Témoigner sans tabou pour dire le combat d’une guerrière atteinte d’un cancer

"J’ai eu 70 ans le 25 janvier. Ce jour-là, Florent Pagny dévoilait publiquement qu’il était touché par un cancer du poumon." Pour Jacline, cette annonce est un choc et le déclencheur d’une parole qui doit se libérer. "Le 13 novembre 2021, on m’a diagnostiqué un cancer atypique du poumon. Jusqu’à ce 25 janvier, j’avais choisi de garder le silence sur le mal qui me rongeait. Ce silence a été mal interprété, certains y ayant vu une fuite là où mon seul souci était de ne pas alarmer mes proches, famille, amis et collaborateurs pendant la période des fêtes de fin d’année."

Le 24 décembre pourtant, Jacline est encore à son bureau alors qu’elle sait que l’indispensable opération chirurgicale prévue mi-janvier est imminente, vu l’avancée de la maladie. Être forte, surtout ne rien montrer… "J’ai essayé de fêter Noël comme si de rien n’était. Le lendemain, les chirurgiens de l’hôpital Laënnec à Nantes procédaient à l’ablation totale de mon poumon droit."

Après une semaine d’hospitalisation, retour à la maison pour reprendre des forces avant d’entamer l’éprouvant traitement de chimiothérapie effectué aux Sables désormais. Malgré la fatigue, Jacline a choisi de parler. Témoigner d’abord de l’extrême gentillesse des soignants qui l’accompagnent, de l’implication du Dr Samuel Fayard, pneumologue à l’hôpital des Sables et du dévouement sans faille de l’homme que le destin a mis sur sa route il y a quelques mois "et qui n’a pas déserté malgré la maladie…"

Témoigner aussi de la réalité du cancer. "L’annonce faite par Florent Pagny et les réactions de compassion qu’elle a suscitées m’ont fait prendre conscience que le cancer ne doit plus être tabou. Que chacun, riche ou pauvre, faible ou puissant, peut être frappé. Mais que l’on peut aussi s’en sortir…"

Preuve en est, Jacline a déjà survécu à un vilain cancer du sein métastasé détecté alors qu’elle n’avait que 55 ans. C’était en 2007. "À l’époque, on m’avait dit que je n’en avais plus que pour trois mois… Je me suis battue comme une dingue !" Elle crée même son entreprise de pompes funèbres en 2008, épaulée par Gérard, l’amour de sa vie, devenu son mari, dix ans après leur rencontre. "Dans ce métier si beau et si dur où l’on côtoie la mort au quotidien, Gérard faisait souffler un vent d’optimisme et de gaité. L’annonce de ma maladie l’avait sidéré mais il a su m’accompagner sans jamais renoncer, jusqu’à ma guérison."

La bataille est gagnée, mais le répit sera hélas de courte durée. En décembre 2016, l’ennemi revient et cible cette fois l’époux tant aimé. La sentence est rude, la bataille le sera tout autant. "Les rôles se sont inversés. C’était à mon tour d’entourer Gérard à chaque étape des traitements et rendez-vous. J’étais devenue l’optimiste, celle qui y croyait, remuait ciel et terre pour qu’il s’en sorte." Contraint de suspendre ses fonctions de rédacteur en chef du Journal des Sables, Gérard supporte difficilement de se voir atteint dans son intégrité physique. Si le moral est parfois en berne, l’esprit reste lui toujours aussi vif, la répartie drôle et cinglante. Le 18 avril 2018 pourtant, Gérard rend les armes. "C’était un mercredi, jour de bouclage du journal. Ce n’est pas un hasard…".

Malgré l’immense chagrin, le manque qui taraude jour et nuit, Jacline sent au plus profond d’elle-même que son mari veille sur elle. "En fin d’année dernière, alors que je ne trouvais pas de pneumologue, je suis certaine que Gérard m’a soufflé de reprendre contact avec le médecin qui l’avait soigné au CHU de Nantes. Le Dr Touchefeu se souvenait parfaitement de Gérard, de leurs échanges… Il m’a orientée vers un ancien interne du CHU devenu pneumologue. Grâce à lui, je suis sortie de l’impasse dans laquelle je me trouvais."

Vivante ? Guerrière ? Jacline l’est assurément. Son ressort ? Ni la notoriété, ni le pouvoir, ni l’argent. "Mais atteindre vaille que vaille les objectifs que je me suis fixée. Et aujourd’hui, mon objectif est bien de poursuivre la transition au sein d’Accueil Funéraire 85 comme je m’y suis engagée auprès de Nicolas Goossens⁽²⁾. J’ai juste besoin d’un peu de temps. Je n’ai pas déserté, je reste joignable. Le combat continue…"