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Outil de cohésion nationale entre les différents territoires, la loi EROM (loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation pour l’égalité réelle outre-mer) consolide le principe de continuité territoriale en procédant à son élargissement au domaine funéraire. Elle reprend et consacre une préoccupation émise lors de l’adoption de la Charte du respect de la personne endeuillée. L’originalité de ce texte réside dans le fait qu’il propose un dispositif exceptionnel de rattrapage, avec une méthode innovante, fixant des objectifs à moyen terme. Un premier rapport d’évaluation a été présenté le 7 juin 2018. L’occasion de revenir, en détail, sur le dispositif prévu en matière funéraire.


En premier lieu, la loi introduit le principe d’une continuité territoriale inversée, avec la mise en œuvre d’un lien entre l’Hexagone et les outre-mer. Le fonds de continuité territoriale peut désormais financer, sous certaines conditions, des aides en faveur de personnes résidant en France hexagonale. Ce principe s’applique à une continuité territoriale funéraire, sous une double forme : l’aide au transport de corps ou l’aide obsèques. Globalement, ces aides spécifiques, y compris celles qui sont destinées à l’emploi aux stages et à la mobilité sont qualifiées d’aide à la continuité territoriale(1).

Il est également prévu que cette aide finance aussi, sous conditions de ressources, une partie des titres de transport, notamment les titres acquis pour un déplacement pour se rendre à des obsèques d’un proche. À l’époque, dans le cadre des travaux préparatoires de la Charte du respect de la personne endeuillée, le groupe de travail mis en place avait insisté sur les difficultés des personnes qui habitent ou qui sont originaires de ces collectivités à participer aux obsèques de leurs proches. Ces pesonnes étant doublement pénalisées : d’abord par une tarification excessive des compagnies aériennes, ensuite par l’inexistence d’une priorité de réservation.

Les aides à la continuité funéraire 

Ces aides se décomposent en deux dispositifs : l’aide à l’acquisition de titre de transport pour se rendre aux obsèques d’un proche et l’aide au transport de corps. Il convient d’insister sur l’universalité de ces dispositifs, dès lors qu’ils visent, au sens de l’art. L. 1803-1 du Code des transports, "l’ensemble des personnes qui sont régulièrement établies outre-mer", tout comme "peuvent en bénéficier, dans les conditions prévues par la loi, des personnes résidant en France métropolitaine".

1) Les territoires et collectivités visés par les dispositifs

Il s’agit des personnes ayant leur résidence habituelle en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à La Réunion, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Wallis-et-Futuna.

L’aide à la continuité territoriale peut aussi financer une partie des titres de transport entre ces collectivités, à l’intérieur d’une même zone géographique ou à l’intérieur d’une même collectivité, en raison des difficultés particulières d’accès à une partie de son territoire.

2) L’aide à l’acquisition d’un titre de transport 

Elle finance, sous conditions de ressources, une partie des titres de transport des résidents habituels régulièrement établis en France métropolitaine lorsque la demande d’aide à la continuité territoriale est justifiée par un déplacement pour se rendre aux obsèques d’un parent au premier degré, au sens de l’art. 743 du Code civil(2), de leur conjoint ou de leur partenaire lié par un pacte civil de solidarité, dans l’une des collectivités mentionnées précédemment ou à l’intérieur d’une même zone géographique ou d’une même collectivité.

3) Conditions d’éligibilité au bénéfice de l’aide

• La destination doit être celle de la résidence habituelle du défunt ;
• La demande d’aide doit être est déposée au plus tard trois mois après la date de voyage ;
• L’aide est forfaitaire et déterminée selon la destination ;
• Seul le trajet aérien est pris en compte ;
• L’aide n’est valable que pour le trajet aller/retour France métropolitaine-collectivité d’outre-mer ;
• Le montant de l’aide ne peut dépasser le prix du voyage.

4) Les niveaux d’aides appliqués

Deux niveaux d’aides sont appliqués : une aide majorée pour un montant de ressources inférieur à 6 000 €, et une aide simple pour un montant de ressources compris entre 6 000 € et 11 991 €. Le montant des ressources est déterminé par le rapport entre le revenu fiscal de référence et le nombre de parts du foyer fiscal.

a) Montant de l’aide majorée pour des ressources inférieures à 6 000 € :
• Guadeloupe : 270 €
• Guyane : 300 €
• Martinique : 270 €
• Mayotte : 440 €
• La Réunion : 360 €
• Saint-Martin : 270 €
• Saint-Barthélemy : 270 €

b) Montant de l’aide simple pour des ressources comprises entre 6 000 € et 11 991 € :
• Guadeloupe : 85 €
• Guyane : 90 €
• Martinique : 85 €
• Mayotte : 135 €
• La Réunion : 110 €
• Saint-Martin : 85 €
• Saint-Barthélemy : 85 €

5) Portée de l’aide

La demande d’aide à la continuité territoriale justifiée par un déplacement pour se rendre aux obsèques d’un parent peut aussi financer une partie des titres de transport entre les collectivités ou à l’intérieur d’une même zone géographique ou à l’intérieur d’une même collectivité, en raison des difficultés particulières d’accès à une partie de son territoire. Un arrêté conjoint du ministre chargé des Transports et du ministre chargé de l’Outre-mer définit les déplacements éligibles à cette aide.

Les aides aux transports de corps

À la terrible douleur de perdre un proche, peuvent s’ajouter des difficultés financières insurmontables pour transporter le corps du défunt depuis la métropole jusqu’au lieu choisi pour l’inhumation. Les contraintes techniques liées au transport d’un corps dans de bonnes conditions, sur des distances aussi conséquentes, rendent cette opération particulièrement coûteuse pour les familles endeuillées.

L’art. 2 de l’arrêté du 18 novembre 2010 précise que le montant de l’aide au transport de corps est fixé à 50 % du montant des frais engagés pour le service de transport aérien du corps, sans toutefois dépasser la valeur de :
• 2 000 € pour un transport sur une distance supérieure à 15 000 kilomètres ;
• 1 000 € pour un transport sur une distance entre 6 000 et 15 000 kilomètres ;
• 500 € pour un transport sur une distance inférieure à 6 000 kilomètres.

La distance est égale à la distance orthodromique entre l’aéroport de départ et l’aéroport d’arrivée, le cas échéant, des escales principalement fréquentées.
L’aide à la continuité territoriale du transport de corps est allouée sous réserve des conditions suivantes :
• Elle ne peut être engagée que par une personne ayant qualité pour pourvoir aux funérailles du défunt et régulièrement établie sur le territoire national, soit toute personne qui, par le lien stable et permanent qui l’unissait à la personne défunte, apparaît ou peut être présumée la meilleure interprète des volontés du défunt.
• Le trajet peut être vers l’Hexagone ou vers la collectivité d’outre-mer, à condition que la destination soit celle de la résidence habituelle du défunt.
• Elle est soumise à un plafond de ressources de 6 000 €.
• Le défunt ne doit pas avoir souscrit de couverture assurantielle.
• La demande est déposée au plus tard trois mois après le décès.

La demande doit être accompagnée d’une déclaration sur l’honneur du demandeur relative à l’absence de prise en charge de tout ou partie du coût du transport de corps par une assurance souscrite par le défunt ou par un tiers pour le compte du défunt.

La continuité inversée des résidents établis en France métropolitaine

L’art. 47 de la loi EROM permet une aide, sous conditions de ressources, pour la prise en charge d’une partie des titres de transport de résidents établis en France hexagonale lorsqu’ils doivent se rendre aux obsèques d’un parent au premier degré ou d’un conjoint dans un territoire ultra-marin, ainsi que le financement d’une partie de la dépense afférente au transport aérien du corps.

L’aide à la continuité territoriale obsèques est alors :
• Aide ouverte aux résidents habituels établis dans l’Hexagone ;
• La destination doit être celle de la résidence habituelle du défunt ;
• Elle est soumise à un plafond de ressources de 11 991 €.

Le montant de l’aide qui couvre le trajet aérien ne peut dépasser le prix du voyage et est forfaitaire selon la destination. Une aide simple est attribuée aux personnes dont le foyer fiscal est compris entre 6 000 € et 11 991 € et, lorsque le foyer fiscal est inférieur à 6 000 €, elles pourront obtenir une aide majorée.

Évaluation du dispositif de la continuité funéraire

Les dispositions réglementaires mises en œuvre dans le cadre de ce dispositif posent toutefois des conditions restrictives. En premier lieu, cette aide est accordée à défaut de couverture assurantielle, et en deuxième lieu, les conditions de ressources sont fixées à un niveau qui risque de priver de tout effet cette mesure. En effet, l’art. 2 de l’arrêté d’application fixe : "Est éligible à l’aide au transport de corps prévue à l’art. L. 1803-4-1 du Code des transports la personne rattachée à un foyer fiscal dont le rapport entre le revenu annuel et le nombre de parts tels que définis à l’art. 5 ne dépasse pas 6 000 €. Une éventuelle problématique liée à la notion de résidence risque aussi de rendre cette continuité territoriale funéraire inopérante, en particulier pour les étudiants.

1) Qui a utilisé le dispositif pour de déplacer et se rendre à des obsèques d’un proche ?

Selon le rapport d’activité de L’Agence de l’Outre-mer pour la Mobilité (LADOM), ce dispositif a été utilisé :
• À 46 % par des résidents martiniquais, suivis ensuite à 35,7 % par des Guadeloupéens ;
• 19 346 bons ont été distribués ;
• L’État a engagé 4,93 millions d’euros ;  
• Le dispositif mis en place à La Réunion délivre, de son côté, environ 150 000 bons.
Selon LADOM, le pourcentage de l’aide ACT tourne autour de 40 % du prix du billet.

2) Les obstacles limitant le recours au dispositif

Les conditions d’éligibilité financières posées par le décret d’application s’érigent en obstacles à une mise en œuvre efficiente du dispositif. Les conditions de ressources sont fixées à un niveau tel qu’il empêche son utilisation.

Une éventuelle problématique liée à la notion de résidence risque aussi de rendre cette continuité territoriale funéraire inopérante, en particulier pour les étudiants ou les ultramarins installés dans l’Hexagone mais souhaitant être inhumés dans leur territoire d’origine. En effet, l’aide au rapatriement de corps ne s’applique pas aux personnes décédées en Hexagone, mais aux seules personnes décédées lors d’un déplacement hors de leur lieu ultra-marin de résidence habituelle. Par ailleurs, sur le plan administratif, des complexités ont été relevées. L’une d’elles concerne le remboursement des frais de voyage engagés pour se rendre aux obsèques. Le décès doit avoir eu lieu, ce qui ne permet pas de voyager pour être présent aux derniers instants du proche.

Enfin, ce dispositif est conçu sur la base d’une avance de frais par le bénéficiaire. Une telle mesure produit un effet dissuasif pour le public éligible. Afin d’adapter la continuité territoriale aux besoins des ultramarins, le ministère des Outre-mer a lancé le 28 janvier 2020 une large réflexion sur les évolutions à apporter à la politique nationale de continuité territoriale. À la suite de travaux menés avec les parlementaires et les représentants des collectivités territoriales, plusieurs mesures de simplification et plus favorables ont été décidées.

3) L’adaptation et la simplification du dispositif

Par décret n° 2021-845 du 28 juin 2021 modifiant le Code des transports en matière de continuité territoriale entre les collectivités d’Outre-mer et le territoire hexagonal, et par arrêté du 28 juin 2021, plusieurs mesures de simplification et plus favorables ont été mises en œuvre concernant la continuité territoriale des Outre-mer. Ainsi, les quatre mesures nouvelles de cette réforme, entrées en vigueur le 1er juillet 2021, sont les suivantes : fusion de l’aide simple et de l’aide majorée sur la base du montant le plus favorable. Dorénavant, pour le dispositif d’aide à la continuité territoriale et pour le dispositif d’aide obsèques dans le cadre de la continuité funéraire :
• Un montant d’aide unique existera pour chaque territoire ultramarin. Ce montant représente environ 40 % du prix moyen d’achat du billet d’avion constaté sur chaque liaison. L’application de ce principe a conduit à rehausser le montant de l’aide pour les îles de Wallis-et-Futuna, la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie. À la suite de cette réforme, les montants de l’aide figurent au tableau ci-dessous : (Voir page suivante).
• Simplification et fixation d’un plafond unique de ressources : les résidents d’outre-mer souhaitant recourir à l’aide à la continuité territoriale classique ou à la continuité funéraire (obsèques et aide au transport de corps) devront justifier d’un quotient familial inférieur ou égal à 11 991 €.

Territoires Montants appliqués suite aux évolutions réglementaires Montants appliqués avant les évolutions réglementaires
Guadeloupe 270 € 85 € (aide simple) ou 270 € (aide majorée)
Martinique 270 € 85 € ou 270 €
Guyane 300 € 90 € ou 300 €
La Réunion 360 € 110 € ou 360 €
Mayotte 440 € 135 € ou 440 €
Saint-Barthélemy 270 € 85 € ou 270 €
Saint-Martin 270 € 85 € ou 270 €
Saint-Pierre-et-Miquelon 480 € 145 € ou 480 €
Iles Wallis-et-Futuna 846 € 170 € ou 560 €
Polynésie française 640 € 170 € ou 560 €
Nouvelle-Calédonie 670 € 160 € ou 530 €


• Extension des droits d’accès à la continuité funéraire : afin de mieux accompagner les familles, l’aide obsèques est étendue à trois niveaux :
• Les frères et sœurs des défunts sont dorénavant éligibles ;
• Les déplacements peuvent se faire dans le cadre d’une dernière visite à un proche ;
• Les déplacements deviennent possibles entre outre-mer. La prise en charge s’élèvera alors à 40 % du prix du billet d’avion aller/retour.

Les aides des régions à la mobilité des personnes touchées par un deuil

Ces aides sont de deux ordres : les premières concernent les résidents en métropole souhaitant se rendre aux obsèques d’un proche en Outre-mer, les secondes entrent dans le cadre d’un déplacement d’un département, territoire ou collectivité vers la métropole. Deux cas illustrent ces aides : l’Île-de-France et la Guadeloupe.

1) L’expérience de la région Île-de-France

Le Conseil Régional a adopté la mise en place d’un dispositif d’aide financière en faveur des Franciliens souhaitant assister aux obsèques d’un parent décédé en outre-mer. L’adoption de cette mesure spécifique, pour une partie des Franciliens, a été motivée par le fait que, pour des raisons géographiques et sociales particulières, ces populations peuvent parfois rencontrer des difficultés à maintenir un lien avec leur territoire d’origine : un retour vers ce territoire, pour des circonstances graves telles que des obsèques, étant souvent synonyme d’endettement parfois sur plusieurs années. Le dispositif régional complète un dispositif déjà existant mis en place par l’État en 2008, qui offre un tarif privilégié pour les ultramarins résidant en métropole et devant se rendre dans leur territoire d’origine pour assister aux obsèques d’un parent direct.

La mesure régionale consiste par conséquent en un remboursement a posteriori d’une partie des frais engagés par les bénéficiaires des billets "deuil" mis en place par les compagnies aériennes pratiquant ce dispositif, à savoir Corsair, Air France, Air Caraïbes et Air Austral.

Pour pouvoir prétendre à l’aide régionale, le quotient familial du demandeur doit être inférieur à 13 752 € pour un couple ou une famille, et à 20 161 € pour une personne seule sans enfants à charge.

Les bénéficiaires des billets "deuil" se verront rembourser une somme forfaitaire différente en fonction de leur destination, à savoir :
- Antilles, Saint-Martin, Saint-Barthélémy : 250 €
- Guyane : 300 € – La Réunion : 350 €
- Autres destinations : 350 €

2) L’expérience de la Région Guadeloupe en matière de continuité territoriale inversée

La Région Guadeloupe, soucieuse de permettre à tous les Guadeloupéens de se déplacer vers l’Hexagone, a mis en place l’aide régionale à la mobilité. La Région attribue une aide de cent soixante-dix euros (170 €), quelle que soit la catégorie.

L’Aide Régionale à la Mobilité ne peut être attribuée qu’une fois par année civile et ne peut être reconduite que tous les trois ans révolus.

Le certificat d’aide régionale à la mobilité n’est pas un chèque, mais un document administratif établi par la Région Guadeloupe, permettant de payer une partie d’un billet d’avion aller/retour Guadeloupe/France hexagonale. Les aides seront allouées dans la limite des crédits disponibles au budget régional et sont réservées aux résidents dont le quotient familial est inférieur ou égal à 1 200 €.
 
Méziane Benarab
 
(1) En effet, l’art. 47 de la loi EROM (devenu art. L. 1803-4 du Code des transports) précise : "L’aide destinée à financer une partie des titres de transport des personnes résidant dans l’une des collectivités mentionnées à l’art. L. 1803-2 entre leur collectivité de résidence et le territoire métropolitain est appelée "aide à la continuité territoriale".
(2) Art. 743 du Code civil : "En ligne directe, on compte autant de degrés qu’il y a de générations entre les personnes : ainsi, l’enfant est, à l’égard du père et de la mère, au premier degré, le petit-fils ou la petite-fille au second ; et réciproquement du père et de la mère à l’égard de l’enfant et des aïeuls à l’égard du petit-fils ou de la petite-fille ; ainsi de suite. En ligne collatérale, les degrés se comptent par génération, depuis l’un des parents jusques et non compris l’auteur commun, et depuis celui-ci jusqu’à l’autre parent. Ainsi, les frères et sœurs sont au deuxième degré ; l’oncle ou la tante et le neveu ou la nièce sont au troisième degré ; les cousins germains et cousines germaines au quatrième ; ainsi de suite.
 
Résonance n° 188 - Février 2023

Instances fédérales nationales et internationales :

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