoit aux funérailles) ; d’autres, à l’inverse, sont persuadés que ces frais incombent à l’établissement où s’est produit le décès, arguant de dispositions législatives.
La CPFM fait le point sur ce sujet.
L’accueil d’un corps sans cercueil dans une chambre funéraire est subordonné à plusieurs critères :
- Le décès doit avoir été constaté par un médecin, déclaré et enregistré à l’état civil (du moins lorsque les services de l’état civil sont ouverts).
- Une personne doit demander formellement l’admission du corps dans une chambre funéraire. Il est donc nécessaire qu’une "demande d’admission" soit établie et signée. C’est la personne qui signe cette demande d’admission qui devra assumer le paiement des frais correspondant aux prestations de transport et, a priori, d’une durée minimum de séjour à la chambre funéraire.
- Le transport avant mise en bière doit faire l’objet d’une déclaration préalable et devra être réalisé dans un délai maximum de 48 h à compter du décès, avec un véhicule spécialisé répondant aux critères techniques définis par les articles D.2223-110 à D.2223-114 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT).
La réglementation (art. R.2223-76 du CGCT) précise très clairement quelle est la personne susceptible de demander l’admission d’un corps dans une chambre funéraire. Ce texte distingue trois cas de figure :
- Soit la demande émane de la personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles, et qui a défini la nature des prestations en vue de procéder aux funérailles du défunt. Cette personne assume les frais des prestations qu’elle commande.
- Soit la demande émane de la personne chez qui le décès est survenu – mais qui, a priori n’est pas susceptible d’avoir qualité pour pourvoir aux funérailles - à condition d’attester par écrit qu’elle n’a pas pu, dans un délai de 12 h à compter du décès, joindre quelqu’un susceptible de pourvoir aux funérailles. Passé ce délai, cette personne a donc la possibilité de faire transférer, sur son initiative, le corps du défunt dans une chambre funéraire de son choix. Ce cas de figure reste assez rare.
- Soit la demande émane du directeur de l’établissement dans lequel le décès est survenu (dans le cas où cet établissement ne dispose pas d’une chambre mortuaire ou qu’il n’a pas conclu un accord avec un autre établissement de santé, doté lui d’une chambre mortuaire, pour l’utilisation conjointe de cet équipement) à condition d’attester par écrit qu’il n’a pas pu, dans un délai de 10 h (1) à compter du décès, joindre une personne ayant qualité pour pourvoir aux funérailles. Passé ce délai, le directeur a donc la possibilité de faire transférer sur son initiative, le corps du défunt dans une chambre funéraire de son choix.
Dans ce cas de figure, le texte réglementaire (art. R.2223-79 du CGCT) précise sans ambiguïté que les frais de transport et des trois premiers jours en chambre funéraire sont réglés par l’établissement de santé (à condition que le directeur ait effectivement signé la demande d’admission). En effet, cet établissement de santé se trouve ainsi "libéré" de la charge que représentait la présence du défunt dans ses locaux.
Il est à noter que rien n’interdit que le corps du défunt reste dans l’établissement de santé où le décès est survenu, en attendant d’y être mis en bière avant ses obsèques. Ce n’est pas parce que l’établissement est dépourvu de chambre mortuaire qu’il faut en déduire que le corps d’une personne défunte ne peut pas y être mis en bière. Rien dans les textes législatifs ni réglementaires n’interdit cette situation.
La situation est claire lorsque le directeur se trouve dans le cas de figure où il ne lui a pas été possible de joindre une personne susceptible de pourvoir aux funérailles ; il est tout à fait en droit de demander l’admission du corps dans une chambre funéraire de son choix, à condition d’en assumer les frais.
Mais il existe une situation qui réglementairement n’est pas identifiée et qui peut être source de confusion.
Si le directeur de l’établissement a pu joindre une personne susceptible de pourvoir aux funérailles dans le délai des 10 h consécutives au décès (ce qui n’a rien d’exceptionnel si l’on considère que les dossiers administratifs de l’établissement comportent très probablement les coordonnées de personnes à prévenir en cas d’incident), il semble qu’il perd, de facto, sa marge de manœuvre pour demander l’admission du corps dans une chambre funéraire et, concrètement, il se trouve dépendant du bon vouloir de la personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles, pour faire quitter l’établissement au corps du défunt.
Deux options sont à distinguer :
- La première, qui est assez simple pour le directeur de l’établissement, est celle où la famille a anticipé la survenue du décès et a déjà réfléchi aux dispositions à mettre en œuvre pour transférer le défunt, sans cercueil, vers un domicile ou une chambre funéraire de son choix. Les initiatives relèvent de la famille, qui assumera les frais correspondant aux prestations qu’elle commandera.
- La seconde, plus ambiguë, est celle où la personne susceptible de pourvoir aux funérailles (la famille), se trouve décontenancée par la survenue du décès et découvre que l’établissement de santé ne souhaitant pas conserver le corps du défunt, la met en demeure de prendre des dispositions afin d’en assurer le transfert vers une chambre funéraire. La famille contacte alors une entreprise gestionnaire d’une chambre funéraire et signe une demande d’admission du corps du défunt. Ce faisant, la famille s’engage à régler les frais correspondant au transfert et aux démarches afférentes ainsi qu’au séjour du corps en chambre funéraire.
Or il existe une littérature, en particulier sur internet, qui soutient que la famille, dans cette situation, ne devrait pas assumer les frais de ce transfert. Il y est même conseillé aux familles d’ajouter sur la demande d’admission qu’elles signent, une mention laissant entendre que les frais seront supportés par l’établissement de santé. Attention ! Cette information est erronée car, sauf si la direction de l’établissement a contresigné cette mention, l’entreprise gestionnaire de la chambre funéraire ne pourra faire autrement que d’adresser la facture correspondant au transfert et au séjour en chambre funéraire, à la personne signataire de la demande d’admission.
Il nous a été fait part de cas de figure où la famille a refusé de signer une demande d’admission. Dans ce cas, si l’établissement ne souhaite pas conserver le corps dans ses locaux, il pourra demander l’admission du corps dans une chambre funéraire de son choix et en assumera les frais. La famille reste libre de confier l’organisation des obsèques à une entreprise de services funéraire de son choix (2), qui procédera à la mise en bière du corps depuis la chambre funéraire où le corps a été déposé.
Il convient de rappeler que les établissements de santé sont tenus de mettre à la disposition des familles la liste des entreprises de services funéraires habilitées dans le département
(art. R.2223-32 du CGTC).
Il faut bien comprendre qu’à défaut de décision prise par la famille, un établissement de santé pourrait prendre l’initiative de faire transférer le corps d’une personne défunte vers une chambre funéraire de son choix à condition d’en assumer les frais.
Cela ne veut pas dire que, si une famille décide de faire transférer le corps du défunt, décédé dans un établissement de santé ne disposant pas d’une chambre mortuaire, vers une chambre funéraire choisie par elle (par exemple à, proximité de leur domicile plutôt qu’à proximité de l’établissement de santé), la facture puisse être envoyée à l’établissement de santé.
Ainsi :
- Il n’existe aucun texte qui oblige un établissement de santé à prendre en charge, de façon systématique, les frais de transport et d’admission du corps dans une chambre funéraire.
- Le paiement des frais de transfert dans une chambre funéraire incombe à la personne qui signe la demande d’admission.
Il reste que le règlement intérieur d’un établissement médico-social devrait prévoir la survenue du décès d’une personne accueillie au sein de l’établissement et préciser les modalités susceptibles d’être mises en œuvre à cette occasion.
Le règlement intérieur peut ainsi rappeler que les familles sont libres de choisir l’opérateur funéraire à qui elles confieront les obsèques et que la liste prévue à l’art. R.2222-71 est disponible au service de l’accueil de l’établissement. Ce texte pourra également rappeler que la famille est prioritaire pour faire transférer, sur son initiative, le corps de la personne défunte vers un domicile ou une chambre funéraire de son choix, mais qu’à défaut d’initiative de la famille, l’établissement n’étant pas en mesure, compte tenu de son organisation, de conserver le corps jusqu’à sa mise en bière, le défunt sera transféré à l’initiative et aux frais de l’établissement, vers une chambre funéraire choisie par la direction.
La famille reste libre de faire appel, pour l’organisation des obsèques, à l’entreprise de son choix.
Une telle indication figurant clairement dans le règlement intérieur de l’établissement permettrait de lever toute ambiguïté et éviterait bien des interrogations.
Nota :
(1) Il est à noter que la réglementation fixe un délai différent selon que le décès est survenu dans un domicile ou dans un établissement de santé. Le délai est plus long de 2 h pour un particulier que pour le directeur d’un établissement de santé. On peut imaginer que le rédacteur du décret a considéré que l’établissement de santé devait disposer dans ses dossiers des coordonnées des personnes à contacter et que, de ce fait, la prise de contact avec ces personnes pouvait être suffisamment rapide pour que ces dernières puissent prendre la situation en main dans un délai plus court.
Il reste surprenant que le délai imposé au particulier – pour qui la survenue du décès est un évènement des plus exceptionnels – oblige celui-ci à conserver plus longtemps le corps que l’établissement de santé alors que la survenue d’un décès dans ce type d’établissement y est statistiquement plus important et que l’on peut penser qu’un établissement de santé sérieux soit plus à même qu’un particulier de faire face à cet évènement.
(2) L’art. R.2223-88 du CGCT rappelle que lorsque l’initiative de l’admission d’un corps dans une chambre funéraire n’émane pas de la personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles, l’entreprise gestionnaire de la chambre funéraire qui a reçu le corps ne peut pas accepter de cette personne une commande pour l’organisation des funérailles sans lui avoir préalablement fait signer un document attestant qu’elle a bien pris connaissance de la liste des entreprises de services funéraires habilitées dans le département, prévue à l’art. R.2223-71 du CGCT, affichée dans l’espace d’accueil de la chambre funéraire.
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