Le parc français des pompes funèbres comprend 7 coopératives funéraires. Depuis la première création à Nantes en 2016, d’autres ont suivi : Rennes, Bordeaux, Dijon, Tulle et Caen. C’est sur le territoire de la métropole lilloise que la septième coopérative funéraire, la première des Hauts-de-France, a ouvert à Marcq-en-Barœul le 17 janvier 2022.
À l’image du phénix qu’elle a choisi pour la représenter, la coopérative funéraire de Lille prend son envol depuis quelques mois et a rejoint ses sœurs aînées qui ont vu le jour en France ces dernières années. Portée par la volonté d’organiser les funérailles "autrement", Séverine Masurel précise le cahier des charges de la structure dont elle a pris l’initiative de la création :
"Outre l’organisation des funérailles, cœur de métier d’un opérateur de pompes funèbres, nous accompagnons les familles en respectant leurs souhaits et nous les guidons dans l’expression puis l’écriture de leurs volontés ultimes. Nous sommes également un relais d’information sur les évolutions du secteur du funéraire. Le supplément d’âme de nos activités consiste à permettre aux citoyens de se (ré)approprier l’organisation des funérailles, de leur donner du sens et de (re)créer du lien autour de la mort."
Même si l’équilibre financier est la condition de la pérennité de la coopérative, Séverine affirme : "Lors d’un décès, notre équipe se charge de chaque étape en prenant soin d’accorder tout le temps nécessaire aux proches pour les informer, les accompagner dans la réflexion vers les choix qui leur correspondent vraiment."
La raison d’être de la coopérative funéraire de Lille est parallèlement le soutien de toutes les démarches qui aboutissent à oser parler de la mort. Plusieurs conférences ont déjà été organisées sur diverses thématiques depuis. Succès de l’initiative couronné par la richesse des échanges sur la réglementation en vigueur, les participants ont pleinement joué le jeu en partageant leurs valeurs, leurs convictions, leur philosophie de vie lors de débats très animés.
Au quotidien, Séverine et Corinne sont disponibles pour poursuivre ces échanges, et accueillent tout public avec bienveillance. Ici, la démarche n’est pas commerciale mais humaniste, et la personne qui aura bénéficié des conseils professionnels au cours d’un échange informel sera libre de ses choix sans pression aucune.
En effet, le statut de Société Coopérative d’Intérêt Collectif (SCIC) garantit une gestion financière transparente, équilibrée et entièrement destinée à son propre développement et à l’accompagnement optimal des familles. Aucune plus-value inutile n’est apportée à la facturation des prestations.
Au cœur de notre projet, et avant tout, ce qui nous a amenées à créer la Coopérative Funéraire de Lille, c’est l’humain, martèle Séverine. Toutes les missions sont réalisées dans le respect du défunt et de ses souhaits, mais pas seulement : la coopérative s’attache à se fournir localement pour la fourniture des cercueils, des capitons, des urnes. Elle met en place des collaborations avec des acteurs locaux, citoyens, soucieux de l’environnement, puisque c’est avant tout une structure citoyenne soucieuse de son inclusion sociétale.
Projets à venir :
La coopérative propose une ouverture, une levée des tabous, un partage d’informations sur le sujet de la mort. Depuis son ouverture, des conférences, visites de cimetières, "portes et cuisines" ouvertes rythment son quotidien.
C’est dans ce sens que, début octobre, le premier Café Mortel sera organisé par la coopérative sur la métropole lilloise : "Et si on parlait de la mort ? Et des funérailles ?" Également, un atelier créatif sera proposé juste avant le 1er novembre afin de composer un objet pour se rappeler, rendre hommage ou tout simplement penser à un défunt. Création personnalisée, à l’image de ce qu’il était, aimait, représentait. Ces événements sont ouverts à tous. Toutes les informations utiles se trouvent sur le site dédié de la coopérative
Démarche humaniste
Exemple : la rencontre d’une personne se sachant en fin de vie, qui souhaite préparer ses funérailles, discuter de ses volontés. Quelques heures passées à ses côtés pour l’informer, le conseiller, le faire se questionner. Et 3 mois plus tard, son décès…
La rencontre avec sa famille. La facilité d’échange car nous connaissions "un peu" leur défunt. La facilité d’organisation, car il avait anticipé, réfléchi à ce que devaient être ses funérailles. Et ainsi une cérémonie à son image, pleine de sens et d’émotions.
Parcours de vie de Séverine : Pourquoi le funéraire ? Cette question m’a été maintes fois posée notamment par mes proches. 24 années passées dans le textile m’ont apporté des compétences aussi bien organisationnelles et de gestion, que de management et de relations transverses. Et l’humain +++, dans tout cela ? Depuis l’adolescence, et récemment encore, j’ai vécu des cérémonies funéraires qui m’ont questionnée, parfois mise en colère, car le défunt n’était pas suffisamment mis à l’honneur : qui était-il, qu’aimait-il, quelles relations entretenait-il, qu’est-ce qui le faisait vibrer au quotidien ? Les cérémonies étaient cadrées, froides, les textes et les musiques maintes fois entendus, aucune place à la personnalisation. Soutenue par ma famille, mon mari et mes trois enfants, avec lesquels je partage des valeurs humaines fortes telles que le respect, l’écoute, le soutien et l’amour, j’ai décidé de faire de ma vie ce qui me semble juste. Le besoin de devenir actrice m’est apparu en découvrant l’existence des coopératives funéraires. Un projet innovant dans le domaine, porteur de sens, en adéquation avec mes valeurs éthiques, sociales et environnementales. J’ai depuis rencontré sur mon chemin de nombreuses personnes en adéquation avec le projet et aussi source d’inspirations nouvelles pour le concrétiser. Je fais partie d’un collectif avec de belles valeurs, cela est regénérant." |
Parcours de vie de Corinne J’ai toujours été apaisée dans les cimetières, de partout, depuis mon plus jeune âge. Le cimetière est l’endroit qui me permet de me recentrer sur moi-même. J’ai toujours dit qu’un jour je serais "croque-mort". Et la première crise sanitaire a fait surgir mon besoin de sens dans mon activité professionnelle. Après croisement de mes compétences, savoir-être, savoir-faire et les missions de conseiller funéraire, l’évidence est apparue. J’ai monté ce projet de reconversion professionnelle en juin 2020. Mon diplôme obtenu en mars 2021, une nouvelle vie professionnelle a débuté pour moi à cet instant. |
Marie-Christine Monfort
Résonance n° 183 - Septembre 2022
Résonance n° 183 - Septembre 2022
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