Comment aborder le sujet financier lors d’un entretien avec une famille ?

En août 2024, un sondage publié sur LinkedIn a révélé une grande diversité d’opinions quant au meilleur moment pour aborder la question du prix lors de l’organisation d’obsèques. Sur les 58 personnes ayant participé, 48 % estiment que le sujet doit être introduit au début de l’entretien, tandis que 22 % préfèrent en parler au milieu et 29 % à la fin.

Ce débat révèle un aspect central de l’entretien funéraire : à quel moment doit-on parler d’argent sans que cela ne vienne alourdir un moment déjà chargé en émotion ?

Pourtant, au-delà des théories, qu’en est-il vraiment dans la pratique quotidienne des conseillers funéraires ?

Les résultats de cette enquête restent de l’ordre du théorique. Pour autant, selon mes observations, tant lors de mes formations qu’au cours de mes expériences personnelles ou de ce que j’ai pu constater chez d’autres conseillers funéraires, la question financière est abordée lors de la présentation du devis final. Cette étape intervient systématiquement à la clôture de l’entretien, juste avant que le représentant de la famille ne signe ledit devis.

C’est d’ailleurs bien souvent dans ces instants que l’on peut entendre des observations telles que "le coût de la mort est élevé" et "comment les individus démunis parviennent-ils à faire face à de telles dépenses ?". Et pour cause, les familles n’ont, heureusement pour elles, généralement pas à organiser fréquemment des cérémonies funéraires.

En moyenne, une personne est amenée à organiser une ou deux fois des obsèques au cours de son existence. De fait, la pratique et les repères manquent, et cela d’autant plus que lorsque celle-ci assiste à des funérailles, elle participe à la cérémonie religieuse ou civile, suivie de l’inhumation au cimetière ou de la crémation au crématorium, rien de plus… tout l’aspect organisationnel lui est étranger.

Aussi, lorsqu’une famille passe le pas de porte d’une agence de pompes funèbres pour organiser les funérailles d’un proche décédé, elle n’a que deux interrogations essentielles :

- la date de la cérémonie, pour prévenir la famille,

- le montant des frais d’obsèques pour faire face à cette dépense imprévue (Moins de 30 % seront détentrices de solutions types contrat obsèques ou financement anticipé pour les frais liés à l’organisation des obsèques).

En pratique, la durée d’un entretien dédié à l’organisation d’une cérémonie funéraire est généralement comprise entre 1 h 30 et 2 h. Durant cet entretien, le seul coût discuté concerne un article spécifique : le cercueil et éventuellement l’urne en cas de crémation. Tout le reste de l’échange sera consacré aux aspects organisationnels et le conseiller funéraire se fera force de propositions en matière de services, tant pour le recueillement en amont de la cérémonie, que pour l’hommage à rendre au défunt ou pour le souvenir après sa sépulture.

Pour la phase de recueillement les services le plus souvent proposés sont bien entendu l’ensemble des démarches et autres formalités liées à l’organisation des obsèques, le transport du corps, la toilette mortuaire ou les soins de conservation si nécessaire, l’accueil en chambre funéraire, etc.

L’hommage ensuite… où, quand et de quelle manière la cérémonie funéraire en l’honneur du défunt aura-t-elle lieu ? Religieuse ou laïque ? Classique ou personnalisée ? Avec ou sans maître de cérémonie ? Sans oublier le corbillard, la présence de porteurs ainsi que la publication de l’avis dans la presse. Et enfin, le souvenir… quelle sera la dernière demeure du défunt ?

Là encore, caveau, monument funéraire, gravure et autres travaux de cimetière et de marbrerie sont autant de services à proposer. La démarche est la même pour la préparation d’une crémation et plusieurs éléments doivent être pris en considération, tels que la sélection de l’urne funéraire, l’organisation de la cérémonie et le règlement des frais afférents à la crémation.

On pourra enfin évoquer la fourniture de fleurs, l’assistance dans les formalités et démarches après décès, ainsi que bien d’autres prestations spécifiques à chaque établissement. Ce n’est qu’au terme de cet entretien, prenant en compte toutes les demandes de la famille, que le conseiller funéraire sera en mesure d’établir, parfois dans un silence solennel derrière son écran, le devis final à présenter à la famille.

Ce devis, souvent synthétique, affiche un langage technique avec une terminologie que les familles ne sont pas en mesure de décoder, hormis le coût total en bas de page. Ce montant est-il sujet à négociation ? Rarement… Cela étant, celui-ci peut, lorsqu’il s’agit d’un parent, être déductible des impôts. Quoi qu’il en soit, bien que les familles optent généralement pour des funérailles simples le montant final résulte des nombreux services et autres prestations complémentaires.

L’objectif de la famille est d’obtenir des informations sur l’organisation des funérailles (organisation, dates, heures) ainsi que sur le coût total associé. Le rôle principal du conseiller funéraire consiste à organiser et à coordonner les funérailles du défunt au regard des attentes de sa famille. À partir de cette structuration, il convient de définir précisément le montant de la prestation afin d’établir un devis qui pourra donner lieu à une commande signée, laquelle sera liée à un pouvoir lors de son règlement, en tenant compte du mode de paiement choisi à la date convenue pour le paiement.

Lorsqu’une famille se rend dans une agence de pompes funèbres, c’est dans le but d’organiser les obsèques d’un proche décédé, et ce, en accord avec ses dernières volontés. Peu coutumières des problématiques et autres coûts liés aux funérailles, les familles n’en sont pas moins fidèles, ce qui est une vraie chance.

Ainsi, il n’est pas rare que celles-ci viennent avec une facture vieille de 10 ans datant des obsèques du grand-père ou de la grand-mère durant lesquelles tout s’était bien déroulé et où les prestations avaient été appréciées. Indubitablement, et ce malgré un gain de temps certain, les pratiques ayant souvent évolué, de même que les aspects réglementaire, économique et sociétal, un dialogue doit être engagé et des explications approfondies sont nécessaires.

Lors de l’entretien, les familles ne manifestent aucune véhémence au regard des tarifs, elles ne s’engagent pas dans des négociations. Elles n’en ont pas la force, tant le chagrin peut les accabler. Je ne parle même pas des morts violentes, soudaines, en particulier celles concernant les enfants, une situation tragique pour tout le monde. Elles n’ont pas la force non plus de consulter plusieurs entreprises de pompes funèbres et estiment ne pas en avoir le temps. Bien que les pratiques évoluent avec l’avènement d’Internet et des devis en ligne.

Ainsi, les familles peuvent accepter un devis sans en saisir pleinement la portée. Lors du ou des entretiens avec le conseiller funéraire, les familles viennent en confiance chercher une organisation, des lieux, des dates, des heures et un tarif. Les familles vont apposer leur signature sur le devis puis la commande sans trop comprendre le jargon funéraire. D’où une potentielle incompréhension.

Pour autant, lors de la cérémonie, la famille enregistrera mentalement tous les détails des funérailles. Le respect des divers engagements, le professionnalisme, le niveau de compétence, le comportement et la posture des intervenants ainsi que la qualité des soins apportés au défunt. Le ressenti, les impressions personnelles, la qualité des infrastructures, voire le niveau d’entretien des véhicules...

Lorsque la famille recevra la facture, elle se remémorera chaque détail puis elle procédera à l’évaluation de chaque ligne afin de déterminer si le coût est justifié ou excessif par rapport aux prestations fournies. La satisfaction dépendra de l’agrégation de ces différentes évaluations.

Il convient de prendre également en considération l’importance des retours de l’assistance vis-à-vis du travail de l’entreprise de pompes funèbres, que ce soient des félicitations telles que "la cérémonie était très belle" ou des critiques comme "on n’a pas pu déposer un message sur les registres à condoléances". La réussite de l’organisation d’obsèques repose parfois sur des détails minimes.

Parler d’argent dans un moment aussi sensible que celui de l’organisation d’obsèques n’est jamais facile. Mais avec beaucoup d’écoute de pédagogie et de bienveillance, il est possible d’amorcer ce dialogue à différentes étapes de l’entretien, de manière progressive et rassurante. L’important est que la famille se sente guidée à chaque instant, avec la certitude que chaque décision prise est respectée et bien comprise.

À titre d’exemple, lorsque le ou la conseiller funéraire se présente et explique le déroulé de l’entretien, il peut s’exprimer comme suit : "Au cours de cet entretien, nous aborderons ensemble tous les points relatifs à l’organisation des obsèques de… et à la fin de celui-ci je vous indiquerai le montant total du devis qui tiendra compte des volontés du défunt et des prestations et services que vous aurez choisis pour rendre hommage à votre proche cher disparu".

En milieu d’entretien, le conseiller funéraire pourra préciser : "Avant d’aller dans la salle d’exposition des cercueils, désirez-vous que j’établisse un devis intermédiaire par rapport aux services du recueillement, de l’hommage et du souvenir que vous avez choisis ? De cette façon vous aurez une idée du prix hors cercueil".

En fin d’entretien le conseiller devrait agir comme suit : "Je vous présente le devis avec l’ensemble des prestations et services ainsi que le cercueil (et éventuellement l’urne) que vous avez choisis. Le montant total s’élève à …€. Je vais vous l’expliquer dans le détail, ainsi nous validerons ensemble l’organisation des obsèques : les prestations, lieux, dates et horaires".

"Maintenant que vous avez signé le devis et le bon de commande, nous allons aborder ensemble les différents modes de paiement que vous pouvez choisir pour régler la facture des frais d’obsèques."

En espérant que cet article vous aidera à l’avenir pour aborder plus sereinement ce sujet sensible avec les familles.