Le 1er novembre est une commémoration religieuse où les catholiques honorent leurs défunts.
Georges Martinez, président de l’A.NA.PE.C. |
- Les protestants ne reconnaissent qu’Un seul Saint, Dieu, 3 fois Saint et boudent la fête de la Toussaint inscrite au calendrier le lendemain de la fête dite de la Réformation.
- Les orthodoxes fêtent la Toussaint le dimanche qui suit la Pentecôte.
- Les juifs fêtent à la Toussaint, tous les saints connus ou inconnus.
- Les musulmans ne reconnaissent pas cette fête.
Mais tous commémorent les défunts le 2 novembre. Pour des raisons pratiques, le 1er novembre étant férié, les us populaires ont transformé le jour de Toussaint en jour de mémoire.
Dans les faits, peu importent les raisons dogmatiques ou historiques qui ont amené cette proximité de dates, l’essentiel est de prendre le temps de ce devoir de mémoire qui honore autant ceux qui y pensent que ceux à qui l’on pense.
La disparition d’un être cher reste une épreuve qui lamine chacun à des degrés difficilement quantifiables. Comme pour la maladie qui ronge le corps, la souffrance ne se perçoit pas de la même façon d’un être à l’autre. Mais elle est réelle, et certaines tragédies ne font qu’amplifier la douleur.
La mort dispose de cette force indéniable d’être inéluctable et donc raisonnablement attendue, mais pour autant honnie. Bien que certains, souvent en grande détresse morale ou physique, la souhaitent avec ardeur dans leur for intérieur, l’être humain en général vit sa vie dans un déni profond de cette fin qu’il espère tardive.
En France, chaque année, plus de 500 000 personnes décèdent et les courbes démographiques annoncent une hausse des statistiques à 800 000 d’ici 2020. Et, telle une fonction mathématique, chaque décès provoque un deuil dans cette séparation plus ou moins soudaine entre celui ou celle qui quitte la vie et ceux et celles qui y demeurent, conservant en leur cœur le souvenir parfois obsédant du défunt.
Tombes fleuries.
Chaque deuil sera différent et il n’existe pas d’échelle de valeur
Il ne s’agit pas de se préparer à l’oubli, il s’agit de s’acclimater, d’apprendre à vivre sans, de s’habituer à vivre loin. Même si la relation spirituelle perdure, le contact physique, la vue, l’ouïe ou le toucher ne seront plus, et notre esprit est tel que rien que le fait de savoir cette immuabilité suffit à nous attrister.
Certains, par religion ou philosophie, s’accrochent à l’espoir d’une vie après la mort, réincarnée ou pas. N’est-ce pas plutôt une bonne chose d’espérer qu’une vie meilleure attend ceux qui, maintenant passés, méritent l’aisance et le bonheur qui leur ont tant fait défaut lors de leur incarnation sur terre !
- Garder nos disparus en mémoire est une manière de les accompagner, de porter leur âme vers une autre vie que l’on n’imagine que meilleure.
- Garder nos disparus en mémoire est une manière d’en rester tout proches, de ralentir cette séparation imposée contre notre gré.
- Garder nos disparus en mémoire, c’est aussi une façon de mettre le magnéto de la vie sur pause pour figer les derniers instants de vie commune.
On se souvient, photos et écrits aidant, de son sourire, de son regard ou de sa voix. On se rappelle sa réaction ou son attitude lors d’un évènement particulier. Cela devient tel que les images du souvenir s’associent entre elles et que certains temps forts passés seront désormais rangés dans notre mémoire dans l’association indissociable du visage du défunt aimé.
Alors, tous ces moments de vie n’ont pas besoin de temps particuliers pour être. Ils n’ont pas besoin d’une fête pour se rappeler leur raison d’exister. Ils minent le fond de notre existence telles des blessures ouvertes en peine de cicatrisations même si, pour certains qui croient et espèrent, le souvenir de l’être aimé demeure la seule chose encore capable d’illuminer leur journée.
Mais cette période de Toussaint, souvent accompagnée sous nos contrées d’une météo triste et fantasque, force notre souvenir au point de guider nos pas vers un lieu de mémoire, et les cimetières en sont l’expression la plus visible.
De partout affluent les peuples, en famille ou esseulés, et rien que l’aspect du visiteur accompagné ou pas laisse imaginer à l’œil avisé le lien qui l’unissait au défunt. Au fil des années, des codes se sont institués, dans la constitution du groupe, entre adultes ou avec enfants, l’heure et le jour de la visite, dans le silence ou dans une grande effervescence, des codes vestimentaires bien sûr aussi, où tous les styles se rencontrent. Toutes ces images qui s’appuient sur cette croyance que le mort nous voit le visiter et qu’il ne faut pas le décevoir.
Communément, on apporte quelques fleurs, souvent des chrysanthèmes en cette période de l’année, mais les juifs ont cette merveilleuse tradition de déposer un caillou, signe de leur passage sur la tombe de la personne visitée.
Tous les défunts ne bénéficient pas d’un lieu de sépulture, et la mémoire a parfois du mal à s’incarner dans un lieu précis. C’est d’ailleurs le sens même de la démarche de la dispersion de cendres en pleine nature après une crémation.
La pleine nature par définition est indéfinie et sans limite
Le lieu de dispersion est un point de départ qui ne permet pas l’irréversibilité. Une fois dispersées, les cendres ne pourront plus être récupérées et seront par la nature même de la dispersion, en mer ou en rivière dans le vide ou en plein vent, éparpillées dans une dimension inatteignable à l’homme. Si se retrouver au lieu même de la dispersion peut présenter une aide, cela n’a en soi guère de sens, car le geste vaut plus par la pérennité de son éternité.
Pour les familles qui ont choisi la crémation, les crématoriums organisent traditionnellement au cours du mois de novembre des temps de mémoire, où bien souvent les noms des défunts de l’année sont cités entre méditations et recueillements. Les catholiques célèbrent la messe du 2 novembre en mémoire des défunts de l’année.
Certains cimetières offrent aux familles un moment de recueillement dans leur salle de cérémonie, pour ceux qui en possèdent une. Citons l’expérience de Puteaux, adhérente à l’A.NA.PE.C, qui, depuis quelques années maintenant, prépare avec tout le pôle funéraire de la ville ce temps fort pour les familles. Des textes et poèmes particulièrement inspirés à cette intention viennent illustrer un diaporama, et un CD souvenir est distribué aux participants.
L’A.NA.PE.C soutient par la pensée et l’amitié tous ceux et celles qui, cette année encore, se souviennent avec affection de ceux et celles qui nous ont précédés.
Georges Martinez
Président de l’A.NA.PE.C
Résonance n°114 - Octobre 2015
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