L'Association NAtionale des PErsonnels de Cimetière (A.NA.PE.C) est souvent sollicitée par ses adhérents sur la question de l'entretien des sépultures.
Georges Martinez, président de l'A.NA.PE.C. |
Si le Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) fixe les conditions d'octroi des concessions et celles du droit à l'inhumation, il ne dit que peu de chose sur les conditions de l'entretien. Toutefois, il stipule à l'art. L. 2223-17 que, lorsque après une période de trente ans la concession a cessé d'être entretenue, le maire peut constater cet état d'abandon par procès-verbal porté à la connaissance du public et des familles.
En cas de péril imminent, le maire peut de par son pouvoir de police des monuments funéraires, art. L. 2213-8 du CGCT, appliquer des mesures qui se traduisent par l'art. L. 511-4-1 du Code de la construction et de l'habitation, introduit par l'art. 21 de la loi du 19-12-2008, qui stipule :
"Le maire peut prescrire la réparation ou la démolition des monuments funéraires lorsqu'ils menacent ruine et qu'ils pourraient, par leur effondrement, compromettre la sécurité ou lorsque, d'une façon générale, ils n'offrent pas les garanties de solidité nécessaires au maintien de la sécurité publique.
Toute personne ayant connaissance de faits révélant l'insécurité d'un monument funéraire est tenue de signaler ces faits au maire, qui peut recourir à la procédure prévue aux alinéas suivants.
Le maire, à l'issue d'une procédure contradictoire dont les modalités sont définies par décret, met les personnes titulaires de la concession en demeure de faire, dans un délai déterminé, les réparations nécessaires pour mettre fin durablement au danger ou les travaux de démolition, ainsi que, s'il y a lieu, de prendre les mesures indispensables pour préserver les monuments mitoyens.
L'arrêté pris en application de l'alinéa précédent est notifié aux personnes titulaires de la concession. À défaut de connaître l'adresse actuelle de ces personnes ou de pouvoir les identifier, la notification les concernant est valablement effectuée par affichage à la mairie de la commune où est situé le cimetière ainsi que par affichage au cimetière.
Sur le rapport d'un homme de l'art ou des services techniques compétents, le maire constate la réalisation des travaux prescrits ainsi que leur date d'achèvement et prononce la mainlevée de l'arrêté.
Lorsque l'arrêté n'a pas été exécuté dans le délai fixé, le maire met en demeure les personnes titulaires de la concession d'y procéder dans le délai qu'il fixe et qui ne peut être inférieur à un mois.
À défaut de réalisation des travaux dans le délai imparti, le maire, par décision motivée, fait procéder d'office à leur exécution. Il peut également faire procéder à la démolition prescrite, sur ordonnance du juge statuant en la forme des référés, rendue à sa demande.
Lorsque la commune se substitue aux personnes titulaires de la concession défaillantes et fait usage des pouvoirs d'exécution d'office qui lui sont reconnus, elle agit en leur lieu et place, pour leur compte et à leurs frais.
Les frais de toute nature, avancés par la commune lorsqu'elle s'est substituée aux personnes titulaires de la concession défaillantes, sont recouvrés comme en matière de contributions directes."
Voilà qui est dit et bien dit !
Mais attention, cette loi ne s'applique qu'aux monuments et se heurte aux contraintes de la réglementation funéraire. Il n'est donc pas question, au prétexte de péril, d'exhumer des corps sans respecter les procédures de reprise ou d'abandon.
Puisqu'il est question de monuments, l'occasion est donnée de rappeler que le maire n'a aucun pouvoir pour statuer sur l'esthétique d'un monument funéraire. Le législateur lui a tout juste octroyé celui de fixer les dimensions maximales des monuments érigés sur les fosses (art. 18 de la loi de 2008).
Rappelons que le terrain d'une concession est, par définition, concédé à une personne physique et que cette dernière n'en est nullement propriétaire. Cela lui confère des droits mais aussi des devoirs, qui doivent être décrits dans le règlement.
Toutefois, les signes funéraires, dont font partie les pierres tombales, stèles et autres monuments, appartiennent en propre au concessionnaire et sont qualifiés par le droit "d'immeubles par destination". C'est pourquoi le fait de toucher à ces biens sans avoir été couvert par l'une des procédures évoquées ci-dessus pourrait constituer une voie de fait, et engager la responsabilité du maire.
Les gestionnaires de cimetières le savent bien, dès lors que l'on touche à une concession, il faut exercer la plus grande prudence. Nous venons de le voir, si la législation a bien prévu quelques cas extrêmes, rien n'est dit sur le quotidien et il est malheureusement fréquent que le juge soit sollicité pour trancher quelque contentieux familial ou de tiers sur des faits ayant affecté une sépulture.
Le règlement du cimetière (cf. article A.NA.PE.C de Résonance n°105 de novembre 2014) est le meilleur des outils pour se mettre à l'abri de quelque recours, à condition qu'il n'outrepasse pas le droit fixé par la loi, dont les codes ne sont que l'expression. En effet, si la loi, d'une manière générale ou parfois très précise, fixe les principes, le règlement du cimetière doit indiquer très clairement et localement ses préconisations, et l'action de la collectivité en cas de manquement audit règlement.
Le traitement des fleurs et plantations est un souci permanent pour la préservation de la bonne esthétique du cimetière. Il ne pourra juridiquement être reproché à l'administration du cimetière de nettoyer les tombes en enlevant les fleurs ou plantes fanées dès lors que le règlement explique les conditions de fleurissement. Il est correct et régulier de s'octroyer le droit de jeter les chrysanthèmes et autres plantes après leur fanaison, tout comme de jeter les gerbes détrempées ou broyées par les intempéries, quelques jours après un convoi.
Pour les plantations, les agents du cimetière ne sont pas autorisés à tailler, couper ou arracher sans l'autorisation du concessionnaire, car, de par son ancrage dans le terrain concédé, il en devient "immeuble". Il faut donc, là aussi, que le règlement décrive la procédure, à savoir peut-être l'interdiction de planter, car nous savons tous qu'un petit arbuste planté lors d'obsèques deviendra arbre quelques années plus tard. L'argumentaire sur l'interdiction de planter repose sur le fait que les racines sortant forcément du terrain concédé oblige le concessionnaire à outrepasser ses droits et à se mettre en position d'ingérence auprès du concessionnaire voisin qui peut le lui reprocher devant une juridiction, et en particulier si ladite concession subit des dégradations (fissures, infiltrations...). Un autre argumentaire consiste également à souligner que la végétation empiète sur la partie publique qui, elle, ne fait pas partie du terrain concédé. Le règlement du cimetière doit donc expliquer les moyens que la ville mettra en œuvre afin de couper court à l'abus de végétation, en précisant les modalités de recouvrement des frais auprès du concessionnaire.
Un autre abus administratif tient à penser que toute entreprise intervenant sur des tombes doive disposer d'une habilitation funéraire. Le CGCT définit à l'art. L. 2223-19 le service extérieur des pompes funèbres comme une mission de service public comprenant en particulier la fourniture de personnel et des objets et prestations nécessaires aux obsèques, inhumations, exhumations et crémations, à l'exception des plaques funéraires, emblèmes religieux, fleurs, travaux divers d'imprimerie et de la marbrerie funéraire. Ainsi, seules les actions décrites à l'article nécessitent une habilitation.
Pour faire plus simple, on peut admettre que l'habilitation funéraire n'est requise que lorsqu'on est au contact du corps, ou de ses restes, ou du cercueil. Elle ne l'est donc pas pour les travaux de marbrerie, de gravure, de maçonnerie ou de peinture.
Le défenseur des droits, dans son rapport relatif à la législation funéraire indique, en octobre 2012 :
Ces travaux font donc généralement l’objet d’une déclaration formalisée auprès du maire, chargé du maintien de l'ordre et de la décence dans les cimetières suivant les dispositions de l’art. L. 2213-9 du CGCT. En principe, ces travaux ne peuvent être menés que par les héritiers du fondateur, la répartition de la contribution aux frais d’entretien, sauf pour les travaux strictement nécessaires à la conservation de la sépulture, restant néanmoins au bon vouloir des cotitulaires de la concession.
Aucune disposition du CGCT n’interdit expressément qu’un tiers ou une personne morale puisse présenter une demande d’autorisation d’effectuer de tels travaux (sauf évidemment le délit de violation de sépulture), une telle exclusion ne résultant que de l’interprétation de la jurisprudence, ayant trait à des conflits familiaux autour de la prise en charge des frais générés par la réfection d’un monument. Le droit des familles sur les constructions présentes sur les concessions funéraires est en effet considéré comme un quasi-droit de propriété. Il appartient donc au maire de prévoir très précisément, au sein d’un règlement de cimetière, quelles sont les personnes susceptibles de procéder à des travaux d’entretien sur les concessions funéraires, et la procédure à suivre en ce cas.
Ainsi, un conservateur ne peut s'opposer à l'action d'une entreprise dès lors que les travaux effectués le sont bien à la demande du concessionnaire ou de ses ayants cause. Il est toutefois important que toute intervention soit couverte par une demande de travaux cosignée par le concessionnaire ou un de ses héritiers et l'entreprise, et que toute information sur l'entreprise soit connue, et en particulier l'étendue de ses garanties d'assurance.
Personnels des cimetières, afin d'optimiser votre gestion quotidienne, adhérez et faites adhérer à l'A.NA.PE.C.
Le président
Georges Martinez
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