Le programme ENEID – Éternités Numériques s’intéresse aux identités numériques post-mortem et aux usages mémoriaux du web. Se trouve ci-après une sélection des résultats d’une enquête statistique diffusée sur différentes plateformes funéraires, socionumériques, listes universitaires ou blogues… de juin 2015 à octobre 2016 ainsi qu’une sélection de citations extraites de l’enquête qualitative. Échantillon : 766 répondants, redressé par catégorie socioprofessionnelle. Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, Université de technologie de Compiègne et Université Paris 13. Programme ANR Sociétés innovantes 2014-2018.
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Le deuil et les usages du numérique : une surreprésentation féminine
• Une prépondérance de femmes a répondu au questionnaire (67,5 %) ;
• Elles ont une plus grande propension à participer aux enquêtes ;
• Elles sont plus expressives que les hommes et montrent plus facilement leurs émotions dans leurs usages funéraires du web mais aussi dans les pratiques hors ligne ;
• Elles ont, pendant longtemps, pris en charge le port du deuil ;
• Elles utilisent activement les réseaux socionumériques ;
• Leurs compétences et usages ne sont pas naturels mais résultent de la construction de rapports sociaux…
Les usages du numérique dans le cadre d’un deuil
Champ : 420 répondants ayant perdu un proche.
D’après l’enquête statistique, les usages numériques les plus fréquents dans le cadre d’un deuil sont les pages web d’hommage (23,2 %), les forums (18,2 %) et le compte Facebook, toujours actif, d’un défunt (15,4 %).
Les usages du numérique dans le cadre d’un deuil et l’expressivité en ligne
Champ : 506 répondants ayant perdu un proche
Les personnes ayant une pratique plus active sur les réseaux socionumériques ont davantage eu recours au numérique dans le cadre d’un deuil (81,3 % vs 65,5 %).
Le rôle des pratiques numériques d’hommages pour les endeuillé.e.s
Champ : 288 répondants ayant perdu un proche
58,3 % des visiteurs de pages web dans le cadre d’un deuil se déclarent tout à fait d’accord avec le fait que cette activité leur permet de partager des sentiments et souvenirs. Pour 63,5 %, la consultation de ces pages leur permet de se recueillir.
La dimension collective est très importante puisque 36,8 % se disent tout à fait d’accord avec le fait que la consultation de pages web d’hommes ou sites funéraires les a aidé.e.s à créer des liens avec d’autres endeuillé.e.s.
| Extrait d’entretien : “Le forum Doctissimo […], ça m’a beaucoup aidée parce que ça me permettait de pouvoir exprimer tout ce qu’il y avait de noir en moi […], tout ce qui était très sombre, je pouvais l’exprimer et mettre des mots sur mes maux. ça me libérait […]” Femme, 32 ans, en recherche d’emploi, région Centre-Val de Loire. |
Vivre en ligne après la mort : les volontés sur nos données numériques post-mortem
Champ : 696 répondants ayant perdu un proche
Un quart des répondants (26,7 %) pense que leurs données en ligne devraient être détruites après leur mort et un quart (26,3 %) considère qu’elles devraient être accessibles à la famille. Seule une minorité (2,7 %) pense que leurs données numériques devraient, après leur mort, devenir accessibles à tous.
| Extrait d’entretien : “Je sais que quand tu meurs, c’est les autres qui disposent de toi” Étudiant colombien, 24 ans. |
La visite de cimetières ou de sites cinéraires selon la croyance religieuse
| Souvent,Très souvent : de 1/jour à 1/semaine Parfois : 1/mois Rarement : 1/an |
Champ : 524 répondants ayant perdu un proche
39,4 % des croyants déclarent se rendre souvent ou très souvent sur des tombes ou sites cinéraires. 48,1 % des d’athées ou agnostiques déclarent ne jamais s’y rendre.
Une étroite corrélation entre les visites de lieux tombals ou cinéraires et les usages de plateformes numériques dans le cadre d’un deuil
Champ : 477 répondants ayant perdu un proche
85,4 % des endeuillé.e.s qui se rendent souvent ou très souvent sur la tombe ou le site cinéraire d’un être cher disparu visitent également, souvent ou très souvent, une plateforme numérique dans le cadre d’un deuil.
| Extrait d’entretien : “Pour moi... [le mémorial en ligne] Toujours là (toujoursla.com), c’est de la même manière que si j’allais au cimetière, j’apporte ce que je veux. […] Parce que je peux pas aller au cimetière tous les jours ! […] Là… je vais dans mon bureau, je vais sur le site, hop, je mets un petit mot à mon fils, je lui parle et voilà” Institutrice retraitée, 60 ans, Auxerre. |
Le deuil en ligne : une pratique certes complémentaire aux rites traditionnels mais non exclusive…
| Souvent,Très souvent : de 1/jour à 1/semaine Parfois : 1/mois Rarement : 1/an |
Champ : 587 répondants ayant perdu un proche
Les pratiques funéraires en ligne sont moindrement liées aux pratiques traditionnelles de deuil : 52,2 % des endeuillé.e.s qui visitent souvent ou très souvent un site web dans le cadre d’un deuil se rendent souvent ou très souvent sur la tombe ou le site cinéraire d’un défunt. Seuls 8,1 % des usagers ayant déjà visité un site web dans le cadre d’un deuil ne se déplacent jamais au cimetière ou sur un site cinéraire.
Les usages du numérique dans le cadre d’un deuil selon la catégorie socioprofessionnelle
Champ : 477 répondants ayant perdu un proche
48,6 % des cadres et professions intellectuelles supérieures n’ont jamais utilisé le numérique dans le cadre d’un deuil, contre 25,7 % des employés, 25,8 % des personnes en recherche d’emploi ou 13,5 % des personnes sans activité professionnelle.
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Responsable scientifique de cette enquête :
http://eneid.univ-paris3.fr/ Traitement statistique : Direction scientifique du projet ENEID - éternités numériques : Conception technique de l’enquête statistique : Participants à la réalisation, diffusion et exploitation de l’enquête statistique : Participation à l’enquête qualitative : Remerciements pour leurs critiques et commentaires à : Nous remercions également toutes les personnes qui ont accepté de tester et de diffuser le questionnaire ou d’y participer. |
Hélène Bourdeloie : Maître de conférences - Université Paris XIII
Résonance n°138 - Mars 2018
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