Aux professionnels qui me lisent, aux gestionnaires de cimetières confrontés aux questions d’octroi de concession et du droit qui en découle, sachez que l’A.NA.PE.C. peut vous conseiller dans le cadre de sa mission de service public dédié aux cimetières et à tous les agents qui y œuvrent. N’hésitez pas à nous contacter.
La loi légifère dans son art. L. 2223-3 le droit à inhumation dans une commune :
- Aux personnes décédées sur son territoire, quel que soit leur domicile ;
- Aux personnes domiciliées sur son territoire, alors même qu’elles seraient décédées dans une autre commune ;
- Aux personnes non domiciliées dans la commune mais qui y ont droit à une sépulture de famille ;
- Aux Français établis hors de France n’ayant pas une sépulture de famille dans la commune et qui sont inscrits sur la liste électorale de celle-ci.
Rappelons que l’inhumation s’entend tant pour une inhumation traditionnelle que pour une inhumation en site cinéraire. En revanche, le Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) est très peu disert sur le type de concession, dont l’initiative et la gestion relèvent de la stricte compétence du maire et de son conseil municipal.
Deux articles du CGCT constituent la base de la gestion des concessions dans le cimetière communal
L’art. L. 2223-13
- Lorsque l’étendue des cimetières le permet, il peut être concédé des terrains aux personnes qui désirent y fonder leur sépulture et celle de leurs enfants ou successeurs. Les bénéficiaires de la concession peuvent construire sur ces terrains des caveaux, monuments et tombeaux.
- Il peut être également concédé des espaces pour le dépôt ou l’inhumation des urnes dans le cimetière.
- Le terrain nécessaire aux séparations et passages établis autour des concessions de terrains mentionnées ci-dessus est fourni par la commune.
L’art. L. 2223-14
Les communes peuvent, sans toutefois être tenues d’instituer l’ensemble des catégories ci-après énumérées, accorder dans leurs cimetières :
1° Des concessions temporaires pour quinze ans au plus ;
2° Des concessions trentenaires ;
3° Des concessions cinquantenaires ;
4° Des concessions perpétuelles.
De l’art. L. 2223-13, la jurisprudence administrative a défini trois types de concessions :
- La concession individuelle, est strictement destinée à la personne au profit de laquelle elle a été acquise, à l’exclusion de toute autre.
- La concession collective, est accordée, en indivision, au bénéfice de personnes nommément désignées dans l’acte de concession ayant ou non des liens familiaux entre elles.
- La concession familiale, pour laquelle le concessionnaire a décidé d’y permettre, outre sa propre inhumation, celle des membres de sa famille, ce qui inclut son conjoint, ses ascendants, ses descendants, ses alliés, ses enfants adoptifs ainsi que des personnes unies à lui par des liens particuliers d’affection.
Si la concession familiale, choisie souvent par défaut, est majoritaire dans nos cimetières, il s’avère que sa gestion amène fréquemment des casse-têtes juridiques qui obligent à l’arbitrage du juge.
En effet, à compter du jour où un concessionnaire acquiert une concession pour sa famille, beaucoup d’évènements familiaux peuvent se produire au fil des ans, sans compter que les décès ne s’opèrent pas forcément dans l’ordre ou la lignée que le concessionnaire a pu prévoir lors de son acquisition. Certes, seul le concessionnaire demeure le premier arbitre de la mise en œuvre du droit à inhumation dans sa concession, mais généralement, il s’avère qu’il en est le premier occupant.
Or, l’ouverture d’une concession n’est possible que sur autorisation dudit concessionnaire, et s’il est décédé, l’accord est alors requis auprès de l’ensemble des descendants. Devant l’impossibilité pragmatique à pouvoir satisfaire à cette obligation, les conservateurs de cimetières demandent à la personne se présentant comme le plus proche parent de se porter fort pour l’ensemble des héritiers, sauf si le concessionnaire a désigné par testament de transmettre à l’un de ses héritiers son titre de concession, auquel cas sa volonté doit être respectée.
Les conflits deviennent ainsi de plus en plus fréquents, en particulier dans les familles recomposées ou désunies, où chacun défend un primo droit à d’autres. Il existe pourtant une solution permettant d’éviter les conflits familiaux sur le droit à être inhumé : la concession collective. Toute personne vivante peut acquérir une concession collective et en octroyer les droits à être inhumé dans le respect de l’art. L. 2223-3 du CGCT.
Alors que, bien souvent, une concession familiale est attribuée au premier défunt, la concession collective peut tout à fait être acquise par une personne, sans forcément de lien de parenté avec le défunt, désignant nominativement, sans ordre de succession ou de préséance, ceux et celles qui verront leur place réservée. De son vivant, le concessionnaire peut en modifier la liste comme il le voudra, mais, une fois celui-ci décédé, la dernière liste nominative sera figée et impossible à déroger.
L’avantage de la concession collective, on le voit bien, est de couper court à d’éventuels conflits. L’inconvénient est qu’une personne ayant été désignée dans une concession collective en un lieu peut, au fil de sa vie, avoir exprimé le souhait de rejoindre d’autres membres de sa famille en un autre lieu. La place qui lui était réservée au sein de la concession collective est alors perdue (sauf si le concessionnaire toujours en vie la réattribue), alors que, dans une concession familiale, toute personne membre de la famille comme définie plus haut détient un droit à inhumation cessible de fait.
Ce sont souvent les pompes funèbres qui, pour éviter une démarche en mairie de la part des familles en deuil, s’acquittent de l’achat d’une concession pour le compte des familles.
La concession familiale, plus facile à mettre en œuvre, est trop souvent proposée sans que les familles aient pris connaissance des contraintes, avantages ou inconvénients des divers types de concessions. Il en va de même pour la durée, où il peut arriver que ce soit le coût qui la détermine, alors qu’au cas par cas il serait souhaitable que chaque acquéreur ait bien pris connaissance des contraintes d’attribution d’une concession en termes d’entretien et de visites.
À noter toutefois que, même dans une concession familiale, le concessionnaire, de son vivant, a exclusivement la possibilité d’exclure de sa concession certains membres de sa famille. À son décès, la sépulture devient un bien de famille, et les descendants du concessionnaire ne peuvent exclure l’un d’entre eux du droit à y être inhumé. A contrario, une personne désignée dans une concession collective peut y être inhumée selon le 3e alinéa de l’art. L. 2223-3, sans pour autant être décédée ou domiciliée dans la commune.
Isabelle Prigent
Présidente de l’A.NA.PE.C.
Résonance numéro spécial n° 9 - Décembre 2019
Suivez-nous sur les réseaux sociaux :