Les chapelles funéraires, souvent associées à des concessions perpétuelles, qui, après avoir fait l’objet d’une procédure longue de reprise administrative scrupuleusement respectée (art. L. 2223-17 et L. 2223-18 du Code Général des Collectivités Territoriales – CGCT) sont le parfait exemple d’équipement que les collectivités locales peuvent restaurer avec l’aide de quelques spécialistes.
Art. L. 2223-17
"Lorsque, après une période de trente ans, une concession a cessé d’être entretenue, le maire peut constater cet état d’abandon par procès-verbal porté à la connaissance du public et des familles.
Si, trois ans après cette publicité régulièrement effectuée, la concession est toujours en état d’abandon, le maire a la faculté de saisir le conseil municipal, qui est appelé à décider si la reprise de la concession est prononcée ou non. Dans l’affirmative, le maire peut prendre un arrêté prononçant la reprise par la commune des terrains affectés à cette concession."
Art. L. 2223-18
"Un décret en Conseil d’État fixe :
1° Les conditions dans lesquelles sont dressés les procès-verbaux constatant l’état d’abandon ;
2° Les modalités de la publicité qui doit être faite pour porter les procès-verbaux à la connaissance des familles et du public ;
3° Les mesures à prendre par les communes pour conserver les noms des personnes inhumées dans la concession et la réinhumation ou la crémation des ossements qui peuvent s’y trouver encore ;
4° Les conditions dans lesquelles les articles L. 2223-14 à L. 2223-17 sont applicables aux concessions des espaces pour le dépôt ou l’inhumation des urnes dans le cimetière."
Sauver ce patrimoine funéraire est une opportunité de mise en valeur du savoir-faire d’artisans et de professionnels spécialisés dans la restauration d’un patrimoine, sans qui celui-ci pourrait disparaître à tout jamais. L’action des communes et des responsables de cimetières en faveur de cette sauvegarde est essentielle à plus d’un titre.
Tout d’abord, laisser ce patrimoine se détériorer pour cause d’abandon et prendre le risque de maintenir en l’état des monuments en péril sans agir peut aboutir à conserver des monuments susceptibles de représenter un danger pour les visiteurs desdits cimetières. Combien de collectivités et de cimetières, par manque de moyens ou de solutions pour la sauvegarde de ce patrimoine, se voient contraints d’installer momentanément, ou plus durablement, des échafaudages et/ou de condamner l’accès à ces chapelles ?
Avant restauration. | Après restauration. |
Ces chantiers inesthétiques sont un mauvais signal donné aux visiteurs vis-à-vis de l’entretien général d’un cimetière. Des pierres descellées ou dégrafées, des éléments fragilisés par le temps, des vitraux centenaires fendus ou partiellement détruits, des portes ou objets en bronze, disparaissent ainsi peu à peu faute d’attention particulière portée à la restauration. Pourtant, une fois restaurés, ces éléments illustrent à quel point, à l’origine, fondateurs et artisans partageaient le goût du beau et de la symbolique pour représenter avec soin l’histoire familiale.
Ensuite, sauver ce patrimoine, c’est aussi sauvegarder l’histoire des communes qui l’abrite et honorer la mémoire des familles fondatrices de ces beaux monuments funéraires. Certains d’entre eux ont été construits par d’illustres personnages, industriels ou artisans nés dans la commune et ayant contribué à l’histoire économique de la ville. Certains monuments illustrent encore parfaitement bien certaines époques et mouvements architecturaux (Art nouveau, Art déco par exemple). Imaginer une nouvelle destination à ces équipements, après restauration, c’est aussi permettre de perpétuer l’histoire des villes et villages.
Nous pouvons citer :
Les chapelles à l’état d’abandon susceptibles d’être réaffectées à un nouvel usage : columbarium, ossuaire, lieu d’exposition de sculptures et d’objets funéraires anciens.
Les chapelles peuvent être revendues en l’état en vue de leur restauration et transformation afin d’y accueillir de nouveaux défunts (démontage-remontage des chapelles avant démolition et reconstruction de caveaux en sous-œuvre afin de répondre aux normes actuelles d’inhumation).
Simple mise en valeur de savoir-faire ancestraux et de styles architecturaux appartenant au passé et que chaque visiteur aura plaisir à découvrir.
Enfin, c’est aussi permettre la transmission des savoirs à des jeunes qui se passionnent pour les nombreux métiers de la restauration du patrimoine (travail de la pierre, sculpture, dorure, gravure, etc.). Des stages et chantiers-écoles peuvent être ainsi organisés dans les cimetières par quelques associations spécialisées. Les jeunes réunis en petits groupes, encadrés par un responsable pédagogique, apprennent et développent un savoir-faire technique qu’ils pourront transmettre à leur tour.
Un seul mot d’ordre :
- Le respect des matériaux d’origine pour une restauration réussie et durable dans le temps. Assister à l’organisation de ces chantiers, constater la passion de ces jeunes pour les métiers de la restauration du patrimoine et observer la minutie avec laquelle ils œuvrent est la meilleure manière de se convaincre que de multiples solutions existent pour sauvegarder pendant longtemps encore ce précieux patrimoine.
Une charte internationale relative à la création et à la restauration des monuments et des sites (Charte de Venise - 1964) rappelle l’importance de la portée historique et culturelle que revêt la restauration du patrimoine (art. 3). "La conservation et la restauration des monuments visent à sauvegarder tout autant l’œuvre d’art que le témoin d’histoire."
Pour les chapelles existantes, adossées à une concession active, partager avec les familles l’expertise acquise et les conseils prodigués par les spécialistes permet aussi de valoriser les missions des personnels de cimetières.
Souvent intéressées par une possible réhabilitation, les familles hésitent à se lancer dans de tels projets, imaginant des coûts insurmontables. Toutefois, bien conseillées, et en respectant quelques étapes essentielles, elles pourront défiscaliser 50 % du montant des travaux, pour une restauration parfaitement réalisée.
La Fondation du patrimoine accompagne efficacement conservateurs de cimetières et familles à chaque étape de leurs démarches, qu’il s’agisse d’une chapelle en reprise pour les gestionnaires de cimetières ou d’une chapelle concédée pour les familles.
Dès lors que la sépulture présente un caractère patrimonial évident, une procédure spécifique peut être mise en œuvre avec le concours de la Fondation du patrimoine. Sous l’impulsion des municipalités, les personnels des cimetières trouvent là l’occasion de s’intéresser à la restauration d’un patrimoine qui contribuera à la beauté des cimetières partout en France.
L’A.NA.PE.C. (Association Nationale des Personnels de Cimetières) est à l’écoute des collectivités adhérentes, et se positionne en tant que relais d’information afin de faciliter toute démarche en faveur de la protection du patrimoine sépulcral dans les cimetières. N’hésitez pas à nous rejoindre en prenant contact par mail : |
N’hésitez pas à consulter les liens mis à disposition par la Fondation du patrimoine afin de découvrir dans le détail la procédure à suivre ainsi que de nombreuses réalisations. https://www.fondation-patrimoine.org/aides-au-patrimoine/aide-au-patrimoine-prive/le-label |
Isabelle Prigent
Présidente de L’A.NA.PE.C.
Résonance n° 151 - Juin 2019
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