Depuis une décennie, le rapport entre les usagers et les institutions publiques évolue vers une plus grande prise en compte du citoyen/usager afin d’assurer un meilleur service dans le respect de l’usage des fonds publics. Cela se traduit par le vote de différents textes législatifs.
Jo Le Lamer, président de la FFC. |
On peut évoquer, de façon non exhaustive
- La loi 2002-2 de janvier 2002, concernant les établissements sociaux-médicaux, qui institue des conseils d’établissement regroupant les différents partenaires gravitant autour de la prise en charge de l’usager. La loi de mars 2007 sur les tutelles s’en inspirera.
- La loi du 4 mars 2004 et l’art. L. 1112-3 du Code de la santé publique, demandant la mise en place des CRUQ, commission des relation des usagers au sein des hôpitaux, afin d’établir une grande transparence, avec la participation de représentants des usagers au côté d’administratifs et du corps médical.
Pourquoi un Comité d'Éthique ?
La crémation est désormais un mode d’obsèques habituel et évolutif, mais ses applications pratiques, éthiques et philosophiques demeurent mal connues pour la plupart des acteurs. C'est pourquoi les crématistes demandent que soit instauré dans chaque crématorium un Comité d'Éthique, ce qui s'inscrit dans la démarche décrite ci-dessus de transparence, d’efficacité et de garantie d’un bon service public. Pour cela, les collectivités doivent se doter d’outils permettant de recueillir les avis de chacun, et d’en discuter dans le but d’apporter une amélioration.
But des Comités d'Éthique
Pour satisfaire les usagers, dans le respect des règles du service public (continuité, adaptabilité, égalité) et une gestion saine et transparente, il s’agit de suivre le fonctionnement du crématorium dans ses aspects humains et qualitatifs, notamment dans la relation avec les familles, les entreprises funéraires et les collectivités territoriales. De ce fait, tout problème technique ou de gestion ayant aussi une incidence sur ces relations peut être examiné afin de donner des pistes d’amélioration. Les avis donnés ne sont que consultatifs. Ils sont élaborés sous forme de réflexions, d’orientations générales et/ou de recommandations. Ils sont destinés aux personnels du crématorium et aux entreprises funéraires, aux gestionnaires de crématorium, aux usagers et à l’association crématiste.
Les acteurs
Dans le fonctionnement au quotidien des crématoriums, se trouvent en présence permanente, physique ou induite, différents acteurs :
- la collectivité publique gestionnaire ou délégataire,
- le gestionnaire du crématorium (si Délégation de Service Public – DSP),
- le directeur et les personnels du crématorium,
- les familles des usagers,
- les entreprises funéraires,
- les associations crématistes.
Chacun a un rôle particulier mais complémentaire indispensable dans le bon fonctionnement de ce service public.
Les attentes
- La collectivité publique et le gérant en cas de DSP
Une gestion saine, non déficitaire, une satisfaction globale des citoyens et des employés : cela implique une transparence totale. Il est important pour les collectivités publiques d’affirmer et de faire connaître leur responsabilité, même en cas de DSP.
- Le personnel du crématorium
De bonnes conditions de travail (sécurité, rémunération, aisance dans son activité professionnelle).
- Les familles
Un accueil de qualité par une personne disponible pour donner tout renseignement.
Connaître quel peut et doit être leur interlocuteur et leur recours en cas de litige.
Des cérémonies dignes et capables d’aider à l’accomplissement du deuil.
- Les entreprises funéraires
Un accès aisé, une égalité de traitement, des créneaux horaires adaptables aux besoins, une marge de manœuvre pour officier.
- Les associations crématistes
Des prestations de qualité ne donnant pas le flanc à la critique. La satisfaction des usagers, adhérents ou non, une possibilité de présence. Être un interlocuteur reconnu. Montrer une bonne image de la crémation en général.
Les exigences
S’agissant d’un service public, il est donc légitime d’exiger
- Une prestation de qualité quant à l’accueil des familles comme des organismes funéraires en toute neutralité.
- Une cérémonie digne, respectueuse qui donne un sens à l’hommage tant lors du déroulement que lors de la remise de l’urne. Il convient à cet effet de préciser qui doit la réaliser (problème se posant régulièrement entre le gestionnaire et l’opérateur funéraire).
- Une information précise et exacte sur le déroulement technique de la crémation, ainsi que sur les droits et devoirs quant à la destination des cendres.
- Un accueil identique et sans discrimination des entreprises funéraires quant à la réservation de créneaux horaires.
- Un fonctionnement matériel sans incidents (entretien des fours, personnels formés en nombre suffisant, pas de nuisances vis-à-vis du voisinage…).
- Des locaux et des abords propres et entretenus.
- Le respect du cahier des charges.
Composition et fonctionnement des comites d’éthique
Idéalement, il peut être composé de plusieurs membres cooptés ou élus dans différents collèges dans une volonté de pluridisciplinarité, soit une ou plusieurs personnes représentant :
- la collectivité territoriale ayant créé le crématorium,
- le gestionnaire du crématorium (en DSP ou en régie),
- les personnels du crématorium,
- la société civile ou dits "représentants des usagers",
- les entreprises funéraires,
- l’association crématiste locale.
Cette variété d’acteurs groupant toutes les personnes agissant autour de la crémation permet ainsi des échanges de vue différents, l’approche et la connaissance – sinon la compréhension – des problèmes de chacun, et une transparence des faits et de la gestion. Il est important de veiller à un équilibre des collèges. Les personnes de la société civile peuvent être des membres de l’association crématiste locale.
Fonctionnement
Il est souhaitable, lors de la première réunion, d’élire un "bureau" composé d’un président, d’un vice-président, d’un secrétaire, afin de savoir qui fait quoi, et qui coordonne les travaux. Le groupe se réunit au moins deux fois par an sur convocation de son président. Il peut être saisi par l’intermédiaire de son président ou d’un de ses membres, par tout professionnel du crématorium ou d’entreprise funéraire. Établir un quorum, soit en général la présence d’au moins la moitié des membres. La voix du président étant prépondérante en cas d’égalité. Les dossiers délicats peuvent être présentés de manière anonyme. Les réponses données aux interrogations concernant des problèmes évoqués sont archivées. Le règlement du Comité d'Éthique doit être affiché au crématorium et adressé à toutes les entreprises funéraires.
Le Comité peut inviter toute personne qu’il jugera utile à participer à ses travaux (à titre consultatif uniquement). Chacun est tenu à la discrétion. Le Comité n’a pas de fonds propres et peut bénéficier de la logistique du crématorium – ou de la collectivité publique délégataire – pour le secrétariat et la tenue des séances. Les temps forts du Comité d’Éthique peuvent être insérés dans les bulletins locaux de communication de la collectivité concernée, qui pourra ainsi présenter avec son rapport d’activité annuelle de l’équipement la participation du Comité d'Éthique via les médias locaux. Ceci contribuera à donner une image positive et transparente de la collectivité. Tous les membres sont bénévoles.
Existant
À ce jour, il existe 180 crématoriums en service. Une enquête faite par la Fédération Française de Crémation (FFC) fait apparaître que :
- 65 % des crématoriums ne possèdent pas de Comité d'Éthique,
- 20 % sont en projet,
- 15 % sont mis en place.
Retour d'expérience
L’expérience des Comités d’Éthique qui fonctionnent montre que c'est :
Pour la collectivité territoriale :
- un gage de transparence,
- une possibilité d’information de l’activité,
- une affirmation et un bon usage de ses responsabilités.
Pour le gestionnaire :
- la recherche de solutions pour des problèmes techniques et/ou humains,
- la prévention des risques,
- la possibilité de répertorier les difficultés,
- le partage des problématiques (il n’est plus seul !).
Pour les entreprises funéraires :
- la garantie de non-discrimination,
- l’égalité de traitement,
- la parfaite connaissance des rôles de chacun en matière de cérémonie, de destination des cendres, d’accueil des familles.
Pour les familles :
- la garantie d’un service public de qualité,
- la neutralité, la laïcité et la dignité lors de l’accueil, des cérémonies d’hommage et de remise des cendres,
- la présence d’un interlocuteur pour exprimer ses satisfactions ou doléances et la garantie qu’elles seront prises en compte.
Pour les associations crématistes :
- la garantie que l’éthique de la crémation et que la volonté des familles sont respectées,
- la garantie d’une bonne image de la crémation.
Pour tous les acteurs :
un lieu de rencontre neutre entre tous les intervenants qui sont pris en considération quel que soit leur rôle.
La FFC
Résonance n°123 - Septembre 2016
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